Le Parlement européen rejette la “3ème voie”

Le Parlement européen a rejeté mardi la proposition dite de "Troisième voie" qui proposait une alternative à la séparation patrimoniale des activités de production et de distribution d’électricité en Europe.

Les députés de la commission de l’industrie ont rejeté à une courte majorité (26 pour,  22 contre) l’amendement issu de la proposition de 8 pays européens opposés à la séparation patrimoniale.

La "troisième option" soutenue par ces pays membres, dont la France et l’Allemagne, permettrait de poursuivre la libéralisation du marché de l’électricité "sans avoir recours à la dissociation totale des activités". Selon la proposition, les Etats membres auraient le choix entre un découplage total tel que préconisé par la Commission, le recours à un opérateur indépendant pour la gestion des éléments d’actifs de distribution, ou une dissociation "légale" en ne séparant que les intérêts par des règles sur les actifs, l’équipement, le personnel, l’identité et le contrôle de conformité.

En rejetant la proposition, les députés ont donc opté pour une séparation patrimoniale totale, qui empêcherait le contrôle direct ou indirect à la fois de la production et du transport de l’électricité, conformément à la position de la Commission européenne.

Le texte fait l’objet d’un processus de co-décision avec les Etats-membres au cours duquel les 8 pays disposent d’une minorité de blocage. Il sera examiné en séance plénière du 16 au 19 juin.

Protection des consommateurs

Par ailleurs, les députés ont ajouté à la proposition certaines mesures de protection des consommateurs :

• le droit à un dédommagement si la qualité du service ne satisfait à certains critères (comme, par exemple, des factures inexactes ou en retard);
• l’accès à l’information concernant leurs droits via leurs factures et le site Internet de la compagnie d’électricité;
• l’accès à l’information relative aux procédures à suivre en cas de litige;
• le droit de changer de fournisseur dans un délai de deux semaines;
• le droit d’être informés au moins trimestriellement de leur consommation réelle et de son coût;
• l’accès à des compteurs intelligents dans les dix ans suivant l’entrée en vigueur de la directive;
• le droit de se procurer leur électricité auprès du fournisseur de leur choix indépendamment de l’État dans lequel il est agréé;
• l’accès à l’information concernant l’incidence sur l’environnement (émissions de CO2 et déchets radioactifs) résultant de la production d’électricité par le fournisseur et;
• le droit à une protection face aux abus de marché: à cette fin, les autorités nationales doivent pouvoir imposer "des plafonds tarifaires sur des marchés non concurrentiels pour une période définie et limitée".

Afin de protéger les consommateurs vulnérables, les députés souhaitent également "introduire des formules tarifaires selon lesquelles les prix augmentent pour des niveaux de consommation plus élevés", et ce afin de récompenser une consommation efficace.

Un autre amendement stipule que lorsque les compagnies d’électricité  répercutent sur les clients les coûts des certificats du système d’échange de quotas d’émissions (…), "les États membres peuvent exiger le remboursement de ces sociétés par le biais d’impôts supplémentaires".

Enfin, les députés entendent également permettre aux autorités nationales de "donner la priorité aux installations de production qui utilisent des sources d’énergie renouvelables, voire des déchets, ou qui produisent de la chaleur et de l’électricité combinées", à l’exception des cas où la sécurité et la fiabilité du réseau est compromis.

Les Etats membres peuvent alors "exiger qu’un minimum de 2% de tous revenus provenant des consommateurs nationaux d’électricité soient consacrés à des objectifs visant à améliorer l’efficacité énergétique".

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Dan

Sur des sujets hyperstratégiques comme l’énergie, c’est un “collège” de 48 personnes qui décident pour 450 millions ! sachant qu’il y a tout de même 750 députés. Bien que conscient de la nécessité de l’Europe, je m’interroge de plus en plus sur cette Europe qui a pour seul crédo la concurrence, qui veut l’imposer au forceps et tous azimuts, même où cela n’apportera rien de meilleur, puis qui reconnaît la nécessité de protéger le consommateur afin d’éviter la paupérisation par l’augmentation des prix de l’énergie (voir les rapports de la commission). Voir le site suivant : Pour ce qui est de la protection des consommateurs, je vois peu de choses essentielles, sauf le dernier point “le droit à une protection face aux abus de marché”. Il se trouve qu’en France nous avons été protégés de ces abus depuis 1946 et que nous ne le sommes plus !! Pour ceux qui trouvent que la commission va trop loin, il ne faut pas oublier qu’il est toujours possible de s’exprimer voire de sanctionner une éventuelle dérive : il y a des élections européennes en 2009. Il serait bon et urgent que l’on remettent les 450 millions d’européens au centre des préoccupations du parlement européen et que la concurrence reste un outil comme un autre que l’on utilise à bon escient !

maxime

Il est ahurissant de voir que se projet de dérégulation n’inquiète personne !?!Comme vous le dites Dan, il s’agit d’un enjeux stratégique pour l’Europe et chacun de ses états membres. Au-delà du prix de l’énergie qui pèsera très très lourd avec ce projet sur le prix de nos factures et donc sur notre compétitivité économique, c’est aussi la capacité de gestion, d’investissement et donc de pérennisation de nos réseaux de distribution qui me fait peur. Il est fortement à craindre que l’on aboutisse aux mêmes conséquences qu’en Grande Bretagne avec la séparation du réseau de voies ferrées. Les citoyens paieront trois fois:la première pour l’investissement de basela deuxième pour les actionnaires des futures entités ayant racheté les réseaux de distribution,la troisième pour faire marche arrière et payer les pots cassés.Une nouvelle fois, le parlement européen démontre son déficit démocratique et son dogmatisme libéral. Tandis que beaucoup (pas les plus gros bien sûr) d’acteurs économiques plaident pour la création d’un ensemble européen fort (plusieurs pays-un ensemble cohérent), la Commission Européenne continue d’aller en sens inverse en faisant ce que même les patrons de l’OMC n’auraient pas oser rêver dans leurs rêves les plus fous !Je dis bravo et pour aller dans leur sens, je propose  d’interdire toute participation et action des Etats membres dans les secteurs stratégiques de la défense nationale, de la santé, de l’éducation et de l’énergie. En termes policés je dirai que nous allons au devant de forts ennuis en suivant cette voie.       

Dan

Je suis un peu surpris par le peu de réaction que suscite cet article qui traite de l’avenir énergétique de l’Europe et de ses 460 millions d’habitants (il a été lu 738 fois). En comparaison, des articles comme “fini le facteur en vélo” font dix fois plus ! Ne resterait-il plus que des consommateurs… où sont les citoyens ? Est-il plus urgent de discuter des lampadaires photovoltaïques plutôt que du paysage énergétique des trente prochaines années ?

Francois

Hé oui, l’anedocte nous séduit plus que les enjeux majeurs à 10, 20 ou 30 ans. C’est comme cela que les industriels français qui avaient fait du lobbying pour que le marché de l’électricité soit déréglementé – car à court terme, ils étaient sûr du gain- sont allés 10 ans plus tard pleurer auprès du gouvernement français (libéral…) pour obtenir un tarif public de retour ! Et là, je parle de professionnels leader pour certains mondiaux dans leur secteur, alors les particuliers comme nous, le fait divers du JT (banderole anti-Ch’ti) nous émeut bien + que la séparation patrimoniale du gestionnaire de réseau !