Pour la troisième fois seulement dans l’histoire de l’astronomie moderne, les scientifiques observent un visiteur venu d’au-delà des frontières de notre système solaire. La comète 3I/ATLAS, découverte le 1er juillet dernier par l’équipe du relevé Atlas, offre aux chercheurs une occasion rare d’étudier un objet formé dans un autre système stellaire. Gianluca Masi, du Virtual Telescope Project en Italie, a diffusé le 19 novembre une observation en direct de ce corps céleste exceptionnel, révélant une queue spectaculaire et confirmant sa nature cométaire. Avec une vitesse de 61 kilomètres par seconde et une orbite hyperbolique prononcée, 3I/ATLAS poursuit sa trajectoire à travers notre voisinage cosmique avant de replonger dans les profondeurs interstellaires.
Retransmise en direct, la séance a rassemblé à la fois des amateurs et des experts, tous réunis virtuellement autour du télescope situé à quelque 120 kilomètres de Rome. Gianluca Masi a partagé ses observations auprès des internautes : « Nous observons cela en temps réel grâce au projet Virtual Telescope. Regardez comme la queue est magnifique. Nous observons la comète interstellaire (…) découverte le 1er juillet de cette année.«
L’intérêt scientifique de 3I/ATLAS s’est accompagné d’une prouesse technique : la météo capricieuse et la localisation de l’objet, notamment au périhélie fin octobre, complexifient les prises de vue. Malgré cela, les images montrent la longue queue lumineuse caractéristique de la comète.

Une découverte qui sort de l’ordinaire
La détection initiale de 3I/ATLAS par les astronomes de l’Atlas Sky Survey a rapidement attiré l’attention de la communauté scientifique. Au moment de sa découverte, l’objet se trouvait à 670 millions de kilomètres du Soleil, dans la région comprise entre Mars et Jupiter, à une distance comparable à celle de la géante gazeuse. Pourtant, sa vitesse exceptionnelle de 61 kilomètres par seconde à cette distance suggérait immédiatement une origine inhabituelle.
Découverte le 1er juillet 2025 par le programme Atlas, la comète s’est révélée hors norme, par sa trajectoire ouverte et sa vélocité exceptionnelle, signes d’une origine externe au Système solaire.
« Dès que les observations ont été recueillies, nous avons clairement compris qu’il s’agissait d’un objet particulier. Il se déplaçait très rapidement, à une vitesse de 61 kilomètres par seconde (…), et suivait clairement une orbite hyperbolique. Ces deux caractéristiques très particulières, à savoir sa vitesse élevée et son orbite hyperbolique, suggéraient clairement qu’il s’agissait d’un objet interstellaire.« , précise Gianluca Masi directeur et fondateur du Virtual Telescope Project. Selon lui, les calculs orbitaux subséquents ont révélé une excentricité supérieure à six, bien au-delà du seuil de un qui caractérise les orbites hyperboliques. Pour mettre en perspective, les planètes du système solaire suivent des orbites elliptiques avec une excentricité proche de zéro, tandis que celle de la Terre n’est que marginalement supérieure à cette valeur.
Le troisième visiteur interstellaire connu
3I/ATLAS rejoint un club très exclusif d’objets interstellaires détectés depuis la Terre. Le premier membre, ‘Oumuamua, avait été découvert en 2017 et avait suscité de nombreuses spéculations en raison de sa forme allongée inhabituelle. En 2019, la comète Borisov était devenue le deuxième visiteur confirmé, exhibant des caractéristiques cométaires plus conventionnelles. La nouvelle venue se distingue particulièrement par son orbite particulièrement ouverte. Elle ressemble presque à une ligne droite à première vue, ce qui montre une provenance extérieure au système solaire.
Les observations spectroscopiques menées depuis sa découverte ont permis d’établir sans équivoque la nature cométaire de 3I/ATLAS. Les images capturées révèlent non seulement une queue principale mais également une anti-queue, phénomènes jugés parfaitement naturels et bien documentés dans l’étude des comètes.
Des spéculations ont émergé sur l’anomalie supposée de ce visiteur interstellaire, mais l’astronome a souhaité clarifier sa position : « Il s’agit d’un objet naturel. C’est sans aucun doute une comète. Une comète très intrigante, mais une comète tout de même. L’analyse spectroscopique, la confirmation d’un comportement typique et les images successives dissipent les doutes. Honnêtement, j’ai vu des centaines de comètes et celle-ci, bien que très spéciale car interstellaire, reste une comète et se comporte comme une comète, elle se déplace comme une comète, son orbite est, je veux dire, une orbite cométaire extrême, mais reste une orbite cométaire. »
Sa taille, évaluée entre quelques centaines de mètres et quelques kilomètres, s’ajoute à la liste des points communs avec les comètes classiques, même si son origine demeure inédite.
Un passage au plus près du Soleil
La comète a atteint son périhélie, le point de son orbite le plus proche du Soleil, le 29 octobre dernier. À ce moment critique, l’observation depuis la Terre était impossible car 3I/ATLAS se trouvait derrière notre étoile, noyée dans son éblouissante lumière. Les semaines suivantes ont permis de retrouver progressivement l’objet dans le ciel matinal, et il a offert aux astronomes l’opportunité d’étudier son comportement post-périhélie.
Des observations complémentaires ont été réalisées depuis Mars grâce aux sondes et orbiteurs de l’Agence spatiale européenne et de la NASA. Les données recueillies permettent d’estimer la taille du noyau cométaire entre quelques centaines de mètres et quelques kilomètres de diamètre. Le 19 décembre prochain marquera un nouveau jalon avec le passage au plus près de la Terre, bien qu’à une distance considérable représentant presque deux fois celle nous séparant du Soleil.
Les défis de l’observation astronomique moderne
Le Virtual Telescope Project, basé en Italie, montre les capacités actuelles de l’astronomie robotisée. Depuis son bureau à Rome, Gianluca Masi contrôle à distance un télescope astrographe de 25 centimètres situé dans le paysage toscan de Manciano, à 120 kilomètres de la capitale. Les images diffusées en direct nécessitent des poses de deux minutes chacune pour collecter suffisamment de lumière de cet objet lointain et relativement faible.
« En 20 ans, nous avons partagé tout ce qui se passe dans l’univers« , souligne Gianluca Masi. Le projet met en avant l’approche démocratique de l’astronomie et le partage des connaissance. Il offre un accès gratuit aux observations en temps réel. Toutefois, la maintenance des équipements et les coûts opérationnels nécessitent un soutien financier pour pérenniser ces activités.
Perspectives scientifiques et rendez-vous célestes
L’étude de 3I/ATLAS revêt une importance particulière pour la compréhension de la formation planétaire dans d’autres systèmes stellaires. L’objet provient du disque galactique et son âge estimé dépasse celui du système solaire.
Parallèlement, les astronomes se préparent à observer un autre événement remarquable avec la comète C/2024 K1 ATLAS, qui a subi une fragmentation de son noyau. Le Virtual Telescope Project prévoit une retransmission en direct dans la nuit du 25 novembre (4h du matin) pour suivre l’évolution de ce phénomène distinct mais tout aussi fascinant.
Source : VTP Project 2.0











