La chimie est une science fascinante qui explore les propriétés et les transformations de la matière. Bien que souvent associée à des liquides colorés dans des béchers et des éprouvettes, la chimie englobe en réalité tous les états de la matière, y compris les solides.
Les scientifiques du Critical Materials Innovation (CMI) Hub, dirigé par le Ames National Laboratory du Département de l’Énergie des États-Unis, explorent une sous-discipline de la chimie appelée mécanochimie, qui bouleverse la compréhension conventionnelle des réactions chimiques en utilisant des forces mécaniques pour initier des réactions dans les solides.
La mécanochimie au service de l’extraction du lithium
Les chercheurs du CMI Hub ont développé un nouveau procédé appelé extraction mécanochimique du lithium à basse température (MELLT), une solution créative pour augmenter et diversifier l’approvisionnement en lithium aux États-Unis. Le lithium est un élément très demandé, présentant un risque associé à sa chaîne d’approvisionnement. Il est nécessaire pour les batteries rechargeables haute performance utilisées dans de nombreuses technologies, telles que les téléphones portables, les dispositifs médicaux et les véhicules électriques.
Actuellement, le lithium est extrait de deux sources principales : les saumures et les minéraux de roche dure. L’extraction à partir des saumures est un processus rentable basé sur l’évaporation solaire, tandis que l’extraction à partir du minéral de roche dure, le spodumène, est énergivore et génère des gaz à effet de serre ainsi que des déchets dangereux.
MELLT : une approche plus durable et écologique
Pour contourner ces inconvénients et créer un processus plus efficace, l’équipe d’Ihor Hlova a utilisé la mécanochimie. Comme l’explique Tyler Del Rose, chercheur postdoctoral au Ames Lab et membre de l’équipe de recherche, «la mécanochimie est une technique sous-utilisée dans les méthodologies d’extraction. Habituellement, elle est utilisée pour broyer le matériau initial ou mélanger les réactifs, mais dans de rares cas, elle a été utilisée pour faciliter les réactions chimiques.»
Le procédé MELLT implique le broyage à billes de morceaux solides de spodumène et d’un réactif chimique solide, comme le carbonate de sodium (Na2CO3), dans une chambre contenant des billes d’acier. Les forces mécaniques induites par le mouvement de la chambre provoquent des imperfections structurelles à la surface des matériaux solides, créant des points réactifs où les réactions chimiques peuvent se produire plus rapidement et plus facilement. Ces réactions conduisent à la formation de composés de lithium solubles dans l’eau, qui sont ensuite extraits du produit final par lavage à l’eau.

MELLT rationalise l’extraction des minéraux de roche dure, utilise nettement moins d’énergie et élimine les flux de déchets toxiques. De plus, MELLT est beaucoup plus rapide que les méthodes d’extraction par saumure. Comme le souligne Ihor Hlova, « la mécanochimie offre une approche plus durable et respectueuse de l’environnement pour conduire des réactions chimiques. Ce projet offre la possibilité de diversifier les chaînes d’approvisionnement en lithium aux États-Unis, réduisant ainsi la criticité du lithium et ouvrant la voie à un avenir durable. »
Un effort collaboratif pour relever les défis de l’approvisionnement en lithium
Le développement de MELLT s’inscrit dans un effort collaboratif plus large soutenu par le CMI, impliquant plusieurs laboratoires nationaux, universités et partenaires industriels, visant à découvrir de nouveaux procédés de raffinage ou à améliorer les méthodes existantes d’extraction du lithium à partir de sources de roche dure et de saumure.
Comme le souligne Tom Lograsso, directeur du CMI, « le CMI existe pour développer des solutions innovantes aux problèmes critiques de la chaîne d’approvisionnement comme celui-ci. Ce travail fait partie de cette mission, fournissant aux industries américaines des technologies disponibles pour la commercialisation. »
Légende illustration : Contenu de la chambre de broyage à billes : spodumène, réactif et billes d’acier. Crédit – U.S. Department of Energy, Ames National Laboratory