La gestion des déchets radioactifs est l’un des principaux défis liés à l’utilisation de l’énergie nucléaire. En particulier, l’iode radioactif présente de graves risques pour l’environnement et la santé en raison de sa longue demi-vie (15,7 millions d’années dans le cas de l’I-129), de sa grande mobilité et de sa toxicité pour les organismes vivants. Une équipe de recherche coréenne a réussi à utiliser l’intelligence artificielle pour découvrir un nouveau matériau capable d’éliminer l’iode dans le cadre de la dépollution nucléaire. L’équipe prévoit de poursuivre la commercialisation grâce à diverses collaborations entre l’industrie et le monde universitaire, allant des poudres adsorbant l’iode aux filtres de traitement des eaux contaminées.
Le KAIST (président Kwang Hyung Lee) a annoncé le 2 juillet que l’équipe de recherche du professeur Ho Jin Ryu du département d’ingénierie nucléaire et quantique, en collaboration avec le Dr Juhwan Noh du Centre de recherche en chimie numérique de l’Institut coréen de recherche en technologie chimique (KRICT, président Young Kook Lee), qui opère sous l’égide du Conseil national de la recherche scientifique et technologique (NST, président Youngsik Kim), a mis au point une technique utilisant l’IA pour découvrir de nouveaux matériaux qui éliminent efficacement les contaminants radioactifs à base d’iode.
Des études récentes montrent que l’iode radioactif existe principalement dans les environnements aqueux sous forme d’iodate (IO₃⁻). Cependant, les adsorbants à base d’argent existants ont une faible force d’adsorption chimique pour l’iodate, ce qui les rend inefficaces. Il est donc impératif de développer de nouveaux matériaux adsorbants capables d’éliminer efficacement l’iodate.
L’équipe du professeur Ho Jin Ryu a utilisé une stratégie expérimentale basée sur l’apprentissage automatique pour identifier les adsorbants d’iodate optimaux parmi les composés appelés hydroxydes doubles en couches (LDH), qui contiennent divers éléments métalliques.
Le LDH multimétal développé dans cette étude – Cu₃(CrFeAl), à base de cuivre, de chrome, de fer et d’aluminium – a montré des performances d’adsorption exceptionnelles, éliminant plus de 90 % de l’iodate. Cette réussite a été rendue possible grâce à l’exploration efficace d’un vaste espace de composition à l’aide de l’apprentissage actif basé sur l’IA, ce qui aurait été difficile à réaliser avec des expériences conventionnelles par essais et erreurs.
L’équipe de recherche s’est concentrée sur le fait que les LDH, comme les matériaux à haute entropie, peuvent incorporer une large gamme de compositions métalliques et possèdent des structures favorables à l’adsorption des anions. Cependant, en raison du nombre écrasant de combinaisons métalliques possibles dans les LDH multimétalliques, il était pratiquement impossible d’identifier la composition optimale à l’aide des méthodes expérimentales traditionnelles.
Pour surmonter cette difficulté, l’équipe a eu recours à l’IA (apprentissage automatique). À partir des données expérimentales issues de 24 compositions LDH binaires et 96 compositions LDH ternaires, elle a élargi sa recherche pour inclure des candidats quaternaires et quinquaires. Elle a ainsi pu découvrir le matériau optimal pour l’élimination de l’iodate en testant seulement 16 % de l’ensemble des matériaux candidats.

Le professeur Ho Jin Ryu a déclaré : « Cette étude montre le potentiel de l’intelligence artificielle pour identifier efficacement des matériaux de décontamination radioactive parmi un vaste ensemble de nouveaux matériaux candidats, ce qui devrait accélérer la recherche pour le développement de nouveaux matériaux destinés au nettoyage de l’environnement nucléaire. »
L’équipe de recherche a déposé une demande de brevet national pour la technologie de poudre développée et procède actuellement à une demande de brevet international. Elle prévoit d’améliorer les performances du matériau dans diverses conditions et de poursuivre sa commercialisation grâce à une coopération entre l’industrie et le monde universitaire dans le développement de filtres pour le traitement des eaux contaminées.
Le Dr Sujeong Lee, diplômé du département des sciences et de l’ingénierie des matériaux du KAIST, et le Dr Juhwan Noh, du centre de recherche en chimie numérique du KRICT, ont participé à cette étude en tant que coauteurs principaux.
Article : « Discovery of multi-metal-layered double hydroxides for decontamination of iodate by machine learning-assisted experiments
» – (Découverte d’hydroxydes doubles multicouches pour la décontamination de l’iodate par des expériences assistées par apprentissage automatique) – DOI : 10.1016/j.jhazmat.2025.138735