Terre

en réchauffant des sols gelés depuis des lustres, il remet en circulation d’énormes quantités de méthane, piégé dans ces sols et soudain libérés.

Nous avons vu que la dégradation des milieux marins[1], tels que les coraux ou les mangroves, en partie due au réchauffement, diminuait la capacité des océans à capter le CO2.

Les scientifiques observent aujourd’hui une saturation. Les océans absorbent un quart des émissions de gaz à effet de serre, dont une bonne partie par les mers australes dont la capacité d’abortion n’augmente plus, du fait des modifications du régime des vents. Les vents plus violents remontent en surface des eaux profondes, plus froides et plus salées, donc plus denses et moins favorables à l’absorption de gaz carbonique.

La piste des océans, pour lutter contre le réchauffement climatique, est donc est donc insuffisante, et ne donnera de résultats que si nous parvenons à rétablir la qualité des milieux marins. C’est bien embêtant, car les mers pèsent lourd dans les bilans. Nous savons tous qu’elles couvrent des surfaces bien plus importantes que les terres, et qu’elles abritent une végétation considérable sous forme de phytoplancton.

Les chiffres sont éloquents : où se trouve le carbone sur notre planète Terre ? Pardon de parler en milliards de tonnes, et ne retenez que les ordres de grandeur. Il n’y en a en définitive que très peu dans l’atmosphère : 750, alors qu’il y en a 39 000 dans l’hydrosphère.

Une augmentation infime de la dose de carbone dans les océans a un effet massif pour l’atmosphère. Pas de chance, ça ne fonctionne plus pour l’instant. Il faut y remédier, mais ça prend du temps, et il faut se tourner vers d’autres pistes, terrestres, celles-ci. La situation est moins favorable, car la biosphère, sols et végétations, ne contient que 2000 milliards de tonnes de carbone, nous ne sommes plus du tout dans les ordres de grandeur qu’offrent les océans. Le reste du carbone se situe dans les roches, la lithosphère pour les savants. En quantités astronomiques puisqu’il s’agit de 37 000 000 de milliards de tonnes, dont 7 000 000 sous formes de roches carbonées (pétrole, charbon) et 30 000 000 sous formes de roches carbonatées, essentiellement du calcaire[2].

L’équation est donc posée : puisque les océans ne peuvent absorber plus, que les roches vivent à une vitesse géologique et que l’activité humaine provoque plus de déstockage massif que du stockage, il reste la terre et ce qui pousse dessus pour stocker du carbone. On pense alors aux grands arbres, à la végétation : la déforestation, en diminuant leur capacité de stockage accentue l’effet de serre, alors que les plantations le diminuent, avec notamment de grands programmes, des puits de carbone. Il y a là à l’évidence une politique active à mener, mais la végétation ne représente qu’un petit tiers du carbone lié à la terre, l’essentiel est dans la terre, sous forme de matière organique.

Au total, il y a plus de carbone à l’intérieur des sols qu’au dessus, végétaux et air réunis. Voilà donc une piste de travail à approfondir, et c’est ce que fait la FAO[3]. Cette organisation vient de publier une Carte mondiale du carbone où sont identifiés les zones qui emprisonnent le plus de carbone dans le sol et le potentiel des sols dégradés à séquestrer des milliards de tonnes de carbone supplémentaires.

La terre devient ainsi un des réservoirs de carbone à développer activement. Elle doit non seulement nous nourrir, nous fournir de l’énergie et des matières premières, elle doit aussi stocker du carbone. Il faut pour cela la protéger, et lutter fermement contre l’érosion et l’artificialisation des sols. Et il faut la cultiver en tâchant d’augmenter en continu sa capacité de stockage de carbone.

Jusqu’à présent, la lutte contre l’effet de serre évoquait principalement les végétaux, aujourd’hui, il faut aussi penser au sol lui-même, entant que piège à carbone, un peu l’inverse de ce qui se passe avec le dégel des sols. C’est un nouveau contrat à passer avec les agriculteurs.

L’INRA vient de publier une étude comparative de plusieurs modes de production, traitant des aspects environnementaux comme de la question des revenus. La hausse des cours des produits agricoles favorise les modes intensifs, mais les modes biologiques ou sous couvert végétal respectent bien mieux les sols. La motion de synthèse[4] consiste bien sûr à rémunérer les agriculteurs pour leur apport à l’environnement, comme la qualité des eaux et le stockage de carbone.

La terre nourricière est aussi régulatrice de notre climat.

[1] Chronique Mer du 24/07/2008

[2] Les chiffres viennent de Wikipédia.

[3] Voir sur ce sujet Actu-Environnement.com – 23/07/2008

[4] Synthèse chronique du 05/11/2007

[ Archive ] – Cet article a été écrit par Dominique Bidou

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