Une équipe de l’université technique de Berlin, de HZB, d’IMTEK (université de Fribourg) et de Siemens Energy a mis au point un électrolyseur à membrane alcaline très efficace, dont les performances se rapprochent de celles des électrolyseurs PEM existants. Ce qui rend cette réalisation remarquable, c’est l’utilisation de composés de nickel peu coûteux pour le catalyseur de l’anode, en remplacement de l’iridium coûteux et rare.
À BESSY II, l’équipe a pu élucider les processus catalytiques en détail en utilisant des mesures « operando », et une équipe théorique (États-Unis, Singapour) a fourni une description moléculaire cohérente. À Fribourg, des cellules prototypes ont été construites à l’aide d’un nouveau procédé de revêtement et testées en fonctionnement.
L’hydrogène jouera un rôle majeur dans le système énergétique du futur, en tant que moyen de stockage de l’énergie, carburant et matière première précieuse pour l’industrie chimique. L’hydrogène peut être produit par électrolyse de l’eau d’une manière pratiquement neutre sur le plan climatique, à condition d’utiliser de l’électricité d’origine solaire ou éolienne.
Les efforts de mise à l’échelle d’une économie verte de l’hydrogène sont actuellement largement dominés par deux systèmes : l’électrolyse à membrane conductrice de protons (PEM) et l’électrolyse alcaline liquide classique. Les électrolyseurs AEM combinent les avantages des deux systèmes et, par exemple, ne nécessitent pas de métaux précieux rares tels que l’iridium.
Électrolyseurs à membrane alcaline (AEM) sans iridium
Des équipes de recherche de l’Université technique de Berlin et de la HZB, en collaboration avec le département d’ingénierie des microsystèmes (IMTEK) de l’Université de Fribourg et Siemens Energy, ont présenté le premier électrolyseur à membrane alcaline qui produit de l’hydrogène presque aussi efficacement qu’un électrolyseur à membrane électrolytique (PEM).
Au lieu de l’iridium, ils ont utilisé des composés d’hydroxyde double de nickel avec du fer, du cobalt ou du manganèse et ont mis au point un procédé pour les recouvrir directement sur une membrane alcaline échangeuse d’ions.
Aperçu des processus moléculaires pendant l’électrolyse à BESSY II
Pendant l’électrolyse dans la cellule, ils ont pu effectuer des mesures operando à la source de rayons X berlinoise BESSY II à la station terminale LiXEdrom.
Une équipe théorique de Singapour et des États-Unis a aidé à interpréter les données expérimentales. Cela nous a permis d’élucider les processus catalytiques et chimiques pertinents au niveau de la membrane recouverte de catalyseur, en particulier la transition de phase d’une phase alpha catalytiquement inactive à une phase gamma hautement active et le rôle des différents ligands O et des centres Ni4+ dans la catalyse », explique le professeur Peter Strasser, de l’université technique de Berlin. C’est cette phase gamma qui rend notre catalyseur compétitif par rapport aux catalyseurs à l’iridium les plus récents. Notre travail montre d’importantes similitudes avec l’iridium dans le mécanisme catalytique, mais aussi des différences moléculaires surprenantes ».
L’étude a donc fait progresser de manière significative notre compréhension des mécanismes fondamentaux de catalyse des nouveaux matériaux d’électrode à base de nickel. En outre, la nouvelle méthode d’enrobage de l’électrode à membrane promet une excellente évolutivité. Une première cellule de laboratoire entièrement fonctionnelle a déjà été testée à l’IMTEK.
Ce travail jette les bases d’une évaluation industrielle plus poussée et démontre qu’un électrolyseur d’eau AEM peut également être très efficace.
En synthèse
Cette avancée technologique représente un tournant dans le domaine de l’hydrogène vert. L’électrolyseur à membrane alcaline développé offre un équilibre optimal entre performance et coût, tout en s’affranchissant de l’iridium rare et coûteux. Si les résultats sont prometteurs en laboratoire, le véritable défi réside maintenant dans le passage à l’échelle industrielle. Néanmoins, la combinaison d’une efficacité proche des électrolyseurs PEM et d’une composition plus économique positionne cette innovation comme une solution potentiellement décisive pour l’avenir de la production d’hydrogène vert.
Pour une meilleure compréhension
Pourquoi cette innovation est-elle considérée comme majeure dans le domaine de l’électrolyse ?
Cette innovation permet d’obtenir des performances similaires aux électrolyseurs PEM traditionnels tout en utilisant des matériaux moins coûteux et plus abondants, notamment en remplaçant l’iridium par du nickel.
Quel est l’avantage principal des électrolyseurs à membrane alcaline (AEM) ?
Les AEM combinent les avantages des systèmes PEM et de l’électrolyse alcaline classique, tout en éliminant la nécessité d’utiliser des métaux précieux rares comme l’iridium.
Comment les chercheurs ont-ils pu comprendre les processus moléculaires en jeu ?
Les mesures operando réalisées à la source de rayons X BESSY II, combinées à l’analyse théorique d’équipes de Singapour et des États-Unis, ont permis de comprendre en détail les mécanismes catalytiques.
Quelle est la particularité du catalyseur développé ?
Le catalyseur utilise des composés de double hydroxyde de nickel avec du fer, du cobalt ou du manganèse, et présente une phase gamma particulièrement active qui le rend compétitif avec les catalyseurs à l’iridium.
Quelles sont les perspectives d’industrialisation de cette technologie ?
La méthode de revêtement développée pour l’électrode à membrane promet une excellente évolutivité, et les premiers tests en laboratoire sont encourageants, ouvrant la voie à une évaluation industrielle approfondie.
Article : « High-performance anion-exchange membrane water electrolyzers using NiX (X = Fe,Co,Mn) catalyst-coated membranes with redox-active Ni–O ligands » – M. Klingenhof, H. Trzesniowski S. Koch, J. Zhu, Z. Zeng, L. Metzler, A. Klinger, M. Elshamy, F. Lehmann, P. W. Buchheister, A. Weisser, G. Schmid, S. Vierrath, F. Dionigi & P. StrasserDOI: 10.1038/s41929-024-01238-w
Source : HZB – Traduction enerzine.com