“Mr le Ministre, il est grand temps de prendre des décisions déchirantes”

"Avec la nomination du nouveau Ministre Philippe Martin au MEDDE devrait s’ouvrir en FRANCE une nouvelle période de concertation et de dialogue pour aborder plus sereinement et pragmatiquement le brûlant sujet, aujourd’hui polémique et tabou, de l’exploration et l’exploitation du gaz de schiste volontairement laissé de coté dans le débat sur la transition énergétique, alors qu’il doit en être une composante indispensable."

L’Amicale des Foreurs et Métiers du pétrole qui entend bien relancer le débat a adressé une lettre ouverte à Philippe Martin. En voici la teneur :

 

Monsieur le Ministre,

"Votre installation au Ministère de l’Écologie du Développement Durable et de l’Énergie ouvre, nous l’espérons, une ère nouvelle de concertation et de coopération."

"Nous avons toujours entretenu avec les services de ce Ministère d’excellentes relations. Nous sommes intervenus à plusieurs reprises auprès de ceux-ci sur des sujets variés qui concernaient l’exploration pétrolière en France (procédures d’attribution des permis miniers, règlementations techniques des appareils de forage, règlementation du travail sur les chantiers pétroliers, redevance aux collectivités locales, etc.) et avons participé à plusieurs groupes de travail avec eux sur ces sujets."

"L’arrivée dans le paysage pétrolier français du sujet des hydrocarbures dits non conventionnels a ouvert une période de glaciation dans nos relations, période qui a atteint son paroxysme avec la venue de votre prédécesseur au ministère."

"Nous avons en effet écrit à cinq reprises à Madame Delphine BATHO, soit directement soit par des courriers au Président de la République et au Premier ministre qui l’avaient chargé de nous fournir une réponse. Mais de réponse nous n’avons jamais eu, pas même un accusé de réception de nos courriers, ce qui a eu le don de nous irriter fortement, car nous l’avons pris pour une marque de mépris incompatible avec la conception que nous avons de la démocratie."

"Nos derniers courriers étaient relatifs à l’application de la loi 2011-835 du 13 juillet 2011 dont l’article 2 prévoyait la création d’une Commission nationale d’orientation, de suivi et d’évaluation des techniques d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures liquides et gazeux. Cette commission a été créée, mais jamais constituée et Madame BATHO en avait publiquement exclu la mise en place. Une question écrite sur ce sujet a été posée au Sénat à notre demande par Madame Frédérique ESPAGNAC, sénatrice des Pyrénées-Atlantiques (n° 05549 "Mise en application de la loi visant à interdire l’exploration et l’exploitation des mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique", déposée le 28 mars 2013) : elle n’a toujours pas reçue de réponse !"

"Il nous semble que l’heure est venue de relancer le débat car la position défendue par le gouvernement est devenue insoutenable : "tout le monde convient maintenant que les arguments soit disant techniques des opposants ne sont que le cache-sexe de honteuses manœuvres électoralistes et d’idéologies suicidaires."

"L’état de l’opinion a considérablement évolué, les effets mensongers et dévastateurs du film « Gasland » s’estompent sous le poids de réalités que seuls s’obstinent à nier ceux qui sont affectés par le syndrome NIMBY (NDLR : « Not In My BackYard », qui signifie « pas dans mon arrière-cour »)."

"Au sein même de la représentation parlementaire, y compris dans votre propre parti, nombreux sont ceux qui regrettent l’existence de cette loi 2011-835 qui est devenue l’archétype d’une absence flagrante de pragmatisme dans la gestion des affaires publiques. Notre pays est une puissance déclinante alors que nous avons d’énormes atouts à faire valoir. "

"Nous avons besoin de reconstruire un appareil de production compétitif, et cela passe, entre-autres, par des énergies fossiles que nous n’avons plus et que nous devons importer massivement à grands frais."

"Les énergies renouvelables, que bien évidemment nous encourageons, ne sont dans l’immédiat compétitives ni techniquement ni financièrement : "les dernières prévisions de l’Agence Internationale de l’Énergie leur laissent une faible part dans le mix énergétique à l’horizon 2035."

"Le gaz est le complément indispensable de ces énergies renouvelables (éolien, photovoltaïque, hydraulien) dont on nous fait croire qu’elles sont la solution à nos problèmes énergétiques ; leur caractère intermittent et aléatoire nécessite des centrales thermiques d’appoint qui doivent fonctionner au gaz, à condition que celui-ci soit compétitif par rapport au charbon (qui représente la pire des énergies sur la plan environnemental), et ce n’est malheureusement pas le cas actuellement."

"Notre industrie pétrochimique, qui est encore un fleuron de notre patrimoine industriel, a besoin des hydrocarbures non seulement comme matière première mais aussi comme énergie primaire et la crainte que nous avons actuellement est de la voir sérieusement concurrencée par les États-Unis qui bénéficient, grâce au gaz et huile de schiste, d’une matière première et d’une énergie bon marché."

"Alors, Monsieur le Ministre, il est grand temps de prendre des décisions déchirantes qui mettront certainement en cause le fragile équilibre de la majorité actuelle, mais vous vaudront une large reconnaissance dans le futur."

"Plus de 100 permis de recherche d’hydrocarbures sont actuellement en instance : "si vous les attribuez, c’est une manne financière qui viendra améliorer le faible niveau actuel de nos investissements, sans aucun coût pour le contribuable, c’est tout un tissu d’industries et d’activités qui en bénéficieront et donc des emplois qui viendront à point pour aider le Président de la République à tenir ses engagements."

"Il n’est bien sûr pas question de laisser les compagnies pétrolières et les compagnies de service travailler sans contrôle. Vous disposez déjà de règlementations et de services de l’État compétents pour les faire appliquer."

"Mais vous avez aussi à votre disposition un outil remarquable, l’Institut Français du Pétrole et des Énergies Nouvelles (IFPEN) qui pourrait fort bien être chargé d’assurer « l’orientation, le suivi et l’évaluation des techniques d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures liquides et gazeux » prévue par la loi 2011-835. L’ex IFP a été le fer de lance de l’industrie pétrolière française pendant plusieurs décennies en promouvant de nombreuses techniques aujourd’hui mondialement utilisées : "il pourrait dans ce nouveau cadre retrouver des attributions dont le Grenelle de l’environnement l’a totalement dépouillé."

"Notre métier nous a appris à être pragmatiques, c’est pourquoi nous souffrons de la situation actuelle de notre pays et des choix qui sont faits en matière énergétique. Nous osons espérer que vous prendrez nos remarques en considération et répondrez à la question que nous avons posée."

"Dans cette attente, veuillez croire, Monsieur le Ministre, à nos respectueux sentiments."

L’Amicale des Foreurs et Métiers du pétrole

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19ieme siecke

Ca sent l’ex-business aux abois C’est une vraie lettre ou un pastiche?

Bachoubouzouc

Les écologistes étaient déjà en manque d’arguments rationnels pour appuyer leurs positions idéologiques. A tel point qu’aujourd’hui, leur réponse la plus fréquente est “Pff, le nucléaire et les fossiles c’est tellement yesterday !”

fredo

rajouter EN à IFP, si c’est pas un argument rationnel, un exemple évident de greenwashing ? Elle est où l’innovation de “Nouvelles”? Je comprends toujours pas à quoi sert cet IFP EN, dans cette période d’austérité,..

Bachoubouzouc

L’IFP est, de ce que je sais, devenue EN en se mettant à bosser sur les biocarburants. Cela n’a donc rien à voir avec le débat actuel. Si la décision d’interdire les gaz de schistes pouvait se justifier à l’époque où elle a été prise, celle d’interdire la recherche sur le sujet est toujours aussi anti-scientifique, stupide et rétrograde.

Gazeolsol

D’autant plus qu’ils pourraient toujours(les prospecteurs) essayer la prospection et exploitation avec le propane,comme en parlait Enerzine il y a quelques mois de ça. La législation actuelle ne l’interdit pas (seulement la fracturation hydraulique). C’est l’occasion de tester la méthode au propane(nettement plus chère,bien sur).

Dan1

Effectivement, il se pourrait bien que Philippe Martin prenne des décisions déchirantes :

fredo

merci pour cette précision sur l’IFP EN. Cela étant je ne vois pas en quoi les choses ont tant évolué, il y a toujours comme l’an dernier 7 français sur 10 hostiles à l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels, et l’amicale des foreurs qui continue à associer systématiquement exploration et exploitation. donc de ce que je comprends, ils peuvent faire des recherches sur la technique d’exploration, et faire des recherches pour estimer le potentiel, soient des forages d’exploration avec une technique autre que la fracturation hydraulique. La balle est donc bien dans le camp des foreurs qui n’acceptent pas les règles du jeu.

Dan1

Remarquez bien qu’il ne sera peut être pas nécessaire d’exploiter les gaz de schiste pour avoir suffisamment d’énergie malgré la déplétion du pétrole et une éventuelle décrue du nucléaire : Allez, cessons d’ergoter… tous à la mine !

Pastilleverte

Scoop, les “foreurs” font du “lobbying”, c’est à dire qu’ils cherchent de l’activité, les vilains méchants ! En attendant, les USA nous efourguent leur charbon dont le prix a chuté suite au boom du GDS aux States. Les allemands qui sont en train d’arrêter leurs centrales nuke essaient de remplacer la production d’électricité avec des centrales au charbon ou à la lignite, bien connus tous les deux pour être le summum de la propreté écologique. De plus leur équipement surréaliste en éolien et PV renforce leurs besoins en centrales à flamme, mais plus au gaz et de moins en moins, même si parmi les fossiles c’est ce qui émet le moins de CO2. Bravo la France, bravo l’Allemagne, bravo l’Europe…. Transition, transition, non mais est-ce que j’ai une g*** de transition ?

Bibou64

Bonjour. Plutot que de persister dans le forage de ressources fossiles, je propose plutot de: – demander aux supermarchés de construire des ombrières avec panneaux solaires reliès au réseau, et aussi aux employeurs. – mettre en place des bornes de recharge pour les voitures electriques. – Développer massivement 10% du parc urbain, ce qui représentera quelques milliard d’Euro par an de petrole que nous n’acheterons plus. EDF est contre, TOTAL est contre, Mais si les grandes surfaces y voient leur interêt, et bien tant pis pour TOTAL et EDF. Cela permettra de : Faire tourner les chaines de Renault ZOE, Mia, SMART et Bolloré Faire tourner les productions PV françaises. Développer le stockage (voir le rapport Lauvergeon). Nous démarquer enfin des autres pays.

Sicetaitsimple

Qu’est ce que vous entendez par “Développer massivement 10% du parc urbain”?

Bibou64

oups, je ne suis pas clair. On pourrait amener sans peine 10% du parc francais des voitures à de l’electrique. Il ne faut pas que cela soit en les rechargeant la nuit exclusivement avec du nuke, raison pour laquelle je propose les ombrieres sur les parkings en journée.

Dan1

“Il ne faut pas que cela soit en les rechargeant la nuit exclusivement avec du nuke”. Ben, les véhicules seront essentiellement rechargés avec l’électricité qui se trouve sur le réseau au moment où ils y sont branchés. Evidemment, on peut faire une recharge exclusivement solaire en rechargeant les véhicules avec des ombrières photovoltaïques non connectées au réseau. Sauf que cela n’intéresse personne car alors on ne bénéficie plus des subventions liées à la vente en totalité. Il est d’ailleurs curieux de voir que personne ne coche la case “vente en surplus” sur le contrat d’achat. Sinon, avec une recharge exclusivement nucléaire, on peut alimenter 5 millions de véhicules particuliers avec la seule récupération de l’électricité qui était produite par Tricastin pour l’enrichissement par diffusion :

Bibou64

Ombrieres, connectées au réseau, oui. Faut vivre avec son environnement, et ne pas chercher à alimenter uniquement les VE avec du solaire. N’empêche que les ombrières, c’est quand même le bon endroit, même si ce n’es peut être pas la solution la plus rentable en court terme. La consommation d’un VE type zoe (que je constate perso) varie entre 11kW/h pour 100km (excellent conducteur) à 13KW/h pour un conducteur roulant à 90km/h sur une rocade + parcours urbain.

Sicetaitsimple

Ok, vous parliez de 10% du parc automobile. Je partage sur “ne pas chercher à alimenter uniquement les VE avec du solaire.”. C’est déjà pas facile de passer à l’électrique, si en plus faut la laisser au garage 6 mois de l’année…..

Dan1

A Bibou64. “La consommation d’un VE type zoe (que je constate perso) varie entre 11kW/h pour 100km (excellent conducteur) à 13KW/h” D’accord pour votre retour d’expérience, intéressant, mais de grâce, une quantité d’énergie électrique c’est des kWh des kilowatts x par des heures, c’est à dire une puissance multipliée par le temps et non divisée. Vous pouvez changer l’unité de puissance et l’unité de temps, mais une quantité d’énergie restera une puissance multipliée par le temps. En revanche, si vous divisez une quantité d’énergie (exprimée en kWh par le temps exprimé dans la même unité, donc en heure), vous obtenez une puissance en Watts.

Sicetaitsimple

Faut surtout pas se torturer l’esprit avec l’origine de l’electricité consommée par un VE, au moins à ce stade de développement. Vous nous dites qu’une Zoé consomme environ 12 à 15kWh au 100, avec les tarifs actuels ( même hors HP/HC), c’est environ 2€/100, moins de l’équivalent de 2l/100 donc “quasiment” rien. Et a priori les acheteurs (particuliers ou professionnels) qui doivent être un peu sensiblisés vont “naturellement” éviter les recharges aux périodes de vraie pointe ( vers 19h00 en hiver) et optimiser avec des tarifs style HC/HP, sauf quand tout simplement ils auront besoin de recharger parce que le “réservoir” est vide. Quand le VE aura pris de l’ampleur, il y aura certainement beaucoup d’opportunités pour le faire participer à l’équilibre offre-demande, mais aujourd’hui ce n’est de mon point de vue pas un sujet. Bref, du VE purement “nuke” la nuit aujourd’hui, c’est parfait. Un coup de recharge en été à midi sur le parking du supermarché, c’est bien aussi. Mais qu’il recharge quand il veut ( en évitant juste le 18h-20h les jours les plus froids de l’année sauf s’il est en panne sèche) n’est pas un réel souci à ce stade.

Devoirdereserve

Il faut que vous poussiez le raisonnement jusqu’au bout ! Le PV dans le pavillon dans le banlieue, en auto-consommation, avec stockage par le VE (ou un pack de batterie supplémentaire en attente), voilà la solution idéale. Sans surcoût pour la collectivité (car le bénéficiaire est l’investisseur) c’est la meilleure façon d’implanter massivement du PV sans subvention, de préserver la mobilité péri-urbaine, et donc de préserver la valeur de l’habitat (et éviter une crise à côté de laquelle celle des subrimes serait une douce blague). Vous noterez que ce n’est pas la doxa écologiste…

Herve

Donc pour réssumer la situation: – Les jours ou il fait beau, on pourra rouler en bagnole électrique chargée par le solaire PV. – En hiver ou quand il pleut, faudra prendre le vélo! C’est beau le progrés du 21e siècle!

trimtab

“…..Donc pour réssumer la situation: – Les jours ou il fait beau, on pourra rouler en bagnole électrique chargée par le solaire PV. D’accord, mais s’il y a du vent aussi, c’est un peu d’éole……sans oublier le nuke nocturne à tarif reduit….! L’embarras du choix…? – En hiver ou quand il pleut, faudra prendre le vélo! Idem, s’il y a du vent…..et du nuke nocturne à……. Sans oublier qu’il fait quand même jour pendant l’hiver pour quelques heures (on est pas au circle polaire quand même et nuit éternelle….!) et le solaire (!), certes un peu faiblard, ce n’est pas rien….c’est toujours ça de gagner…..comme atteste ici chez mon voisin à 500 metres: Encore l’embaras du choix selon sa volonté ‘d’opportunisme énergétique’ (que j’ai évoqué à plusieurs reprise ici) et les contraintes qu’on veut bien accepter, pour recharger son AME (Auxilliaire Mobilité Electrique) C’est beau le progrés du 21e siècle!…..” Et c’est vous qui le dites….., vu l’embaras du choix…! trimtab

Herve

@Trimtab L’embaras du choix, peut être, par contre l’embarras des dépenses ça c’est sur! Il est certain que si vous remplacez une centrale conventionnelle de 1MW, par 1MW de solaire + 1MWd’éolien+1MW de centrale biomasse + 1MW de marémotrice + 500 tonnes de batteries, oui, vous allez fonctionner. ça va juste couter “un peu” plus cher votre bazzard. Et pour un bilan carbone qu’il serait intéressant d’évaluer. Quant à l’utilisation des batteries des VE pou le stockage, si c’es ça que vous évoquez, le concept est seduisant, l’application pratique serait à étudier de prés. Conflit d’usage, rémunération de l’usure de la batterie, autonomie disponible aléatoire… pas sur qu’il y ait beaucoup de clients intéressés au final…

Sicetaitsimple

je pense que vous faites une confusion entre: – d’une part le mix ENR+ stockage permettant de remplacer une centrale “pilotable” style nucléaire, charbon ou gaz et c’est une vraie question, on a trop souvent des arguments comparant au pire une puissance “garantie” et au mieux l’energie fournie , et il est vrai que ça va couter un bras. – de la substitution de fossiles via le VE , qui va normalement pouvoir contribuer à l’équilibre offre-demande d’électricité, aujourd’hui par une recharge classique la nuit à base (le plus souvent) de nucléaire, demain ou après demain (disons dans 10 à 20 ans) par des recharges plus ciblées ( au pic de 13h00 via le PV en été, en cas de coup de vent,….).Ceci hors schémas individuels d’autoconsommation PV qui ont une économie différente. Mais ce n’est pas du stockage pur au sens retour à de l’électricité (qui aura du mal à se développer), mais de la substitution, qui a mon avis a beaucoup plus d’espace pour se développer si elle n’est pas trop gourmande en CAPEX.