Tout d’abord, dans tous ses domaines, Areva est très bien placé dans la compétition mondiale individuelle et a l’avantage d’être le seul industriel présent sur la totalité de la filière nucléaire de l’extrême amont à l’extrême aval. En plus c’est le seul opérateur nucléaire dont le réacteur de troisième génération est sorti depuis longtemps du bureau d’étude pour passer à la phase de construction en Finlande et en France.Son plus proche concurrent semble bien devoir être la filiale Siemens Rosatom qui est présente également sur à peu prés tout le cycle du combustible, dispose d’un réacteur de deuxième génération largement prouvé, mais n’a pas la crédibilité des matériels français américain ou japonais. Sa capacité unique à fournir les matériels mais aussi les combustibles enrichis et à reprendre les combustibles usés, ainsi que son alliance avec Mitsubishi la place définitivement en tête de la compétition mondiale.
Par contre, il devient urgent de lui donner les moyens financiers nécessaires à tous les développements en cours dans tous ses métiers.En France, en Italie, en Inde, aux Etats Unis,au Japon voire au Brésil. Dans les mines au Kazakstan, au Niger ou en Namibie. Dans les usines d’enrichissement Georges Besse I et II. Dans de nouvelles capacités de production de cuves pour réacteurs. Et dans des usines de retraitement des combustibles usés et de vitrification de déchets au Japon ou aux Etats Unis et peut être même en Chine. Sans compter qu’il faut développer une version 1000MW de l’EPR!
Au total ce sont 48 milliards d’euros de commandes dont dispose Areva, un total pharamineux qui représente 4 ans de chiffre d’affaire actuel. Par contre ses besoins de financement constituent également un mur d’argent estimé à une trentaine de milliards d’euros, dont 2.7 dès 2009. Heureusement Areva est peu endetté à 5 milliards d’euros.Un cadavre dans le placard néanmoins avec le chantier assez calamiteux de l’EPR de Finlande dont nul ne sait combien il lui coutera en finale mais qui vient de se traduire par une provision de 1.7 milliards d’euros.
Pour accompagner une telle mutation de taille garantie par des commandes, la solution simple est de procéder à une augmentation massive de capital, d’une bonne vingtaine de milliards, par exemple. Or Areva qui appartient à 80pct à l’Etat via le CEA ne dispose que d’un capital nominal de 1.35 milliards d’euros,est valorisé par la bourse à 10.5 milliards d’Euros et n’a un chiffre d’affaire que de 13/14 milliards d’euros annuels. Et son actionnaire, l’Etat, est lui aussi endetté jusqu’au coup, le résultat de 25 ans de gabégie financière de nos élus.Le fameux Fonds Special d’Investissement que le gouvernement vient de mettre en place peut à la rigueur en mettre 3 ou 4 milliards car il ne dispose pas de grand chose en fin de compte et se concentre plutôt pour l’instant sur le sauvetage de canards boiteux.Il va donc falloir faire appel au privé mais l’époque n’y est absolument pas favorable.
Alors? L’hypothèse Siemens étant désormais exclu, on va faire du gré à gré, une méthode qu’adorent nos gouvernants d’ailleurs car c’est dans de telles circonstances qu’ils ont l’ivresse de gouverner le monde. On peut filialiser certains actifs et accueillir dans ces filiales certains utilisateurs de la facilité en question.Ce sera le cas des usines d’enrichissement Georges Besse I et II par exemple avec l’entrée de GDF Suez et du japonais Kansai. On peut revendre certains actifs non stratégiques comme certaines participation dans Eramet ou STmicroélectronics ou revendre une partie des actifs du groupe UraMin.On peut même se demander si la partie Transport et Distribution, constitué d’ailleurs à partir d’actifs d’Alstom, rentre bien dans le cœur de métier d’Areva Mais il faudra aller bien au delà.
Au dehors le bal des prétendants comprend Alstom, qui prétend qu’il y aurait des synergies entre les deux groupes pour présenter des offres commerciales globales réacteur+turboalternateur alors que la pratique montre que les opérateurs privilégient des appels d’offres séparés. On peut aller encore plus loin dans l’offre commerciale intégrée en y rajoutant le génie civil de … Bouygues, actionnaire principal d’Alstom. Est que cela correspond vraiment aux souhaits des clients, rien n’est moins sur.
Autres prétendant extérieurs, le groupe Total qui en a les moyens financiers. Ou Mitsubishi qui renforcerait ainsi ses liens avec Areva mais au détriment d’un controle amoindri de l’Etat Français et d’une position de "partenaire dormant/sleeping partner" qui a fini par fatiguer Siemens. Ou encore de fonds souverains du golfe.
Bref, on finira surement par un cocktail de toutes ces possibilités techniques. A suivre donc à court terme.
[ Archive ] – Cet article a été écrit par CaDerange