“L’agriculture africaine est déjà biologique. Ça ne marche pas”

Selon un groupe d’experts internationaux réuni à Kigali cette semaine, le débat polarisé sur le recours à l’agriculture soit biologique soit intensive dans l’amélioration des rendements agricoles ralentit les actions et l’adoption par les fermiers d’approches susceptibles de transformer rapidement la situation de la sécurité alimentaire de l’Afrique.

«Le débat idéologique sur l’approches à suivre pour la production agricole est une distraction aux actions nécessaires pour la sécurité alimentaire d’aujourd’hui et de demain », a déclaré Nteranya Sanginga, Directeur Général de l’Institut International d’Agriculture Tropicale (IITA). « De façon persistante, les couts alimentaires élevés et les rendements agricoles bas affaiblissent la sécurité alimentaire en Afrique centrale et mettent en risque la fragile stabilité de la région ainsi que sa croissance économique».

«Le changement climatique, la croissance démographique rapide, et la pression foncière intense sont des défis majeurs pour la région. Il est temps de se concentrer sur le concret, des solutions fondées qui mettront à jamais un terme au cycle de la faim, de la pauvreté et des conflits civils», a-t-il ajouté.

Cette semaine, plus de 200 scientifiques africains et internationaux se sont réunis à la première conférence du Consortium for Improving Agriculture-based Livelihoods in Central Africa (CIALCA) (Consortium pour l’amélioration de la subsistance à base agricole en Afrique centrale) à Kigali, au Rwanda. Les participants ont identifié plusieurs solutions pratiques qui pourraient conduire la région vers la sécurité alimentaire. Par exemple, l’adoption massive par les agriculteurs de nouvelles technologies qui améliorent les sols dégradés via une utilisation plus ciblée d’engrais minéraux ou encore l’adoption de nouvelles variétés à haut rendement qui améliorent la nutrition. La polyculture et les cultures intercalées telles que la banane, le café et les légumineuses) sont d’autres approches retenues.

« Pour beaucoup, l’engrais est un mot cru », a déclaré Bernard Vanlauwe, Directeur par intérim de la branche de recherche de la biologie et de la fertilité des sols tropicaux du Centre international d’agriculture tropicale (CIAT). « Nous devons nous concentrer sur des approches qui améliorent les moyens de subsistance. »

« Le choix ne doit pas se faire entre biologique ou non biologique; les deux approches sont complémentaires et intéressantes à différents stade du développement agricole », a déclaré Vanlauwe.

Les participants à la conférence du CIALCA sont arrivés au consensus que la recherche agricole et les efforts de développement devraient se concentrer sur le moyen terme, de plus en plus appelé l’intensification durable, qui combine les approches les plus efficaces et durables pour l’amélioration des rendements agricoles.

«L’intensification durable est le meilleur moyen de lutter contre la pauvreté rurale et la faim dans les régions avec d’énorme pressions foncières et démographiques,» a déclaré Vanlauwe.

L’utilisation des engrais en Afrique est de loin la plus basse au monde. En moyenne, les agriculteurs africains utilisent environ 9 kg d’engrais par hectare contre respectivement 86 et 142 kg par hectare en Amérique latine et en Asie du Sud.

«L’agriculture africaine est déjà biologique. Ça ne marche pas,» a déclaré Sanginga. « Nous devons nous concentrer sur des choses concrètes qui aident, et non l’idéologie. »

La recherche agricole a permis de réduire considérablement l’utilisation des engrais tout en augmentant les rendements des cultures. Ces améliorations reposent sur des recommandations spécifiques au site, faisant appel à l’analyse d’images satellites détaillées des sols africains, ainsi qu’une technique connue sous le nom de microdosage. Cette dernière implique l’application de petites quantités d’engrais à prix abordable pendant la période de croissance d’une culture.

De nouvelles recherches menées par des chercheurs du CIALCA ont montré que la culture intercalaire de bananes et de café profite à la fois à l’environnement et aux revenus des agriculteurs, par rapport à leur culture respective menée de façon indépendante. La banane est un aliment de base pour des millions d’habitants de la région, elle offre un ombrage aux plants de café, qui se traduit par des rendements plus élevés, une érosion des sols reduite, et plus d’argent pour les agriculteurs. Les scientifiques ont également noté que cette approche est ‘intelligente face au climat‘ parce que l’ombre pourrait tamponner les cultures de café sensibles à la chaleur contre les impacts prévus du changement climatique.

Les variétés améliorées de haricot grimpant cultivé par des milliers d’agriculteurs de la région ont été particulièrement bien reçues, produisant trois fois le rendement des haricots nains ordinaires. Serrées sur de petites exploitations, les nouvelles variétés de haricots utilisent précieusement l’espace limité par la croissance en hauteur au lieu d’une croissance tentaculaire. Elles améliorent également la fertilité des sols par la fixation d’azote (réduisant ainsi le recours aux engrais, et lorsque cultivées en rotation avec le maïs (une autre culture africaine de base cruciale), elles augmentent sensiblement le rendements de ce dernier.

Articles connexes

7 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
jihemnet

L’agriculture Africaine n’est pas biologique, elle est archaîque, si vous ne faites pas la différence, commencez par travailler sérieusement le sujet. L’agriculuture biologique ne se résume pas à des essais ou des approximations, mais nécéssite des compétences et une expérience approfondie. Les fermes biologiques performanres obtiennent des rendements équivalents à l’agriculture raisonnée et durable. L’Afrique est un continent magnifique, que je connais, que j’apprécie, mais une chose est sûre, c’est qu’elle manque cruellement des compétences, des techniques et des infrastructures qui lui permettront d’être autosuffisante. L’un des premiers freins à ces développements s’appelle la corruption. Quand les retombées économiques des gisements de pétrole et de gaz, des exploitations miniéres, profiteront à l’ensemble des Africains, l’Afrique aura réglé ses problémes de malnutrition et entamera son développement économique. Si l’Inra avait consacré les mêmes budgets à l’agriculture biologique qu’a celle du productivisme au détriment de la qualité, les agriculteurs Français auraient eux aussi, les compétences, les techniques, les produits et choix de variétés qui leurs permettraient d’atteindre les mêmes performances. L’intensification durable, solution adéquate, soutenue par une mécanisation appropriée, les contructeurs “Allemands” toujours eux, développent des gammes de matériel agricole en ce sens, répondant aux besoins des exploitations de grandes surfaces agricoles. Et ce n’est pas une régression, mais un véritable progrès, pour la préservation de l’environnement et de la santé publique.

Samivel51

Elle n’est pas biologique du tout. J’ai meme vu, de mes yeux, en 2007, des maraichers Nigerians utiliser du DDT alors que c’est interdit partout dans le monde depuis 30 ans. (tres toxique, jamais bio-degrade, bio-accumulateur: on en trouve jusque dans la graisse des manchots en Antarctique!)

Pastilleverte

le recours au DDT a été autorisé de nouveau, avec des conditions d’épandages “maitrisées”

jl06

Les états africains n’ont plus le luxe d’un débat de principe sur des idéaux que les continents qui parviennent à répondre à la demande alimentaire ne sont pas arrivés à mettre en œuvre eux-mêmes. Je peux comprendre l’urgence et le pragmatisme des participants, qui mieux que nous encore comprennent les défis du continent. Devant la famine, l’insuffisance de la production agricole et la forte croissance de la population année après année peut-on leur reprocher de rejeter des idées pour ce concentrer sur des solutions éprouvées? Pour ce qui est de l’agriculture biologique, la conférence aurait certainement vu le thème d’un autre œil si l’Europe ou l’Amérique du Nord avaient pu en donner une démonstration convaincante à des échelles régionales au moins. De tels exemple existe-t-ils? Si oui, sait-on transférer cette capacité dans le cadre africain? Si non, pourqoui donc?

jihemnet

L’Afrique c’est + de 30 millions de km2, 60 fois le taille de la France avec des climats extrêmes, des dizaines de pays avec des régimes politiques + ou – démocratiques et relativement instables, il n’y a pas de solution universelle. Il y a autant de différence entre l’Afrique du sud et le Soudan, qu’entre le Burkina et la Mauritanie pourtant proche. Sans une volonté politique il n’y aura jamais d’exemple à l’échelle régionale, il s’agit de professionnels indépendants, comme les plombiers, les garagistes, même l’organisation syndicale majoritaire n’est pas représentative. Par contre la France a organisé un système de production, de recherche (Inra), de formation (lycée et école spécialisée) et d’organisation, coopérative agricole, banque mutuelle agricole, accompagnées d’un appareil législatif adapté. Quand on manque de temps, on construit dans l’urgence et on rectifie les défauts. Le modèle Français n’en manque pas, toujours pas corrigés! L’agriculture biologique labelisée n’est pas forcément le modèle adapté à l’Afrique, l’exemple des caféiers et des haricots grimpant est inspiré de l’Amérique du Sud, où il est pratiqué depuis longtemps, on pourrait en citer des tas d’autres, du riziculteur Japonais ou Malgache, au producteur bio Biélorusse qui pratique sur les milliers d’hectares d’un ancien Kolkhoze. L’échange de connaissance, d’expériences peut éviter pas mal d’écueils, à commencer par les pièges de l’intégration et du lobbyisme.

Monde bio

Les anglophones permettent l’échange d’expérience….. Ouganda; Ghana;Afrique du Sud… Et l’Australie pays n°1 en supeficie Bio .. Ces pays construisent beaucoup plus rapidement leur”ideologie” du ” all organic”. Les francophones sont en retard et péssimiste sur l’avenir (cf: propos de Nteranya Sanginga, Directeur Général de l’Institut International d’Agriculture Tropicale (IITA) «L’agriculture africaine est déjà biologique. Ça ne marche pas,»); je suis d’accord avec jihemnet, la corruption “mine” l’Afrique mais si seulement des lignes d’une politique agricole été posé alors l’Afrique serai au moins ou aller….. Tous ces nombreux petits projets micro financé (inférieur a 5 millions de $) qui périclites faute de suivis aprés leurs programmes…. Par contre, je ne vois pas en quoi l’étatisme serait un mal? Seul l’état peut construire les infrastructures pour distribuer nos produits… Le principe est simple : •En 1987 le “Brundtland Report” de l’ONU, a alerté le monde de l’urgence d’un développement économique qui pourrait être soutenu sans épuiser les ressources naturelles ou nuire à l’environnement. Ce rapport a fourni une déclaration clé sur le développement durable, le définissant comme: ‘’le développement qui répond aux besoins duprésent sans compromettre la capacité des futures générations à subvenir àleurs propres besoins.’’ A partir de la les conclusions du rapporteur de l’ONU Olivier De Schutter Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation, en 2010 sont pour ma part : cohésion entre Terre, Homme et Nutrition.

Monde bio

Les anglophones permettent l’échange d’expérience….. Ouganda; Ghana;Afrique du Sud… Et l’Australie pays n°1 en supeficie Bio .. Ces pays construisent beaucoup plus rapidement leur”ideologie” du ” all organic”. Les francophones sont en retard et péssimiste sur l’avenir (cf: propos de Nteranya Sanginga, Directeur Général de l’Institut International d’Agriculture Tropicale (IITA) «L’agriculture africaine est déjà biologique. Ça ne marche pas,»); je suis d’accord avec jihemnet, la corruption “mine” l’Afrique mais si seulement des lignes d’une politique agricole été posé alors l’Afrique serai au moins ou aller….. Tous ces nombreux petits projets micro financé (inférieur a 5 millions de $) qui périclites faute de suivis aprés leurs programmes…. Par contre, je ne vois pas en quoi l’étatisme serait un mal? Seul l’état peut construire les infrastructures pour distribuer nos produits… A partir de la les conclusions du rapporteur de l’ONU Olivier De Schutter Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation, en 2010 sont pour ma part : cohésion entre Terre, Homme et Nutrition.