Rénovation énergétique des logements : “pour une politique volontariste”

Dans le cadre de ses réflexions sur la conduite de la transition énergétique (Directive efficacité énergétique, financement des énergies renouvelables), la Fondation Terra Nova s’est penchée sur un chantier majeur de la maîtrise de la consommation d’énergie : la rénovation énergétique des logements.

Premier secteur de consommation d’énergie devant le transport et l’industrie, le bâtiment est au coeur de la politique d’efficacité et de sobriété énergétiques.

Cette note plaide pour des mesures et une action publique permettant d’orienter les acteurs vers un immobilier durable, à travers notamment la mise en place d’un service public de la performance énergétique très opérationnel, une véritable fiscalité verte permettant une large prise de conscience, des outils de financement efficaces et pérennes.

Synthèse

La rénovation énergétique des bâtiments est un enjeu majeur pour notre pays, qui n’autorise pas de renoncement, même dans une période de fortes contraintes budgétaires. Les mesures prises depuis dix ans sont largement insuffisantes et leur simple aménagement ne suffira pas. Aujourd’hui, des moyens d’actions, volontaristes et structurants, permettant d’atteindre les objectifs politiques annoncés par le Président de la République, sont possibles et doivent permettre d’orienter les acteurs vers un immobilier durable, engageant ainsi le pays dans une nouvelle ère énergétique.

Le rapport de Terra Nova « Maîtriser l’énergie : un projet énergétique pour une société responsable et innovante »[.pdf] a montré le caractère indispensable d’une politique d’efficacité et de sobriété énergétiques pour faire face à la rareté croissante des ressources fossiles et aux enjeux climatiques.

Les vertus économiques de la rénovation énergétique sont connues : dans le contexte actuel de crise économique, un plan ambitieux de rénovation énergétique contribuerait aux efforts de relance économique si importants pour notre pays, et favoriserait la création de plusieurs centaines de milliers d’emplois non-délocalisables.

Pour accélérer le rythme naturel des rénovations énergétiques, une action publique visant à modifier l’équation économique des opérations, à solvabiliser et accompagner les acteurs est nécessaire. Elle doit s’appuyer sur plusieurs éléments constitutifs d’un dispositif simple, cohérent et stable :

– Un service public de la performance énergétique très opérationnel, organisé sur les territoires autour des agences de l’Etat et des collectivités locales, travaillant en collaboration étroite avec les associations et les acteurs privés des filières concernées, qui apporte de l’information et des compétences, encourage les rénovations, et facilite l’obtention des aides et des financements privés.

– Une véritable fiscalité immobilière verte qui entraine une large prise de conscience. En fonction de la performance énergétique du logement, une modulation s’appliquerait progressivement aux différents outils (ISF, plus-values foncières, droits de mutation….) et préparerait des obligations futures de rénovation qui doivent être annoncées dès à présent pour une mise en œuvre à l’horizon 2017-2020.

– Des outils de financement efficaces et pérennes, reposant sur des montages innovants et des circuits de financement spécialisés, permettant de mobiliser des ressources privées aux côtés des financements publics.

Bien sûr, la rénovation énergétique des bâtiments comporte de nombreuses dimensions, techniques, sociales et financières, et exige une approche plus précise pour chaque situation. En outre, la multiplicité des acteurs impliqués (propriétaires, occupants, entreprises du bâtiment, équipementiers, énergéticiens, banques, collectivités locales…) ne facilite pas l’alignement des intérêts. Pour faciliter l’accélération des rénovations, des priorités politiques doivent être fixées : l’augmentation de la précarité énergétique, en particulier, nécessite d’agir rapidement par des outils spécifiques ; la rénovation des copropriétés, des bâtiments tertiaires, publiques ou privés, recèle dans chacun des cas des enjeux spécifiques qu’il faut traiter. A eux seuls, les logements représentent les deux tiers de la consommation des bâtiments et représentent un enjeu considérable sur lequel la présente note se concentre volontairement.

S’agissant du logement, donc de l’aide aux particuliers, toutes les mesures qui seront prises doivent s’appuyer sur les principes de cohérence et de lisibilité énoncés précédemment, pour permettre d’initier une action en profondeur. Les conséquences des décisions qui seront prises dans les prochains mois seront importantes et durables, aussi bien sur la dépense énergétique de chacun que dans l’évolution de l’ensemble du parc immobilier dans les 30 à 40 ans à venir.

Avec le débat sur la transition énergétique, et le nouveau cadre de la Directive européenne sur l’efficacité énergétique (EE), l’année 2013 doit s’ouvrir sur l’essentiel des décisions, et la création des outils qui permettront une montée en puissance des rénovations tout au long du quinquennat.

Cette note présente 15 propositions pour la mise en place d’un grand plan de rénovation énergétique des logements :


Un service public de la performance énergétique très opérationnel, organisé sur les territoires
:

– Proposition n°1 : un guichet unique opérationnel, déployé sur les territoires, symbolisé par une marque unique et annoncé par une grande campagne de communication ;
– Proposition n°2 : des « ambassadeurs de l’efficacité énergétique », formés et bien insérés pour mobiliser ;
– Proposition n°3 : renforcer le programme « Habiter Mieux » de l’ANAH et prévenir l’entrée en précarité énergétique ;
– Proposition n°4 : accélérer le développement d’une filière spécialisée de qualité ;
– Proposition n°5 : utiliser la facture des énergéticiens pour sensibiliser les consommateurs et rendre obligatoire le mode d’emploi du logement.

Accélérer la prise de conscience par la fiscalité immobilière verte :

– Proposition n°6 : approfondir la réforme du DPE pour qu’il intègre un affichage en €/m2, présente des bouquets de travaux, et devienne le seul référentiel technique des aides ;
– Proposition n°7 : mobiliser les notaires pour participer à la sensibilisation, au repérage et au suivi de la qualité énergétique des bâtiments ;
– Proposition n°8 : Créer une véritable fiscalité immobilière verte ;
– Proposition n°9 : Accroître la taxation des revenus locatifs des logements dont le DPE est supérieur à la classe E ;
– Proposition n°10 : obligation future de rénovation avant mutation.

Financer par des montages innovants et des circuits de financements spécialisés
:

– Proposition n°11 : mettre en place un observatoire public des prix de la rénovation énergétique ;
– Proposition n°12 : pérenniser et harmoniser les aides publiques autour d’un prêt bonifié ;
– Proposition n°13 : créer un outil de refinancement qui permette d’orienter des liquidités vers l’efficacité énergétique, abaisse le coût des financements en mobilisant des ressources extra-budgétaires auprès de la BEI et des énergéticiens ;
– Proposition n°14 : favoriser l’émergence du tiers-financement par des structures publiques, semi-publiques (SEM) ou privées, et favoriser le développement de CPE de qualité ;
– Proposition n°15 : accélérer la diffusion de l’éco-PLS pour des logements sociaux pour atteindre 120 000 logements rénovés par an.

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mamouth

Les propositions 1 et 2 existent déjà : ce sont les points info-énergie cofinancés par l’ADEME. Moi, je préfère renvoyer à ce playdoyer pour une obligation de performance énergétique dans le secteur résidentiel locatif . Car la proposition 10 (obligation de rénovation avant mutation) sera difficilement applicable : qui des ventes dans l’urgence (décés) ou par des gens incapables de prendre en charge les travaux ?

climax1891

Les dépenses de fonctionnement des collectivités locales ont augmenté de 11,5 milliards depuis 2007 (hors inflation) sans aucun effet sur la croissance. Ces 11,5 milliards d’euros seraient bien plus utiles pour financer une grande politique d’économie d’énergie afin de réduire une facture énergétique français qui se monte, hors inflation, à 270 milliards d’euros depuis 2008. 270 milliards d’euros partis vers la Russie et les pays du Moyen Orient.