Les abysses marins dévoilent un nouvel espoir contre la pollution plastique

Les abysses marins dévoilent un nouvel espoir contre la pollution plastique

La pollution plastique affecte progressivement la santé des côtes et des océans. Un problème bien connu est celui des bouteilles en plastique fabriquées à partir de polyéthylène téréphtalate, ou PET.

Une nouvelle étude impliquant des scientifiques du groupe de recherche de la Professeure Ruth Schmitz-Streit à l’Université de Kiel a montré pour la première fois, à l’aide de micro-organismes provenant des profondeurs marines, que des polymères tels que le PET sont continuellement dégradés par une enzyme.

Cette découverte pourrait avoir des implications importantes pour la lutte contre la pollution plastique et ouvrir la voie à de nouvelles applications biotechnologiques.

La découverte de l’enzyme PET46

L’équipe de recherche a identifié et décrit biochimiquement l’enzyme dégradant le PET, nommée PET46, provenant d’un micro-organisme des profondeurs marines non cultivé pour la première fois. Cette enzyme présente de nombreuses propriétés inhabituelles et élargit la diversité des enzymes actives sur le PET. Contrairement aux enzymes dégradant le PET précédemment découvertes, PET46 est capable de dégrader à la fois des molécules de PET à chaîne très longue, appelées polymères, et des molécules de PET à chaîne courte, appelées oligomères, ce qui signifie que la dégradation peut être continue.

Les chercheurs décrivent un «couvercle» inhabituel de 45 acides aminés au-dessus du centre actif de l’enzyme comme étant crucial pour la liaison. Dans d’autres enzymes dégradant le PET, des acides aminés aromatiques proches du site actif sont typiques.

The structure of PET46 is similar to that of known enzymes such as IsPETase and LCC, but has unique features. One example is the unusual ‘lid’, shown in light green. Crédit :  Perez-Garcia, P., Chow, J., Costanzi, E. et al. (2023)

Applications biotechnologiques en devenir

Au niveau moléculaire, PET46 est très similaire à une autre enzyme, l’estérase d’acide férulique. Cette dernière dégrade le polymère naturel lignine dans les parois cellulaires des plantes en décomposant les polymères de lignine pour libérer des sucres à partir des parties ligneuses des plantes. La lignine et le PET présentent de nombreuses similitudes structurelles, de sorte que les enzymes dégradant le PET trouvées dans la nature pourraient être importantes pour le compostage du bois dans les sols forestiers, par exemple.

Les propriétés biochimiques de PET46 en font une enzyme très intéressante à la fois pour les plastiques marins et terrestres et pour la biotechnologie. Par rapport aux enzymes dégradant le PET les mieux caractérisées provenant de bactéries et de plantes compostées, PET46 est plus efficace à 70 degrés Celsius que ces enzymes de référence à leurs températures optimales respectives.

Le professeur Ruth Schmitz-Streit et les scientifiques de son groupe de recherche à l’université de Kiel ont participé à cette nouvelle étude, qui décrit pour la première fois l’enzyme PET46 dégradant le PET à partir d’un micro-organisme des profondeurs non cultivé. © Stefan Kolbe

En synthèse

La découverte de l’enzyme PET46, capable de dégrader continuellement les polymères tels que le PET, ouvre de nouvelles perspectives pour lutter contre la pollution plastique et développer des applications biotechnologiques. Cette enzyme présente des propriétés inhabituelles et pourrait jouer un rôle important dans le compostage du bois et la dégradation des plastiques marins et terrestres.

Pour une meilleure compréhension

Qu’est-ce que le PET ?

Le PET, ou polyéthylène téréphtalate, est un type de plastique couramment utilisé pour fabriquer des bouteilles et d’autres emballages. Il est léger, résistant et facile à recycler, mais il contribue également à la pollution plastique dans les océans et sur terre.

Qu’est-ce que l’enzyme PET46 ?

PET46 est une enzyme découverte dans les profondeurs marines qui est capable de dégrader continuellement les polymères tels que le PET. Elle présente des propriétés inhabituelles et pourrait jouer un rôle important dans la dégradation des plastiques marins et terrestres.

Comment l’enzyme PET46 a-t-elle été découverte ?

L’enzyme PET46 a été identifiée et décrite biochimiquement pour la première fois à partir d’un micro-organisme des profondeurs marines non cultivé. Les chercheurs ont utilisé une approche métagénomique pour identifier le gène responsable de la production de l’enzyme, puis l’ont synthétisé et étudié biochimiquement et structuralement.

Quelles sont les applications potentielles de l’enzyme PET46 ?

Les propriétés biochimiques de PET46 en font une enzyme intéressante pour la dégradation des plastiques marins et terrestres, ainsi que pour la biotechnologie. Elle pourrait être utilisée pour développer de nouvelles méthodes de lutte contre la pollution plastique et pour le compostage du bois dans les sols forestiers.

Quelle est l’importance de cette découverte ?

La découverte de l’enzyme PET46 élargit notre compréhension des enzymes dégradant le PET et pourrait ouvrir la voie à de nouvelles applications biotechnologiques pour lutter contre la pollution plastique. Elle souligne également l’importance des micro-organismes des profondeurs marines dans la dégradation des déchets plastiques dans les océans.

Les recherches ont été menées dans le cadre du projet PLASTISEA, coordonné par le professeur Ute Hentschel Humeida du Centre GEOMAR Helmholtz pour la recherche océanique à Kiel. Le premier auteur, le Dr Jennifer Chow de l’université de Hambourg, et le premier auteur, le Dr Pablo Pérez-Garcia, qui travaille comme assistant de recherche dans le groupe de Schmitz-Streit, ont contribué à parts égales à l’étude. Le projet PLASTISEA est financé par le ministère fédéral allemand de l’éducation et de la recherche (BMBF) dans le cadre de l’activité “Nouveaux processus biotechnologiques basés sur les ressources marines – BioProMare” 2020-2023 (code de financement : 031B0867A).

Perez-Garcia, P., Chow, J., Costanzi, E., (…), Schmitz-Streit, R., and Streit, W. R. An archaeal lid-containing feruloyl esterase degrades polyethylene terephthalate. Commun Chem 6, 193 (2023). https://doi.org/10.1038/s42004-023-00998-z

[ Rédaction ]

Articles connexes