L’électronique comestible : un marché potentiel de plusieurs milliards ?

L'électronique comestible : un marché potentiel de plusieurs milliards ?

La fusion entre la technologie de pointe et le domaine médical a toujours été source de curiosité et de stimulation. Aujourd’hui, l’Institut italien de technologie (IIT) de Milan ouvre une nouvelle voie avec un développement dans le monde de l’électronique comestible.

Le laboratoire Printed and Molecular Electronics (Électronique imprimée et moléculaire) dirigé par Mario Caironi à l’IIT de Milan a élaboré un prototype de circuit électronique basé sur de l’or et du chitosan, matière dérivée de la carapace des crustacés. Ce prototype, présenté dans la revue Nanoscale, atteste pour la première fois de la faisabilité des circuits intégrant des matériaux comestibles. Il ouvre la porte à des applications variées, allant de la diagnostic médical au contrôle qualité alimentaire.

L’électronique comestible représente un secteur en expansion, avec une mission claire : concevoir des dispositifs qui, une fois ingérés, ne nuisent pas à l’organisme. Les utilisations potentielles vont de la détection et du traitement des maladies au suivi de la qualité alimentaire.

La principale interrogation demeure : comment construire des circuits comestibles efficaces sans porter atteinte à l’intégrité du corps ?

Fabrication innovante et ingrédients clés

Le circuit est réalisé grâce à une technique d’impression par jet d’encre, similaire à celle employée dans les imprimantes domestiques. Plutôt que d’encre conventionnelle, une solution d’or liquide est utilisée. Cette méthode permet la conception de circuits sophistiqués, se révélant à la fois plus rapide et moins coûteuse que d’autres procédés, tels que la photolithographie.

Outre l’or, qui est biocompatible, le chitosan, un matériau dérivé des carapaces des crustacés, joue un rôle essentiel. Un fin film de chitosan est capable d’absorber l’eau, agissant ainsi comme un électrolyte pour le circuit, et permettant d’en réguler l’activité. Une fois ingéré, le chitosan absorbe l’eau corporelle, assurant le bon fonctionnement du dispositif.

Fig. 1 Caractérisation structurelle, morphologique et électrique d’électrodes d’or imprimées par jet d’encre sur différents substrats conventionnels et comestibles. (a)-(d) Électrodes d’or interdigitées imprimées par jet d’encre sur différents substrats : PEN, verre, éthylcellulose comestible et papier de tatouage. (g) et (h) Photographies numériques d’électrodes en or transférées sur différentes surfaces : (en haut) une pêche, une pomme et (en bas) le bout d’un doigt. (e) AFM d’électrodes en or imprimées par jet d’encre sur PEN : topographie de la zone entre les deux doigts conducteurs d’électrodes interdigitées avec une longueur de canal de 10 μm ; la surface de l’image est de 20 × 20 μm2. (f) Image topographique AFM de la surface supérieure de l’électrode en or. La surface de l’image est de 5 × 5 μm2. (i) Dépendance de la résistance électrique des lignes d’or imprimées au jet d’encre dans des conditions de séchage. Les tracés sont présentés pour des lignes d’une longueur de 7,5 mm. Chaque point correspond à une valeur moyenne mesurée sur 7 échantillons.

Des applications à portée de main

“Ces dispositifs pourraient être utilisés en diagnostic pour créer des pilules comestibles et digestibles capables d’effectuer une série d’analyses le long de l’intestin, voire de délivrer des médicaments”, explique Alessandro Luzio, chercheur au sein du laboratoire Printed and Molecular Electronics. Il évoque également leur utilisation dans le domaine alimentaire pour contrôler la qualité des produits ou détecter des contrefaçons.

“Ce circuit est une étape majeure dans l’électronique comestible, tout comme l’était notre première batterie rechargeable et comestible”, souligne Mario Caironi. Il ajoute que l’équipe se concentre désormais sur la communication entre dispositifs, essentielle pour relayer en temps réel les informations recueillies à l’intérieur du corps.

Ce projet bénéficie du soutien financier du European Research Council (ERC) dans le cadre du programme européen d’innovation “ELFO“. Il est également intégré au programme de jumelage “GREENELIT” et s’appuie sur une collaboration entre l’Istituto Italiano di Tecnologia, l’Université degli studi Milano-Bicocca et l’Université de Heidelberg.

En synthèse

La technologie de l’électronique comestible, en constante évolution, promet de transformer notre approche de la médecine et de la qualité alimentaire. Les recherches de l’IIT de Milan marquent un pas significatif dans cette direction, ouvrant la voie à une multitude d’applications potentielles pour le bien-être et la santé.

Pour une meilleure compréhension

Qu’est-ce que l’électronique comestible ?

C’est un domaine technologique qui se concentre sur la création de dispositifs électroniques pouvant être ingérés sans nuire à la santé.

Comment fonctionne le circuit comestible de l’IIT ?

Il est conçu à partir d’or et de chitosane. L’or sert de conducteur, tandis que le chitosane, extrait de carapaces de crustacés, fonctionne comme un électrolyte.

Quelles sont les applications potentielles de cette technologie ?

Elles s’étendent de la médecine à l’alimentation, permettant notamment de surveiller la qualité des produits alimentaires et d’effectuer des diagnostics internes.

Qui sont les principaux acteurs derrière cette innovation ?

L’Istituto Italiano di Tecnologia, en collaboration avec l’Università degli studi Milano-Bicocca et l’Université de Heidelberg, a piloté ce projet.

Comment est financée cette recherche ?

Elle a bénéficié du soutien du European Research Council et s’inscrit dans le cadre des programmes ELFO et GREENELIT.

La sécurité a-t-elle été prise en compte lors de la conception de ces circuits ?

Absolument. Les matériaux utilisés, notamment l’or et le chitosane, sont considérés comme inoffensifs pour l’organisme humain.

Y a-t-il d’autres avancées en préparation dans ce domaine ?

Oui. Mario Caironi mentionne déjà des travaux sur la communication entre dispositifs, essentielle pour transmettre des données en temps réel.

Les circuits comestibles sont-ils déjà sur le marché ?

Non, il s’agit actuellement d’un prototype. Cependant, vu son potentiel, son adoption à plus grande échelle est envisageable.

Article : https://doi.org/10.1039/D3NR01051A 

Crédit image : IIT

[ Rédaction ]

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