Approvisionner en carburant le département de la Défense : Les coûts réels

Désigné dans les médias comme étant le plus grand consommateur mondial de carburants à base de pétrole, le département de la Défense des États-Unis (DOD) dépense à lui seul des milliards de dollars par année en produits pétroliers.

Or, bien que le DOD fournisse au Congrès américain des prévisions budgétaires annuelles, les conflits incessants au Moyen-Orient et la volatilité du marché du pétrole brut se traduisent par d’importants écarts entre les coûts prévus et les coûts réels du carburant.

Selon une nouvelle recherche menée à l’Université Concordia, à Montréal, ces fréquents dépassements budgétaires pourraient avoir de graves conséquences pour le DOD. Toutefois, une amélioration des pratiques en matière de planification, de gestion budgétaire et de finances pourrait réduire les risques qui y sont associés. À l’approche des élections fédérales et compte tenu des conflits qui perdurent au Moyen-Orient, il y a là matière à réflexion pour les gouvernements américain et canadien.

Dans un article paru récemment dans la revue Public Budgeting & Finance, la chercheuse Ketra Schmitt – professeure de génie à Concordia – et ses collègues ont montré que de 2000 à 2011, le DOD a dépensé annuellement de 1 à 9 milliards de dollars de plus en carburant que ne le prévoyait son budget.

« Généralement, cette hausse des coûts est attribuable à l’augmentation du prix du carburant, affirme la Pre Schmitt, qui est également membre du Centre génie et société de l’Université Concordia. En moyenne, la fluctuation du prix du carburant compte pour 80 % des écarts observés entre les coûts estimés et les dépenses réelles. »

Cela dit, la quantité de carburant utilisée constitue également un facteur important. En effet, une consommation excédentaire par rapport aux prévisions explique environ 20 % des dépassements budgétaires. C’est durant les premiers stades de la guerre en Afghanistan et en Irak que les écarts sur le plan de la consommation étaient les plus élevés. Cette période a été inévitablement marquée par une augmentation des heures de vol, des jours passés en mer et des distances parcourues par les chars d’assaut.

Au début d’une opération militaire importante et inattendue, il est parfois impossible de mesurer toute l’ampleur des ressources nécessaires. Or, le DOD n’a pas réussi à anticiper certaines dépenses plutôt prévisibles et inhérentes au maintien des opérations de guerre, dont celles liées au carburant. Il a donc dû recourir à des fonds d’urgence pour assumer ces dépenses.

« Comme il n’arrive pas à prévoir les coûts et les besoins en matière de carburant durant les périodes de conflits prolongés, le DOD risque de devoir payer des prix excessifs et de se retrouver avec un manque à gagner, explique la Pre Schmitt. Lorsque le prix du carburant connaît une hausse de l’ordre de milliards de dollars, les gouvernements doivent inévitablement faire des compromis difficiles. Ils peuvent par exemple puiser dans des ressources allouées à d’autres programmes afin de soutenir les opérations militaires, ou encore augmenter le budget. »

Quelle est la solution? Les chercheurs présentent différentes approches permettant de mieux prévoir le prix du carburant et de gérer plus adéquatement la consommation des produits pétroliers. Par exemple, le DOD pourrait négocier des contrats d’achat de carburant à prix fixe afin de renforcer la stabilité budgétaire.

« C’est comme choisir un taux d’intérêt fixe plutôt qu’un taux variable pour un prêt hypothécaire. Selon le marché, vous serez avantagé ou désavantagé, mais vous saurez au moins à quel prix vous attendre », illustre la Pre Schmitt.

Cette étude montre qu’en définitive, le gouvernement doit mettre fin à sa politique consistant à recourir aux fonds d’urgence – qui ne comportent pas de plafond de dépenses – pour assumer les coûts liés aux opérations de guerre.

« Qu’elle soit justifiée par les impératifs de guerre ou l’imprévisibilité des prix, la dépendance aux fonds d’urgence réduit la capacité du gouvernement et du public à évaluer correctement les coûts associés aux divers choix », soutient la chercheuse Shannon Lloyd, qui a dirigé l’étude.

Partenaires de recherche : Cette étude a été menée par Shannon Lloyd (chercheuse indépendante) en collaboration avec les chercheurs Nicholas M. Rotteveel (Booz Allen Hamilton), Timothy Schwartz et Cameron Stanley (Concurrent Technologies Corporation).

         

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Verdarie

Il faut être Amméricain pour se poser une telle question ! C’est évident que lorsqu’on ne connait pas le prix de ce que l’on achète on a du mal à en évaluer le coût. Vu les quantités consommées, il évident qu’il y a intérêt à négocier un prix fixe………mais cela ne résoud pas la question de la consommation et du prix…….. en cas de dépassement……surtout en cas de guerre ?.

Raymond

Ne pas faire la guere

Verdarie

Oui, laissons à nos adversaires le choix de fabriquer des armes. C’est sans doute ce que pensaient nos politiques il n’y a à peine 75 ans ! On à vu le résultat ! Ah, la mémoire !