L’UE préoccupée par la sécurité des activités pétrolières en mer

"La probabilité que survienne un accident grave sur une installation pétrolière ou gazière en mer dans les eaux européennes demeure à un niveau inacceptable" selon la Commission Européenne.

Pour elle, un régime strict en matière de sécurité doit permettre de ramener ce risque au minimum absolu. Les dommages occasionnés à l’environnement et aux économies littorales peuvent être nettement réduits si un plan d’intervention d’urgence efficace est mis en place d’avance.

En conséquence, la Commission européenne va proposer un nouveau texte législatif visant à assurer que, partout dans l’UE, les activités de production pétrolières et gazières en mer respectent les normes les plus élevées au monde en matière de sécurité, de santé et d’environnement.

« Aujourd’hui, la production européenne de pétrole et de gaz se fait principalement en mer, souvent dans des conditions géographiques et géologiques difficiles. Étant donné notre demande croissante d’énergie, nous aurons besoins de tout le pétrole et de tout le gaz disponibles dans notre sous-sol marin. Cependant, nous devons empêcher des accidents comme celui de la plateforme Deepwater Horizon dans le golfe du Mexique. Nous devons absolument assurer le respect des bonnes pratiques de l’industrie pour toutes les opérations en mer. Notre proposition d’aujourd’hui constitue un pas en avant crucial vers des activités en mer plus sûres, ce qui profitera à nos populations et à notre environnement » a déclaré M. Günther Oettinger, membre de la Commission chargé de l’énergie.

« Nous avons tiré les leçons de l’accident de Deepwater Horizon survenu l’année dernière. Le règlement que nous proposons aujourd’hui nous aidera à l’avenir à éviter de telles crises, dans toutes les eaux marines qui sont sous la juridiction des États membres de l’UE. Cette amélioration de la sécurité est une bonne nouvelle pour l’environnement, mais aussi pour les entreprises, qui pourront mener leurs opérations dans un cadre prévisible. Notre expérience en matière d’accidents montre bien qu’il vaut mieux prévenir que guérir » pour M. Janez Potocnik, membre de la Commission chargé de l’environnement.

Le nouveau règlement établit des règles claires qui concernent l’ensemble du cycle de vie des activités d’exploration et de production de pétrole ou de gaz, de la conception d’une installation à son démantèlement. Sous le contrôle des autorités de réglementation nationales, les entreprises européennes devront évaluer régulièrement les normes de sécurité applicables aux opérations en mer, et les améliorer. Cette nouvelle approche devrait permettre d’améliorer sans cesse l’évaluation européenne des risques, par la prise en considération des nouvelles technologies, des nouveaux savoir-faire et des nouveaux risques.

En Europe, du pétrole et du gaz sont extraits du sous-sol marin depuis les années 1970. Aujourd’hui, plus de 90 % du pétrole et plus de 60 % du gaz produits dans l’UE et en Norvège proviennent d’opérations en mer. Plus de 1 000 installations pétrolières et gazières en mer sont en activité dans les eaux européennes. Si la plus grande partie de la production vient de la région de la mer du Nord, principalement du Royaume-Uni et de la Norvège pour le pétrole, ce secteur suscite un intérêt croissant dans les territoires marins de l’UE, et des concessions pour des activités pétrolières et gazières en mer ont été octroyées par 13 États membres (Royaume-Uni, Pays-Bas, Danemark, Allemagne, Irlande, Italie, Espagne, Grèce, Roumanie, Bulgarie, Pologne, Malte et Chypre).

Les entreprises qui opèrent en mer sont soumises à des normes environnementales, sanitaires et de sécurité qui diffèrent d’un État membre à l’autre.

À ce jour, certains aspects relatifs à l’industrie pétrolière et gazière en mer ne sont pas couverts par la législation de l’UE et les législations nationales diffèrent fortement. Malgré les mesures prises par certains États membres pour réformer leurs systèmes après les catastrophes survenues en mer du Nord dans les années 1980, un risque non négligeable d’accident majeur persiste dans l’UE. Au moins 14 catastrophes en mer (explosion de puits, perte totale d’une plateforme de production, etc.) ont eu lieu dans le monde ces trente dernières années, dont cinq ces dix dernières années.

Un accident majeur peut avoir des conséquences extrêmes: pertes humaines, graves dommages environnementaux et dommages collatéraux pour les moyens de subsistance côtiers et marins. Sur le plan financier, un événement de l’ampleur de la catastrophe qui s’est produite dans le golfe du Mexique peut, comme on l’a vu, causer des dommages à hauteur de 30 milliards d’euros.

Des obligations visant la prévention et l’intervention efficace en cas d’accident majeur sont instaurées dans ce cadre:

Concessions – Les autorités compétentes des États membres devront s’assurer qu’elles accordent des concessions pour explorer et produire du pétrole et du gaz dans les eaux de l’UE uniquement aux exploitants qui disposent des capacités techniques et financières nécessaires pour contrôler la sécurité de leurs activités en mer et veiller à la protection de l’environnement;

Vérificateurs indépendants
– Les solutions techniques présentées par l’exploitant et qui sont critiques pour la sécurité de l’installation doivent être vérifiées par un tiers indépendant avant la mise en exploitation de l’installation, puis de façon périodique;

Plans d’urgence obligatoires ex ante
– Avant le début de l’exploration ou de la production, les entreprises devront élaborer, pour leur installation en mer, un rapport sur les dangers majeurs qui contiendra une évaluation des risques et un plan d’intervention d’urgence. Ces rapports seront soumis au feu vert des autorités nationales;

Inspections
– Les autorités nationales compétentes indépendantes responsables de la sécurité des installations vérifieront les dispositions en matière de sécurité, de protection de l’environnement et de préparation aux situations d’urgence appliquées aux plateformes et aux opérations qui y sont menées. Si un exploitant ne respecte pas les normes minimales, l’autorité compétente l’y contraindra ou lui imposera des sanctions; en dernier recours, l’exploitant en infraction devra mettre fin à ses opérations de forage ou de production.

Transparence
– Des informations comparables seront mises à la disposition de la population; elles concerneront les niveaux de performance des entreprises ainsi que les activités des autorités nationales compétentes. Elles seront publiées sur les sites web des parties concernées;

Intervention d’urgence – Les entreprises prépareront des plans d’intervention d’urgence sur la base de l’évaluation des risques réalisée pour leurs plateformes; elles s’assureront de disposer des ressources nécessaires pour mettre ces plans en œuvre le cas échéant. Par ailleurs, les États membres tiendront pleinement compte de ces plans lorsqu’ils élaboreront des plans d’urgence nationaux. Les plans seront testés périodiquement par l’industrie et les autorités nationales;

Responsabilité
– Les compagnies pétrolières et gazières seront pleinement responsables des dommages environnementaux occasionnés aux espèces marines et aux habitats naturels protégés. Pour les dommages causés aux eaux, la zone géographique concernée sera étendue pour couvrir toutes les eaux marines de l’UE, y compris les zones économiques exclusives (jusqu’à environ 370 km de la côte) et les parties du plateau continental qui sont sous la juridiction d’un État membre côtier. Pour les dommages causés aux eaux, le cadre législatif actuel de l’UE limite la responsabilité environnementale à la mer territoriale (environ 22 km depuis la côte);

Niveau international
– La Commission collaborera avec ses partenaires au niveau international pour promouvoir la mise en œuvre des normes de sécurité les plus strictes dans le monde entier;

Groupe des autorités offshore de l’UE – Les inspecteurs offshore des États membres travailleront ensemble pour assurer le partage des bonnes pratiques et contribuer à l’élaboration et à l’amélioration des normes de sécurité.

Parallèlement à cette proposition législative, la Commission propose que l’UE adhère au protocole «offshore» de la convention de Barcelone, qui vise la protection de la mer Méditerranée contre la pollution résultant des activités d’exploration et d’exploitation.

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jl06

SI la Commission Européenne considère que le risque ( = haute probabilité x conséquences graves) lié aux installations pétrolières ou gazières en mer dans les eaux européennes “demeure à un niveau inacceptable”, on doit se demander pourquoi les opérations en question ne sont pas suspendues. Curieux, non? Quant au risque acceptable, il serait utile d’en connaître la définition dans ce contexte, ainsi que l’écart qui rend le risque déjà inacceptable aux yeux de la Commission. La Mer du Nord posera un défi aux régulateurs. Voilà plus de quarante ans maintenant que des puits y ont été forés, des plateformes de diverses générations implantées, des pipelines installés, des champs développés et redéveloppés. A l’époque, la Mer du Nord était la frontière ultime de l’industrie: eau très profonde (10 fois moins qu’au site de la catastrophe du Deepwater Horizon en 2010), des vagues gigantesques, loin des côtes… Il a fallu des investissements colossaux, uniquement rentabilisés par la montée vertigineuse du prix du baril suite aux crises pétrolières des annés 70. A mesure que les revenus des champs décroissent (déplétion du gisement, augmentation de la production d’eau, interventions plus fréquentes…), les coûts de maintenance augmentent (corrosion, vétusté, fin du cycle de vie calculé, nécessité de procéder à d’importants travaux…). L’industrie a géré cette évolution par le transfert de champs anciens des gros opérateurs vers de plus petites entreprises dont la structure de coût a permis d’allonger la durée de vie économique des champs. Au delà des “normes les plus élevées au monde en matière de sécurité, de santé et d’environnement”, la Commission devra donc s’inquiéter de l’incidence de tels transferts sur les profils de risques ainsi que de la capacité de réponse face à la catastrophe: si la priorité est de prévenir, il faut aussi s’assurer qu’une facture de 30 milliards d’euros puisse être réglée… Terminons sur une réflexion concernant les priorités, justement. Comment parler de “risque au minimum absolu” alors que l’on fait passer la production devant? Décidement, même si l’intention est bonne et l’initiative européennes va bien évidemment dans le bon sens, ces déclarations me semblent un peu incohérentes.