Jeremy rifkin, personnage clé de la prospective mondiale, est l’auteur du livre intitulé la Troisième révolution industrielle (éditions les liens qui libèrent), ouvrage dans lequel il décrit les mutations en cours de l’économie et propose des solutions pour une croissance durable tout au long du XXie siècle.
En analysant les conditions qui ont déclenché les grandes révolutions économiques de l’histoire, il observe qu’elles se produisent à chaque fois que de nouvelles technologies de communication apparaissent et se conjuguent simultanément avec de nouvelles sources d’énergies.
La première révolution industrielle s’est appuyée sur l’exploitation du charbon (essor de la machine à vapeur) pour déclencher l’industrialisation de l’imprimerie (nécessaire au partage des connaissances requises par le capitalisme industriel) ; la deuxième révolution industrielle correspond à la rencontre de l’énergie électrique et des moyens de télécommunication (téléphone, radio, télévision) ; la Troisième révolution industrielle, selon Jeremy rifkin, sera le fruit d’une synergie détonante entre les énergies renouvelables et les technologies internet.
Dans son livre, Jeremy rifkin, affirme que la troisième révolution industrielle repose en fait sur cinq piliers :
1- le passage aux énergies renouvelables ;
2- la transformation du parc immobilier de chaque continent en mini-centrales électriques pour collecter les énergies renouvelables sur site ;
3- le déploiement des technologies de stockage par le biais de l’hydrogène ou d’un autre moyen dans chaque bâtiment et dans toute l’infrastructure, afin d’emmagasiner les énergies intermittentes ;
4- l’utilisation de la technologie de l’internet pour faire évoluer le réseau électrique de chaque continent vers un système intelligent de distribution décentralisée de l’énergie fonctionnant comme internet (lorsque des millions de bâtiments génèrent une petite quantité d’énergie au niveau local, sur site, le surplus peut être revendu au réseau et l’électricité partagée avec leurs voisins) ;
5- la transformation de la flotte de transport en véhicules électriques rechargeables ou à piles à combustible, pouvant acheter ou vendre de l’électricité sur un réseau électrique intelligent, continental et interactif.
D’après lui, lorsque les 5 piliers se conjugent, "ils forment une plateforme technologique indivisible qui augmentera considérablement la productivité des entreprises et des industries du Nord-pas de calais, créera de nouvelles opportunités commerciales, développera la création d’emplois, et fera de cette région la référence de la Troisième révolution industrielle en France, au sein de l’Union européenne, et dans le monde. […] L’infrastructure de la Troisième révolution industrielle améliorera sans commune mesure la compétitivité commerciale de la région, la plaçant loin devant les autres régions qui travaillent encore sur le modèle désuet de la deuxième révolution industrielle."
La Vision de Rifkin transposée au Nord-pas de calais
A l’horizon 2050, le Nord-pas de calais aura réduit de 60% sa consommation énergétique et divisé par 4 ses émissions de gaz à effet de serre, en s’appuyant sur les grands leviers du schéma régional d’aménagement et de développement durable.
Cet objectif d’efficacité énergétique sera couplé à un investissement massif dans les énergies renouvelables ainsi qu’à un vaste programme de rénovation urbaine, baptisé “Zen-e-Ville”, qui transformera les bâtiments, les quartiers et les villes en microsites producteurs d’énergie, ouvrant de nouvelles perspectives aux entreprises de construction et de maintenance. la combinaison de ces 3 leviers permettra à la région de couvrir 100% de ses besoins énergétiques par la production d’énergies renouvelables (schéma ci-dessous), devenant l’une des premières au monde à basculer complètement dans l’ère post-carbone.
Les problématiques de stockage et de distribution, qui visent à compenser les intermittences de production et à gérer la décentralisation de ces énergies, deviendront des domaines d’excellence régionale impliquant les entreprises innovantes. la mise au point de solutions de stockage, basées sur l’hydrogène, la pression hydraulique ou l’air comprimé trouvera dans la région un terrain favorable et des réponses originales (pilier 3).
La CCI de région Nord de France et le conseil régional Nord-pas de calais seront les promoteurs des changements législatifs et les coordonnateurs des investissements publics à réaliser pour développer l’infrastructure des nouveaux réseaux de distribution intelligents, fondés sur l’internet de l’énergie (pilier 4).
Parallèlement, la conversion des véhicules aux énergies renouvelables et l’invention de modes de gestion intelligents des moyens de transport et des infrastructures de logistique révolutionneront les déplacements des personnes et des biens (pilier 5).
L’application des modèles de développement de l’économie circulaire et de l’économie de la fonctionnalité, dans tous les domaines d’action, permettre d’étendre les objectifs de renouvellement des ressources naturelles à l’ensemble des prélèvements réalisés sur la biosphère.lorsque ces dispositifs commenceront à se mettre en place, de manière coordonnée et simultanée, l’économie régionale enregistrera ses premiers gains en termes d’efficacité, de compétitivité et de création d’emploi (dès la deuxième année).
A terme, selon les économistes de la Troisième révolution industrielle, 200 milliards d’investissements auront été mobilisés par les investisseurs (publics et privés) ; les gains réalisés sur la facture énergétique auront largement récompensé les investissements ; le PIB annuel sera supérieur de 10 milliards d’euros à celui d’un scénario business as-usual ; 165 000 emplois nets auront été créés.
Pour Philippe Vasseur, président de la CCI de région nord de France, la 3ème révolution industrielle n’est pas un fleuve qui va déferler, mais un ensemble de ruisseaux amenés à grossir au fil des mois. "Dès 2014, nous aurons devant les yeux les premiers exemples de ce qu’elle va apporter concrètement en termes de débouchés, d’activités nouvelles, d’emplois,… l’innovation environnementale, énergétique et sociale ne doit plus être vécue comme une contrainte dans les entreprises. Beaucoup la vivent déjà comme une opportunité, une source de progrès ou de compétitivité. cette dynamique, conjuguée aux nouvelles technologies et à la capacité créative des entrepreneurs, nous laisse augurer de vraies avancées, découvertes, succès sociétaux et économiques."
Utopique ou pas ? Le Nord-Pas de Calais sera devenue une des régions les plus efficaces du monde, productives et durables en matière d’utilisation des ressources … et probablement une des premières exportatrices de “solutions Troisième révolution industrielle”.
Soyons clairs : Mr. Rifkin n’a rien énnoncé qui n’était pas déjà connu. L’exercice effectué dans le NPdC est essentiellement un exercice de mobilisation des acteurs politiques.
Arriver à mobiliser les acteurs politiques de ce niveau sur ces sujets en ce moment ça me semble déjà un beau résultat non ? Rien d’inconnu en effet, mais entre connaître et réaliser il y a un pas, ici franchi, qui est simplement essentiel. A signaler que de nombreuses autres régions ou ville dans le monde expérimentent déjà le concept de J Rifkin, par exemple la ville de San Antonio aux USA depuis 2003 et que la « vision » en a été officiellement adoptée par le parlement européen en 2007.
On s’en fout de leur usine à gaz , et leurs briques énergétiques , le gros problème qui reste est : Combien vont ils nous vendrent le kWh ?
Le concept de Rifkin est basé sur un modèle coopératif en réseau, totalement décentralisé. Dans ce modèle chacun, particulier, entreprise, collectivité, peut être producteur, consommateur ou les deux. Il n’y a pas un gros (EDF, GDF par exemple) qui s’occupe de tout et vous envoie la facture mais un réseau d’échange entre millions d’utilisateurs similaire à ce qui se passe déjà sur internet dans bien d’autres domaines. Donc la question du combien « ils » vont nous vendre le kWh n’est pas pertinente car tout bâtiment peut devenir producteur d’énergie et chaque foyer devient potentiellement vendeur de sa production.
Tout le monde (ou presque) a vocation à travailler (travail domestique inclut) sur un ordinateur à un moment ou à un autre de la journée. Mais chacun fait des choses fort différentes et dans la partie travail reste spécialisé. Lorsqu’une entreprise trouve son intérêt à décentraliser la production, elle le fait. Pas besoin de la forcer (ou l’inciter) à le faire, sauf si vous voulez la couler et sombrer dans le sous-développement.
Silicon Valley ? Cet article suscite étrangement peu de commentaires. Les lecteurs d’Enerzine sont ils myopes : à l’aise dans le détail, et pour débattre de chaque technologie, mais incapables de prendre du recul ? La vision de Rifkin est séduisante. Cette vision a ses fans sur le forum : ils y voient un moyen de lutter contre les monopoles (ou oligopoles), tout en refusant de voir que ce qui sous-tend cette vision, c’est un libéralisme forcené : la « stratégie du choc » pour reprendre le titre de Naomi Klein. Les écrits de Rifkin méritent d’être rapprochés du document de McKinsey, Disruptive technologies: advances that will transform life, business, and the global economy. On y retrouve bien sûr l’Internet des objets, la fabrication additive, le stockage d’énergie, les EnR, la mobilité intelligente électrique et partagée etc. Mais le document répond clairement à la question de Sansun : combien allons nous payer. Il faut lire la page 12. Chacun se fera un avis, mais la vision de McKinsey c’est que les matériaux, l’impression 3D, les EnR, le stockage, les véhicules, tout ça c’est du hardware. Ca ne vaut plus rien ! Ce qui créera la valeur, c’est le soft : le Cloud, l’internet des objets, et le knowledge management, le Big Data. Est-ce ien la même vision que celle, chère à Trimtab, de Buckminster Fuller ? Je ne crois pas. Quelqu’un peut-il croire sincèrement que le Pas-de-Calais va rivaliser avec la Silicon Valley ? Qui en Europe va battre en brèche Google ? Oui, ce modèle créera des emplois et du PIB… Aux USA ! Bien sûr, on peut argumenter que l’Open Source est une protection : nous serions tous libres de déployer des technologies librement accessibles. A chacun son microcontrolleur pour gérer batteries et panneaux… Ou pourquoi pas un Open-Fischer-Tropfsch ?! Mais en dehors de quelques « energy-geek » qui veut s’emmerder avec ça ? Mais surtout, on voit bien que ce qui est central dans cette vision, c’est ce qui se passe dans le réseau, et qui impose le standard de fait. Qui peut se mettre en position de tarifer ? PS: et je ne parle même pas de la NSA… hop j’écoute, je débranche la maison, je reroute la voiture.
J’ai le sentiment que ce projet est un doux rêve, complètement surréaliste et loin des dures réalités du monde réel. Il va défigurer la Région NPDP avec des milliers d’éoliennes qui vont supprimer les terres agricoles, augmenter le prix du kWh, détruire plus d’emplois qu’il ne va en créer et ruiner la Région… Les EnR, dans l’état actuel de la technologie, sont une très mauvaise solution. Voir: Le stockage de l’énergie électrique, pour les fortes puissances, ne paraît pas devoir être résolu avant longtemps… et je ne suis pas sûr qu’on y parvienne…
Un peu de cohérence serait hautement souhaitable. Si l’on veut limiter les émissions de CO2 (même si cela n’a aucune utilité et aucun impact sur Tglobale), et si l’on veut une production stable et fiable d’énergie électrique, sans intermittence, à prix du kWh compétitif, alors le nucléaire de quatrième génération, couplé à l’hydraulique et à quelques centrales à combustible fossile, est la meilleure solution. Il existe une technologie maîtrisée, qui fonctionne depuis nombre d’années (Phénix) : le surgénérateur, intéressant pour de petites centrales compte tenu du problème de contrôle du refroidissement avec du sodium liquide. Il existe une autre piste pour les futures générations de centrales nucléaires : les centrales à thorium, à l’étude au CEA (projet ASTRID). Ces deux types de centrales sont intéressants, car elles sont à flux rapide de neutrons, technique très maîtrisable, et leurs déchets, au bout de 300 ans, sont 10000 fois moins radioactifs que ceux des centrales actuelles. Donc, pourquoi favoriser des EnR qui n’ont que des défauts ? Si l’on voulait produire 100% de l’énergie électrique consommée, il faudrait implanter 100 000 éoliennes, soit 5 éoliennes par km2, et encore, compte tenu de l’intermittence et de la puissance fluctuante aléatoirement, il faudrait 300 000 éoliennes, soit près de 2 éoliennes par km2. Et là, plus aucun touriste en France !….
« Il existe une technologie maîtrisée, qui fonctionne depuis nombre d’années (Phénix) » Certes Phénix a bien fonctionné à partir de 1973 mais il a été arrété en 2009 : Il a produit plus de 24 TWh, ce qui est pas mal pour un réacteur expérimental. La suite logique serait ASTRID aujourd’hui.