Christian Könemann
Les ordinateurs quantiques ont un grand potentiel pour relever les défis de l’avenir. Cela inclut, par exemple, le développement de nouveaux matériaux aux propriétés parfaitement définies. Les processeurs quantiques utilisent des qubits qui peuvent adopter non seulement les états 0 ou 1, mais les deux simultanément. De plus, les qubits peuvent être intriqués. Ces propriétés rendent possible des performances de calcul jusque-là inconcevables ; les ordinateurs quantiques seront particulièrement efficaces pour des tâches hautement complexes, comme la cryptographie ou les simulations en sciences naturelles et de l’ingénieur.
Les qubits peuvent être fabriqués à partir de transmons, des atomes artificiels constitués de minuscules circuits. Ils sont supraconducteurs, ce qui signifie qu’ils n’ont aucune résistance électrique à basse température. Les transmons sont actuellement les qubits supraconducteurs les plus stables. Ils sont faciles à fabriquer et à contrôler.
Lors des mesures, les qubits peuvent sauter vers des états indésirables
La mise à l’échelle des ordinateurs quantiques basés sur des qubits supraconducteurs, en particulier les transmons, s’est avérée difficile jusqu’à présent pour obtenir une fidélité de lecture fiable des résultats expérimentaux sans affecter l’état quantique. Pendant le processus de lecture, de nombreux photons micro-ondes sont envoyés dans un résonateur. Cela peut provoquer le saut du qubit vers des états d’énergie plus élevés. Cet effet, comparable à l’ionisation d’un atome sous une lumière intense, rend la mesure peu fiable.
« Si nous comprenons à quel nombre de photons dans le résonateur et à quel niveau de charge du transmon le qubit saute vers des états indésirables, nous pouvons optimiser la procédure de mesure, par exemple par un choix judicieux des paramètres de fonctionnement ou par une stabilisation de la charge », explique le professeur Ioan M. Pop, qui dirige la recherche sur l’informatique quantique à l’Institut des Matériaux et Technologies Quantiques (IQMT) du KIT.
Des chercheurs de l’IQMT, de l’Institut de Physique (PHI) du KIT et de l’Université de Sherbrooke au Québec, au Canada, ont récemment mené une étude conjointe dans laquelle ils ont amélioré la compréhension des transitions induites par la mesure dans les qubits supraconducteurs au moyen d’expériences et en élaborant des stratégies pratiques pour des lectures quantiques plus fiables. « Une difficulté majeure dans l’étude des transitions quantiques causées par les mesures est la présence de fluctuations de charge dans le circuit, un problème omniprésent pour toutes les plateformes à l’état solide », souligne le Dr Mathieu Féchant, chercheur en informatique quantique à l’IQMT. « Dans notre travail, nous surveillons ce paramètre et le recalibrons à plusieurs reprises tout en faisant varier le niveau de lecture. »
Des résultats expérimentaux conformes aux modèles théoriques
Les résultats des expériences sont conformes aux modèles théoriques récemment proposés et confirment la compréhension de la physique sous-jacente. Les chercheurs ont également montré que l’étalonnage actif de la charge sur les transmons leur permet d’amener les lectures dans des plages de nombres de photons où les transitions quantiques interférentes sont réduites. À long terme, l’étude contribue à éviter les erreurs de lecture, aidant à rendre les ordinateurs quantiques supraconducteurs plus fiables.
Mathieu Féchant, Marie Frédérique Dumas, Denis Bénâtre, Nicolas Gosling, Philipp Lenhard, Martin Spiecker, Simon Geisert, Sören Ihssen, Wolfgang Wernsdorfer, Benjamin D’Anjou, Alexandre Blais, et Ioan M. Pop : Offset Charge Dependence of Measurement-Induced Transitions in Transmons. Physical Review Letters, 2025. DOI: 10.1103/yljv-b4kj
Source : KIT











