Dans les profondeurs marines, les raies mantas filtrent leur nourriture avec une précision remarquable. Sur terre, nos mains saisissent délicatement les objets les plus fragiles. La fusion entre monde naturel et technologie fait naître une nouvelle génération de robots aux capacités étonnantes.
À l’Institut Fraunhofer IWS de Dresde en Allemagne, une équipe de chercheurs développe des pinces robotiques biomimétiques dotées de sensibilité. Telle une main humaine qui s’adapte naturellement à la forme et à la fragilité d’un objet, les nageoires de certains poissons réagissent à la pression par un mouvement d’enveloppement plutôt que de fuite.
«Lors de nos premiers tests en laboratoire, nous avons observé des résultats fascinants», raconte Maria Schmidt, chercheuse principale du projet. «Les pinces ont démontré une sensibilité comparable à celle d’une main humaine manipulant un œuf. Comme un pianiste qui module la force de ses doigts sur les touches, le robot ajuste sa pression en temps réel.»
Une technologie de pointe au service de la délicatesse
Les pinces fabriquées par impression 3D intègrent des capteurs sophistiqués. Un système d’impression par dépôt applique des motifs argentés ultra-fins sur la surface. Les structures conductrices, fines comme un cheveu à 250 micromètres, mesurent en temps réel la tension exercée.
Un condensateur plat, semblable à un sandwich microscopique d’argent et d’isolants, détecte la force appliquée. Les capteurs tactiles reproduisent les fonctions d’une main humaine, permettant même d’évaluer le poids d’un objet par un léger balancement, tel un cuisinier soupesant instinctivement ses ingrédients.
Des applications concrètes en développement
Une entreprise agricole allemande teste actuellement un prototype pour la récolte automatisée des fraises. «Les premiers résultats montrent une réduction de 80% des pertes dues aux meurtrissures», explique Thomas Weber, responsable de l’innovation. « Le robot manipule les fruits avec la délicatesse d’un joaillier maniant des pierres précieuses. »
Dans le domaine spatial, la NASA évalue l’utilisation de pinces similaires pour les futures missions martiennes. Les océanographes de l’Institut océanographique de Monaco expérimentent des versions sous-marines pour l’étude des organismes fragiles.
Le projet Nature4Nature dévoile une application environnementale majeure. Les chercheurs reproduisent les mécanismes de filtration des raies et des poissons-spatules pour créer des systèmes innovants. L’enjeu : stopper les microplastiques avant leur arrivée dans les océans.
Tel un tamis vivant, les poissons-spatules utilisent des structures branchiales étagées où se forment des tourbillons captant leur nourriture. Les raies mantas, véritables usines de filtration naturelles, dirigent les particules vers leur pharynx tout en évacuant l’eau.
L’innovation biomimétique en plein essor
L’impression 3D, désormais incontournable en bionique, nécessite encore des avancées en matériaux et processus industriels. L’Institut Fraunhofer IWS accompagne activement les entreprises dans l’adoption de technologies bio-inspirées.
La biomimétique redéfinit les frontières de l’innovation technologique. En transformant les mécanismes naturels en solutions concrètes, les scientifiques façonnent un futur où technologie et nature convergent harmonieusement. Les applications émergentes dans l’industrie, l’environnement et l’exploration spatiale annoncent une ère nouvelle, où l’intelligence artificielle et la sagesse naturelle s’allient pour répondre aux défis mondiaux.
Légende illustration : Le poisson-spatule se nourrit en suspension. Les chercheurs de l’IWS veulent transférer ses capacités spéciales de filtration à des systèmes de filtration créés artificiellement. © Lukas Hageneder
BioGrip : Préhenseur Finray « sensible », inspiré par la biologie | Durée du projet : Juillet 2021 à janvier 2023 | Financé par : BMBF (499 000 euros) | Partenaires du projet : EvoLogics GmbH Berlin, RUAG Space Bern, et Société allemande d’agriculture (DLG) Francfort-sur-le-Main en tant que partenaire associé.
Nature4Nature : bioinspiration grâce aux systèmes de filtration des poissons (application : filtres à microplastiques) | Durée du projet : Mars 2023 à février 2027
Financé par : UE