Le professeur de physique expérimentale des matériaux Kostas Sarakinos étudie la manière dont les atomes individuels s’agencent pour former des couches minces.
Quels sont vos thèmes de recherche ?
J’étudie la manière dont les atomes individuels, qui sont au départ à l’état gazeux, s’organisent en structures solides ordonnées lorsqu’ils rencontrent une surface solide. Ce processus est l’un des principaux moyens de créer de nouveaux matériaux d’une taille de quelques nanomètres, voire plus petite.
Ces matériaux ont des propriétés physiques et des comportements très différents de ceux qui ont des dimensions macroscopiques, et ils ont joué un rôle clé dans les avancées technologiques dans des domaines tels que la microélectronique, la conversion et le stockage de l’énergie, et les communications.
En bref, mon groupe est spécialisé dans le domaine du dépôt physique en phase vapeur de couches minces. Nous utilisons des outils expérimentaux qui nous permettent de construire des matériaux en couches minces composés de plus d’un élément chimique avec une précision sans précédent – littéralement atome par atome. Nous pouvons étudier la formation de ces films en temps réel et relier leur structure et leur composition à des propriétés fonctionnelles importantes, telles que la conductivité électrique, la résistance mécanique, la transparence optique et la résistance aux dommages causés par les radiations.
Nous développons également des outils informatiques pour modéliser les processus qui se produisent pendant la formation des films minces. Nous accédons ainsi à des échelles de temps et de longueur que les expériences ne permettent pas d’atteindre. Nos outils informatiques sont basés sur les méthodes d’apprentissage automatique les plus avancées.
Où et comment le sujet de votre recherche a-t-il un impact ?
Les couches minces sont omniprésentes. Elles ont joué un rôle essentiel dans la révolution de la microélectronique en permettant la production de nouveaux matériaux semi-conducteurs. Elles ont rendu possible la production en masse de composants de précision pour l’aviation en améliorant la durée de vie et les performances des outils de découpe et de formage des métaux.
Les couches minces ont également contribué à augmenter considérablement l’efficacité et à réduire la consommation de carburant des moteurs à combustion interne en réduisant le frottement entre les pièces mobiles. Ces dernières années, leur importance s’est accrue dans des domaines tels que l’énergie photovoltaïque, les batteries et la catalyse, ce qui en fait un élément crucial de la transition énergétique en cours.
À mesure que la technologie devient plus avancée et que les exigences de performance deviennent plus strictes, il y a un besoin croissant de matériaux à couches minces conçus sur mesure avec des structures soigneusement contrôlées à de multiples échelles de longueur. Ma recherche est opportune car elle répond à ce besoin en faisant progresser notre compréhension fondamentale des mécanismes qui contrôlent la façon dont les atomes individuels s’arrangent lors de la synthèse des couches minces. Ces connaissances peuvent nous aider à exploiter les propriétés uniques des matériaux bidimensionnels modernes (comme le graphène) dans de nouveaux dispositifs, à créer des alliages pour le stockage de l’hydrogène à l’état solide et à soutenir l’expansion de la technologie photovoltaïque à l’échelle du térawatt.
Qu’est-ce qui vous inspire actuellement dans votre domaine ?
La physique et la technologie des couches minces est un domaine bien établi, mais jusqu’à présent, une grande partie de notre compréhension a été basée sur l’observation des phénomènes plutôt que sur une véritable compréhension des mécanismes sous-jacents.
Quels sont les mécanismes qui régissent la structure et les propriétés des couches minces ?
Les progrès récents des instruments scientifiques, les nouveaux concepts de synthèse des matériaux (un domaine auquel mon groupe contribue activement) et les outils informatiques nous permettent aujourd’hui, pour la première fois, d’observer les mouvements atomiques en temps réel et de développer des modèles précis qui décrivent les processus physiques à l’origine de la formation des couches minces.
C’est une ère passionnante pour le domaine : non seulement nous pouvons concevoir des matériaux atome par atome, mais nous pouvons également les créer de cette manière. Mon groupe s’efforce d’être à l’avant-garde de cette révolution.
Source : U. Helsinki