L’alliance entre le géant américain des semi-conducteurs et le constructeur japonais franchit un nouveau cap avec le « Project Amethyst ». Trois innovations majeures en intelligence artificielle et en rendu graphique ont été présentées conjointement par Jack Huynh, vice-président senior d’AMD, et Mark Cerny, l’architecte des consoles PlayStation. Si aucune annonce officielle n’a été faite concernant une PlayStation 6, les technologies dévoilées dessinent les contours d’une prochaine génération de consoles dont la sortie pourrait intervenir d’ici quelques années.
Une collaboration historique portée vers l’avenir
La coopération entre AMD et Sony Interactive Entertainment remonte à plusieurs générations de consoles, mais le « Project Amethyst » marque bien une rupture dans l’approche des deux partenaires. Là où les précédentes itérations se concentraient essentiellement sur l’accroissement de la puissance de calcul, cette nouvelle phase vise à réconcilier prouesses techniques et aspirations créatives des studios de développement.
« Nous avons travaillé sur des technologies vraiment fascinantes avec Sony et je ne pouvais pas imaginer meilleure personne pour les présenter que mon ami Mark Cerny », a déclaré Jack Huynh lors de la présentation commune diffusée sur la chaine Youtube de PlayStation. L’architecte de la PS5, une figure respectée dans l’industrie du gaming depuis plus de trois décennies, a pour sa part insisté sur un changement de paradigme : « Ce n’est plus une simple question de puissance brute, il s’agit de repousser les limites de la créativité tout en optimisant l’efficience et la synchronisation des systèmes. »
La philosophie transparaît dans les trois innovations dévoilées, actuellement au stade de simulation mais promises à une intégration progressive dans les futures architectures AMD et les consoles Sony.
Trois piliers technologiques pour transformer l’expérience ludique
Le premier axe repose sur les « Neural Arrays », ou réseaux de neurones intégrés. Cette approche permet aux unités de calcul du processeur graphique de fonctionner de concert pour constituer un moteur d’intelligence artificielle spécialisé. Concrètement, l’architecture optimise le traitement des modèles de « machine learning » à grande échelle, qui ouvre la voie à des améliorations importantes en matière de mise à l’échelle d’image et de traçage de rayons. « Avec les réseaux neuronaux, nous débloquons un nouveau niveau de performance pour le machine learning. Cela signifie de meilleures technologies de mise à l’échelle, de traçage de rayons, et de nouvelles fonctionnalités inédites », a précisé Mark Cerny.
Les « Radiance Cores » constituent le deuxième pilier. Ces unités matérielles dédiées prennent en charge le ray tracing et le path tracing en temps réel, des techniques jusqu’ici extrêmement gourmandes en ressources. En déléguant ces calculs complexes à des circuits spécialisés, le système libère le processeur central et permet au GPU de se consacrer à ce pour quoi il est optimisé : l’ombrage et l’éclairage. Il y aurait donc un gain de rapidité significatif issu de l’intégration de cette logique directement dans le matériel pour l’architecte japonais. L’évolution annoncée pourrait enfin démocratiser le ray tracing complet, jusque-là réservé à quelques titres phares en raison de son coût en performances.
La troisième innovation, baptisée « Universal Compression », repense la gestion de la bande passante mémoire. Contrairement aux méthodes actuelles qui se limitent à compresser les textures, le procédé s’applique ici à l’ensemble des données circulant vers la mémoire graphique. Les bénéfices sont doubles : d’une part, l’augmentation du niveau de détail affiché à l’écran et d’autre part la réduction de la consommation énergétique, un critère de plus en plus scruté par les fabricants de matériel électronique.
Une PlayStation 6 qui ne dit pas encore son nom
Si Sony et AMD se sont gardés de prononcer les mots « PlayStation 6 », les indices disséminés au fil de la présentation ne trompent personne. Mark Cerny a d’ailleurs levé un coin du voile : « Ces technologies n’en sont encore qu’au stade de la simulation, mais les résultats sont très prometteurs et j’ai hâte de les intégrer dans une future console d’ici quelques années. »
Un horizon de « quelques années » laisse entrevoir une commercialisation aux alentours de 2028, soit sept à huit ans après le lancement de la PS5, un cycle de vie cohérent avec les standards de l’industrie. La PS5 Pro, sortie récemment, devrait quant à elle assurer la transition en intégrant certaines de ces avancées de manière embryonnaire.
La stratégie de communication progressive n’est pas nouvelle chez Sony. Le constructeur préfère généralement dévoiler ses architectures futures de manière fragmentée, laissant les studios partenaires se familiariser avec les technologies avant une annonce officielle. L’approche donne la possibilité également de jauger les réactions du marché et d’ajuster les priorités de développement en conséquence.
Au-delà de la technique, une vision pour l’industrie
Jack Huynh a également tenu à replacer ces annonces dans une perspective plus large : « Ce n’est pas simplement une histoire de silicium. Tout ce que nous développons est au service des créateurs et des communautés qui font rayonner l’industrie. » Un discours qui fait écho aux critiques récurrentes adressées aux constructeurs, parfois accusés de privilégier les spécifications techniques au détriment de l’expérience utilisateur.
L’industrie du gaming traverse actuellement une période de questionnements. Les budgets de développement explosent, atteignant parfois plusieurs centaines de millions de dollars pour les productions AAA, tandis que les délais de production s’allongent. Des outils plus performants pourraient permettre aux studios de concrétiser leurs ambitions créatives sans multiplier de façon exponentielle les ressources humaines nécessaires.