Un nouveau chapitre pour la spectroscopie à l’échelle de l’attoseconde

Un nouveau chapitre pour la spectroscopie à l'échelle de l'attoseconde

La compréhension des mouvements des électrons à l’échelle de l’attoseconde constitue un domaine de recherche fondamental pour la physique moderne. Une équipe de chercheurs de l’Institut Max Born de Berlin a récemment mis en œuvre une méthode innovante de spectroscopie par pompage et sondage à l’échelle de l’attoseconde, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives pour l’étude des dynamiques électroniques ultra-rapides.

La source attoseconde développée par les scientifiques se distingue par sa compacité et son intensité. En utilisant une géométrie de génération décentrée, les chercheurs ont pu produire des impulsions attosecondes à un taux de répétition de 1 kilohertz. Cette avancée technique représente un pas significatif vers des expérimentations plus stables et répétables dans le temps.

Les premières générations d’impulsions attosecondes ont vu le jour au début du XXIe siècle, marquant une étape cruciale dans l’observation des électrons. Pour leur travail de pionnier, Anne L’Huillier, Pierre Agostini et Ferenc Krausz ont été honorés du Prix Nobel de Physique en 2023. Toutefois, les techniques attosecondes actuelles présentent une contrainte majeure : elles nécessitent l’utilisation conjointe d’une impulsion femtoseconde pour enregistrer des événements dynamiques, ce qui limite l’exploration des dynamiques électroniques sur des échelles de temps attosecondes.

L’ambition de mener des expériences avec des impulsions de pompage et de sondage attosecondes a longtemps été un défi pour la communauté scientifique. La génération d’impulsions attosecondes intenses nécessaires à ces expériences est traditionnellement peu efficace. Les démonstrations antérieures de la spectroscopie APAPS se limitaient à des dispositifs volumineux et à des systèmes laser spécialisés fonctionnant à des taux de répétition bas.

Fig. 2 : APAPS bicolore. La génération d’Ar+, initiée par une impulsion de pompe attoseconde à large bande avec une énergie de photon d’environ 20 eV, est sondée par une seconde impulsion avec une énergie de photon centrale de 33,5 eV. Cette énergie est supérieure au second potentiel d’ionisation de l’Ar, produisant ainsi de l’Ar2+. L’augmentation du rendement en ions Ar2+ autour du délai zéro s’explique par la production plus efficace d’Ar2+ lorsque l’impulsion de sonde suit l’impulsion de pompe. L’encadré montre un ajustement de la structure de l’impulsion attoseconde. Crédit : MBI / Bernd Schütte

Le dispositif mis au point par l’Institut Max Born permet désormais de réaliser des expériences APAPS avec un équipement bien plus compact. Les chercheurs ont utilisé un laser de conduite clé en main à un taux de répétition de kilohertz, ce qui a permis une opération nettement plus stable, essentielle pour la mise en œuvre réussie de la spectroscopie APAPS.

En exploitant ces sources attosecondes stables et intenses, les scientifiques ont pu ioniser des atomes d’argon avec une impulsion de pompage attoseconde, générant ainsi des ions Ar+ chargés simplement. La formation de ces ions a été sondée par une impulsion de sonde attoseconde, entraînant une ionisation supplémentaire et la formation d’ions Ar2+ doublement chargés. Les résultats indiquent une augmentation rapide du rendement des ions Ar2+, confirmant la durée attoseconde des impulsions de pompage et de sondage impliquées.

Les énergies modestes des impulsions infrarouges utilisées dans cette étude ouvrent la voie à la réalisation d’expériences APAPS à des taux de répétition encore plus élevés, jusqu’au niveau du mégahertz. Les systèmes laser nécessaires pour ces expériences sont déjà disponibles ou en cours de développement, promettant ainsi de nouvelles perspectives pour l’étude des électrons sur des échelles de temps extrêmement courtes, inaccessibles avec les techniques attosecondes actuelles.

En synthèse

La réalisation d’expériences de spectroscopie APAPS à l’aide d’une source attoseconde compacte et intense représente une avancée significative dans l’étude des dynamiques électroniques. L’approche novatrice adoptée par l’équipe de l’Institut Max Born de Berlin permet d’envisager des recherches futures à des taux de répétition plus élevés, augmentant ainsi la précision et la répétabilité des mesures. Ces travaux pourraient dévoiler des aspects inédits du comportement des électrons et contribuer à l’avancement de la physique quantique.

Pour une meilleure compréhension

Qu’est-ce que la spectroscopie APAPS ?

La spectroscopie par pompage et sondage à l’échelle de l’attoseconde (APAPS) est une technique qui permet d’étudier les dynamiques électroniques ultra-rapides en utilisant deux impulsions attosecondes : une pour exciter le système (pompage) et l’autre pour sonder les changements induits (sondage).

Quelle est l’importance des impulsions attosecondes ?

Les impulsions attosecondes sont essentielles pour observer et comprendre les mouvements des électrons qui se produisent sur des échelles de temps extrêmement courtes, de l’ordre de quelques centaines d’attosecondes (1 attoseconde = 10^-18 seconde).

Quels sont les avantages de la nouvelle source attoseconde développée ?

La source attoseconde mise au point par l’Institut Max Born est compacte, génère des impulsions intenses et fonctionne à un taux de répétition élevé, ce qui améliore la stabilité et la répétabilité des expériences.

Quels sont les défis associés aux techniques attosecondes actuelles ?

Les techniques attosecondes traditionnelles sont limitées par la nécessité d’utiliser des impulsions femtosecondes comme horloge, ce qui restreint l’exploration des dynamiques électroniques sur des échelles de temps attosecondes.

Quelles sont les implications futures de cette recherche ?

Cette recherche ouvre la possibilité de réaliser des expériences APAPS à des taux de répétition encore plus élevés, ce qui pourrait fournir des informations détaillées sur les processus électroniques et influencer le développement de technologies basées sur la physique quantique.

Références

Légende illustration : Montage expérimental pour la spectroscopie attoseconde-pompe à sonde attoseconde. Les impulsions NIR sont focalisées derrière un jet de gaz pulsé, où les impulsions attosecondes sont générées. À une certaine distance du jet de gaz, des demi-miroirs sphériques sont utilisés pour sélectionner et focaliser spectralement les impulsions attosecondes de la pompe et de la sonde. Les ions générés sont enregistrés à l’aide d’un spectromètre imageur à carte de vitesse. Crédit : MBI / Mikhail Volkov

Article : “Compact realization of all-attosecond pump-probe spectroscopy” – DOI: 10.1126/sciadv.adk9605

[ Rédaction ]

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