L’hydrogène vert se positionne comme une solution potentielle pour la décarbonation des transports. Une étude menée par l’Université du Michigan apporte un éclairage nouveau sur l’efficacité énergétique de cette technologie, suggérant une utilisation ciblée dans les secteurs du transport lourd routier, ferroviaire, aérien et maritime.
L’hydrogène vert est produit par électrolyse de l’eau à l’aide d’énergies renouvelables. Son utilisation, directe ou sous forme de carburants synthétiques (e-carburants), vise à réduire les émissions de CO2 dans le secteur des transports. Ce dernier est responsable d’environ 22% des émissions mondiales et 37% des émissions américaines de dioxyde de carbone issues des combustibles fossiles.
La décarbonation du transport, tant pour les passagers que pour le fret, s’avère cruciale dans la lutte contre le changement climatique. Les chercheurs de l’Université du Michigan ont calculé l’efficacité énergétique totale de l’utilisation de l’hydrogène vert, directement ou indirectement via les e-carburants, pour alimenter avions, trains, automobiles et navires.
Comparaison avec les alternatives électriques
L’étude a pris en compte l’utilisation directe de l’hydrogène dans les moteurs ou les piles à combustible, ainsi que son utilisation indirecte sous forme d’e-carburants tels que l’e-essence, l’e-diesel, l’e-kérosène, l’e-méthanol et l’e-ammoniac. La comparaison avec les options électriques à batterie a révélé que les inefficacités du système lors de la production, du stockage, du transport, de la distribution et de l’utilisation de l’hydrogène ou des e-carburants entraînent une perte d’énergie d’environ 80% à 90% de l’apport électrique initial.
En revanche, le transport électrique s’est avéré trois à huit fois plus efficace que l’utilisation directe de l’hydrogène ou des e-carburants. Les résultats de l’étude seront publiés en ligne le 7 août et dans la version imprimée du 21 août dans la revue Joule.
Une utilisation stratégique de l’hydrogène vert
Greg Keoleian, co-auteur principal de l’article et co-directeur de l’initiative MI Hydrogen de l’Université du Michigan, souligne l’urgence de décarboner les transports face aux impacts croissants du changement climatique. L’étude examine le rôle potentiel de l’hydrogène en analysant les aspects énergétiques, tout en prenant en compte d’autres facteurs tels que le coût, le temps de ravitaillement, l’autonomie et la sécurité.
Tim Wallington, premier auteur du rapport, affirme : «Les sources d’électricité renouvelable aux États-Unis sont insuffisantes pour soutenir la production d’hydrogène destinée aux véhicules légers. L’hydrogène vert devrait être utilisé de manière stratégique dans le transport routier lourd, ferroviaire, aérien et maritime, où les alternatives électriques sont limitées par la charge et l’autonomie.»
L’hydrogène pour le transport lourd
Les batteries s’avèrent inadaptées pour les véhicules de transport lourd devant parcourir de longues distances. Leur poids et leur taille excessifs les rendent peu pratiques pour des vols de plus de 320 kilomètres, pour traverser un océan en cargo ou pour alimenter un train traversant un continent.
Dans ces applications de transport lourd, l’hydrogène ou les e-carburants apparaissent comme des options plus pertinentes. L’utilisation directe de l’hydrogène nécessiterait des changements massifs dans l’infrastructure de ravitaillement. Les e-carburants à base d’hydrogène éviteraient ces changements, mais s’avèrent généralement 20% à 50% moins efficaces énergétiquement que l’utilisation directe de l’hydrogène vert.
Analyse de l’efficacité énergétique
Pour caractériser l’efficacité du système et visualiser les flux d’énergie pour chaque voie de l’hydrogène, l’équipe de recherche a développé un ensemble de 25 diagrammes de Sankey. Ces diagrammes partent des apports d’électricité renouvelable et suivent les flux d’énergie à travers la production et la distribution de l’hydrogène jusqu’à son utilisation finale dans une pile à combustible, un moteur à combustion interne ou un turboréacteur dans le cas des avions.
Les chercheurs ont également mesuré l’intensité énergétique de chaque voie de l’hydrogène, c’est-à-dire la quantité d’énergie renouvelable nécessaire pour déplacer du fret en tonnes-miles ou des personnes en passagers-miles pour tous les principaux modes de transport.
Greg Keoleian conclut : «L’électricité renouvelable est une ressource rare, nous devons donc l’utiliser judicieusement. Du point de vue du transport durable, il faudra privilégier les modes de transport les plus efficaces et les moins énergivores.»
Illustration : Joule
Green hydrogen pathways, energy efficiencies and intensities for ground, air, and marine transport (DOI: 10.1016/j.joule.2024.07.012)