Gauss Fusion a annoncé le lancement opérationnel de la phase deux de leur programme technologique visant à concevoir les aimants supraconducteurs nécessaires aux réacteurs de fusion nucléaire. Créée en 2022 par un consortium composé de cinq entreprises privées issues d’Italie, d’Allemagne, d’Espagne et de France, cette société s’inscrit dans une initiative pan-européenne dont l’objectif est de prouver, dans les vingt prochaines années, la faisabilité technique et la durabilité économique de la fusion nucléaire comme source d’énergie.
La collaboration avec l’agence italienne ENEA et leur spin-off ICAS représente un pilier central de ce programme. Elle porte sur le développement de câbles supraconducteurs capables de fonctionner dans des conditions extrêmes de champ magnétique et de température. Ces matériaux, intégrés dans les futurs réacteurs à fusion, doivent permettre de stabiliser les réactions thermonucléaires tout en minimisant la consommation énergétique du système.
Le passage de la conception conceptuelle à la phase d’ingénierie détaillée marque une étape décisive dans la maturation du projet. Parmi les avancées notables figurent les tests préliminaires menés dans les laboratoires d’ENEA sur des prototypes de câbles HTS (High Temperature Superconductors), qui présentent une architecture renforcée destinée à résister à des contraintes électromagnétiques prolongées. Ces conducteurs, plus stables et efficaces que leurs prédécesseurs, ouvrent la voie à une génération de systèmes moins énergivores.
En parallèle, Gauss Fusion développe également des câbles LTS (Low Temperature Superconductors) basés sur le niobium-étain (Nb₃Sn), une technologie éprouvée utilisée notamment dans les projets de physique des hautes énergies. Ces derniers offrent une capacité allant jusqu’à 100 kA, garantissant fiabilité et stabilité dans des applications industrielles exigeantes. Selon les responsables du projet, ces deux types de conducteurs ne sont pas concurrents mais complémentaires : les solutions LTS assurent un socle technologique robuste, tandis que les HTS représentent un saut qualitatif essentiel vers une efficacité accrue.
Cette double approche stratégique permet à Gauss Fusion de construire une chaîne d’approvisionnement complète, capable de répondre à des défis techniques variés grâce à des solutions adaptées. L’entreprise bénéficie, depuis 2024, d’un financement public allemand de 10 millions d’euros destiné au développement de technologies magnétiques, dans le cadre d’un investissement public-privé plus large visant à renforcer la position de l’Europe dans ce domaine.
Les activités se déploient actuellement entre l’Italie, l’Allemagne et les autres pays partenaires, dans une logique de coopération transnationale. La phase deux inclut également l’étude des sites potentiels pour l’implantation future des centrales, confiée à l’Université technique de Munich.
« Dans un contexte mondial où les États-Unis et la Chine mobilisent des ressources considérables pour dominer la révolution énergétique, l’Europe dispose de l’excellence scientifique et industrielle nécessaire pour jouer un rôle majeur », souligne Milena Roveda, directrice générale de Gauss Fusion. « Notre objectif est de construire la première installation d’un gigawatt basée sur la fusion par confinement magnétique et de déployer la première génération de centrales à fusion pour répondre aux besoins énergétiques européens. Il est impératif d’agir maintenant pour éviter d’être reléguée à la périphérie de cette innovation cruciale. En collaboration avec ENEA et ICAS, nous intensifions le développement et les tests des technologies clés afin de démontrer la viabilité et la durabilité de la fusion nucléaire dans les deux décennies à venir. »
« ENEA apporte son expertise reconnue dans le domaine de la supraconductivité, notamment dans le développement de câbles HTS innovants et performants. Au sein du projet Gauss Fusion, notre contribution va bien au-delà de la simple recherche : elle implique un transfert de savoir-faire vers les entreprises, favorisant leur compétitivité et leur capacité à innover. Cette collaboration illustre parfaitement comment la recherche publique et l’industrie privée peuvent travailler ensemble pour relever les défis scientifiques et technologiques liés à la fusion énergétique dans un environnement concurrentiel mondial. », ajoute Giorgio Graditi, directeur général d’ENEA.
Fondée par des entreprises leaders dans l’industrie de la fusion, Gauss Fusion réalise une alliance inédite entre recherche fondamentale et savoir-faire industriel. Leurs partenaires académiques incluent CERN, l’Institut Max Planck de physique des plasmas, l’Institut Karlsruhe de technologie, ENEA et l’Université d’Eindhoven, autant d’institutions qui appuient la montée en puissance du projet.
À travers cette démarche, Gauss Fusion poursuit un objectif clair : rendre la fusion nucléaire industrielle, modulable et accessible en Europe.
Source : CP / Gauss Fusion