Couvrez ce CO2 que je ne saurais voir !

Un monde qui carbure à 100% aux énergies renouvelables ? La Conférence de Paris sur le climat va peut-être servir de catalyseur, selon Lyesse Laloui. Mais en attendant, le chercheur de l’EPFL préconise d’enfouir nos émissions de CO2.

La Conférence des Nations Unies s’est conclue sur un accord prometteur pour réduire notre impact sur le climat, ratifié par les 190 pays participants. Reste à savoir comment leurs engagements ambitieux pourront être respectés. La technologie fait bien entendu partie de la solution.

Parmi les concepts les plus matures et éprouvés, la séquestration souterraine des gaz à effet de serre. Selon Lyesse Laloui, directeur de la chaire Petrosvibri du gaz naturel à l’EPFL, ces développements pourraient jouer un rôle crucial dans la période de transition qui s’annonce, avant que le renouvelable ne devienne la règle. Enterrer nos émissions de CO2, en attendant d’être capable de ne plus en émettre ? C’est l’idée que défend l’expert en géo-ingénierie.

Les décisions prises dans le cadre de la Conférence mondiale sur le climat pourraient-elles donner un coup d’accélérateur aux technologies de séquestration du CO2 ?

Mon premier constat, général et positif, c’est qu’il y a aujourd’hui unanimité sur le fait qu’il y a bien un réchauffement climatique, et qu’en conséquence il faut faire quelque chose avec le carbone. Vis-à-vis de mon activité, ce consensus crée l’opportunité. Nous travaillons sur une solution parmi d’autres, mais qui rentre parfaitement dans le cadre des engagements pris.

Quel rôle la séquestration du CO2 pourrait-elle jouer à l’avenir ?

C’est la seule technologie actuelle à même de pallier l’accumulation de CO2 dans l’atmosphère. Plus de 70 projets en on largement démontré la faisabilité. Depuis une quinzaine d’années, les grands projets industriels en cours séquestrent sous terre environ 1 million de tonnes d’oxyde de carbone par an. Et contrairement à l’extraction d’hydrocarbures, le stockage de CO2 peut se faire n’importe où dans le monde.

Pourtant, l’ampleur de l’utilisation de cette technologie n’est pas à la mesure de sa maturité. Comment expliquer qu’on n’ait pas plus recours à la séquestration ?

Actuellement, les freins sont surtout financiers. Capturer et séquestrer une tonne de CO2 coûte autour de 60-70 euros. Mais pour seulement 10 euros, vous pouvez acheter des certificats sur le marché de la communauté européenne qui vous permet d’émettre le même volume. Comme on n’arrive plus à baisser significativement le prix du captage et de séquestration du CO2, il faudra qu’il y ait soit une forte volonté politique, soit une augmentation du prix des certificats d’émissions.

Précisément, la volonté politique s’est exprimée, en Suisse notamment, avec l’arrêt programmé des centrales nucléaires. La séquestration pourrait-elle jouer un rôle pour faciliter la transition ?

En attendant que les énergies renouvelables puissent combler les lacunes, nous aurons une plage de temps où nous n’aurons pas suffisamment d’énergie indigène. On envisage donc d’utiliser les centrales thermiques à gaz pour produire de l’électricité, ce qui signifie plus d’émissions de CO2. La législation suisse exige que 100% de ces émissions soient compensées dont 70% en Suisse. On pourrait donc imaginer déployer les systèmes de captage et de séquestration de CO2 directement à côté des centrales thermiques à gaz, ce qui serait une solution efficace pour cette période transitoire.

Cette option est-elle sérieusement considérée par les autorités suisses ?

Pour l’instant, il n’y a pas de plan effectif pour avancer dans cette direction. Avec le soutien de l’Office Fédéral de l’Energie, on travaille actuellement sur la détermination des sites potentiels où développer un site pilote, afin de faire des tests en grandeur nature – 5 à 10’000 tonnes de CO2 par an – et démontrer la faisabilité en suisse. Mais on est loin de savoir comment et à quel rythme cela sera développé.

Au niveau technique, comment la technologie fonctionne-t-elle ?

Il y a trois étapes. Le CO2 doit d’abord être capturé à partir d’une source d’émission. Ensuite, il doit être concentré et transporté au site de stockage. Et ensuite vient l’étape de séquestration proprement dite. Pour cela, on profite d’une particularité du CO2: lorsqu’il est injecté à grande profondeur, avec des températures et pressions suffisamment élevées, il passe à un état dit supercritique. Dans cet état, il occupe 500 fois moins de volume que dans son état gazeux !

Cette technologie présente-t-elle des risques ?

Comme toute activité humaine, il y a des risques à court et long terme. Dans le premier cas c’est surtout lié à la pression d’injection du CO2. Par exemple l’activation de failles, à travers lesquelles il pourrait avoir des fuites, ou le déclenchement de petits séismes. On maitrise ces risques en comprenant bien les mécanismes physiques liés à ces processus, et en développant des outils de prédiction. A plus long terme, il y a le risque que le CO2 supercritique, fortement acide, déstabilise les couches géologiques qui garantissent l’étanchéité du stockage. Mais nous avons des solutions scientifiques pour éviter ces cas, au niveau de monitoring en temps réel, en dimensionnant convenablement les projets.

Ce sont d’ailleurs ces dernières thématiques qui font l’objet de l’essentiel de votre travail.

En effet.

Par exemple, on étudie l’impact du CO2 supercritique sur les roches-réservoirs dans lesquels on l’injecte, que ce soit au niveau de la perméabilité ou de la résistance du matériau. Ensuite on regarde aussi son impact sur le «cap-rock», soit la couche géologique qui garantit l’étanchéité. Dans les deux cas, on étudie comment les roches réagissent au contact avec un fluide acide. Nous sommes parmi les seules équipes au monde capables de faire ce travail en laboratoire. Pour ce faire, nous avons développé des équipements qui permettent de reproduire les véritables conditions qui règnent à des profondeurs allant jusqu’à 7 kilomètres. Dans le cadre d’un autre projet, on a développé des outils de prédiction et de dimensionnement des ouvrages liés à la séquestration de CO2. Ces outils nous permettent de prédire le comportement des roches sur plusieurs années suite à l’injection du gaz.

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Pastilleverte

“séquestrer” le CO2 ? Serait-ce un dangereus criminel, ou bien un élément indispensable à la vie végétale, donc à la Vie en général ? A tout prendre, et pour rester dans la ligne politiquement correcte du parti de la pensée unique obligatoire et sacro sainte, autant le “réutiliser” pour fabriquer par exemple… du carburant (liquide ou gazeux) Cette obsession anti-CO2 fera sans doute bien rire nos descendants scientifiques, si il y a encore des scientifiques à cette époque !

Lucio

je ne valide pas réchauffement climatique annoncé en 2100 et obtenu par calculs; par contre il y probablement un problème ne serait-ce qu’avec le méthane du permafrost et des hydrates. – sur le “consensus sur le refroidissement”: Christopher Moncton (politique), , – sur la valeur des augmentation de température:Richard Keen (scientifique et responsable station météo)Roy Spencer (scientifique)

Lucio

on peut très raisonnablement mettre en question le réchauffement climatique annoncé et obtenu par calcul sur des bases partielles et partiales; voir aussi le prix nobel de physique (Ivar Giaever’s speech at the Nobel Laureates meeting 1st July 2015), un régal.

enerc77

Le CO2 est réutilisable et pas seulement pour mettre en pression la bierre dans les futs ou au comptoir…. Au hasard: – dans toutes les boissons gazeuse, – dans des fermes de production d’algues pour engrais bio/carburant/produits cosmétiques – dans les serres pour augmenter le rendement – pour synthétiser du méthane avec de l’hydrogène renouvelable – dans les réacteurs à CO2 super critique pour les extractions (industrie des parfums, extration d’arômes, …) Et je suis sur que j’en oublie.

seb

Utiliser le CO2… Le CO2 pour les boisson gazeuse ne me semble pas être un marché à l’échelle des 32 milliards de tonnes de CO2 émises tous les ans… Je sais bien que le premier projet français propose cette utilisation, mais ce n’est pas multipliable. Pour les utilisations en production végétale, les besoins sont également faibles, et utiliser du CO2 purifié pour ça est inutile (ils récupèrent pour ça le CO2 issu des chaudières pour les serres). Si c’est pour produire de l’énergie (bio-carburants) il faudra m’expliquer l’intérêt de s’embêter à faire pousser des algues plutôt que de séquestrer le CO2 et utiliser des carburants traditionels… J’aurais la même réflexion sur la méthanation… Quel intérêt de fabriquer du méthane avec du CO2 d’origine fossile plutôt que d’enfouir le CO2 et utiliser du méthane fossile ? Reste la question de la capacité des cavités choisies à stocker le CO2 sur des durées de plusieurs millénaires… et là les avis divergent ! Sinon je suis toujours sidéré de voir le nombre de climato-septiques sur ce site… Pastille qui nous gratifie encore de son CO2 indispensable à la vie (je sais pas si il tient le même discours à un noyé : Allez, fais pas ta chochotte l’eau c’est indispensable à la vie !) Et, les gars, si vous croyez vraiment que le réchauffement climatique est une blague (sans déconner ils nous disent ça alors qu’on a pas eu une gelée depuis le début de l’hiver…), arrêtez de vous préocuper de l’énergie ! Le baril est à 36$, il devrait rester du mazout pour votre voiture jusqu’à votre mort alors le reste…

enerc77

Pour les sodas, j’aurais du faire le calcul avant 🙂 350 millions de litres de coca par jour à raison de 6g CO2 par litre litre en moyenne. Ca ne fait que 2100 tonnes de CO2/jour. C’est effectivement la moitié d’une centrale de 500 MW au gaz. Dsl. Pour l’utilisation du CO2 en culture d’algues ou hydrogénation pour faire du méthane, c’est juste pour lui donner une seconde vie en attendant que les moyens de stockage puissent couvrir nos besoins. Le problème n’est pas à l’échelle de la journée ou de la semaine, mais au niveau du stockage inter-saisonnier qui nécessite d’autres solutions telles que le stockage sous forme de méthane, de chaleur, stockage chimique …. Le mieux c’est évidement de ne plus émettre de CO2 anthroplogique. L’enfouissement du CO2 n’est pas LA solution vu que la production d’électricité ne représentait que 18,1% de la consommation finale d’énergie dans le monde en 2012. Les autres émissions telles que transport et chauffage domestique/résidentiel ne sont pas éligibles à ce type de séquestration. Cela montre bien qu’il faut attaquer ce problème sur tous les fronts: electricité + chauffage + transport + nourriture + déforestation.

Grisette

La température globale peut rester stable (1999 à 2014) ou diminuer (1960 à 1975) malgré l’augmentation de concentration du CO2 dans l’atmosphère. Moyenne sur cinq ans de la température globale entre 1960 et 2015 selon les quatre principaux organismes. Evolution ramenée à une même base. Augmentation de concentration du CO2 dans l’atmosphère à Mauna Loa. A noter que 1998 et 2015 sont des années exceptionnelles dues au phénomène El Niño, dont l’influence est mondiale. L’année la plus chaude est-elle 1998 ou 2015 ? Ne pas se limiter au son d’une seule cloche …

Grisette

L’image est ici : Cela ne passe pas pour une image en png alors que ça passe pour une image en jpg.

enerc77

Oui on a bien eu un plateau de 1960 à 1975, puis une forte hausse, puis un plateau de 2000 à 2010. Depuis 2010, ça repart à la hausse progressivement. Je suis d’accord sur 2015 avec l’anomalie El Nino. On a des températures de printemps depuis deux mois et on aura peut être un hiver prochain plus froid. Le climat a toujours changé. Mais si on regarde la courbe depuis 1960, on a bien pris 0,7°C en moyenne. Et si on enlève les années 1961-1964 particulièrement chaudes, la pente moyenne est vertigineuse. Il n’y a pas que la température qui compte. La variation du PH de l’eau de mer par dissolution du CO2 est bien plus lourde de conséquences avec sa menace sur la chaine alimentaire.

Grisette

Température globale entre 1850 et 2015 selon 1 à 4 organismes – moyenne 12 ans On voit bien une baisse de la température globale entre 1880 et 1910, ainsi qu’une autre entre 1945 et 1975. Raison pour laquelle on craignait le retour d’un “Petit âge de glace” au début des années 1970. Les scientifiques de l’époque nous tenaient alors le même discours sur le refroidissement que ceux d’aujourd’hui sur le réchauffement. Maintenant, la pente montante est la même entre 1910 et 1945 que celle entre 1975 et 2000. Alors, la teneur en CO2 de l’atmosphère a-t-elle baissé lorsque la température globale diminuait ?

bmd

Etant donné l’énormité des quantités à stocker, la perte d’énergie qui en résulte, le coût à la tonne de CO2 stocké, et l’opposition “populaire” qui ne manquera pas de se manifester si ces stockages se multiplient, il s’agit là d’une coûteuse rigolade. Si l’on veut vraiment réduire les émissions de CO2, et aussi anticiper sur le déclin inéluctable de la production des combustibles fossiles, mieux vaut suivre l’exemple de la France, mais aussi de la Suède, dont l’électricité, grâce à leur nucléaire, produit très peu de CO2 . De plus en plus de pays commencent à le réaliser, en tout cas ceux où le discours sur l’énergie n’est pas systématiquement préempté par l’idéologie !

Grisette

Il semble que l’été de 1420, ait été assez comparable à celui de 2003, en un peu moins brûlant. Tous les mois, de février à août 1420, furent de 2 à 3° plus chauds que lors des moyennes pourtant relativement tièdes du XXe siècle. En 1540 on a un très bel été chaud, le vin est tellement sucré qu’on en fait un apéritif. Mais les températures de ce 21e siècle sont très nettement plus souhaitables que celles souvent rencontrèes dans les siècles antérieurs. Par exemple, l’hiver 1709-1710 entraîna la mort de 600.000 personnes, sur une population de 20 millions d’habitants. Ce qui serait équivalent à près de deux millions de morts avec la population actuelle. Cependant, le climat peut beaucoup changer en quelques années. En 1704-1706, la canicule fait 200.000 morts. En 1719, la canicule fait 450.000 morts. Rien de nouveau sous le soleil.

seb

C’est ben vrai ça, t’as ben raison … Je sais pas pourquoi des scientifiques sont allés se geler à creuser la glace, à découvrir le thermomètre isotopique, reconstituer le climat grâce à ce thermomètre isotopique et les bulles d’air emprisonnées dans la glace, avant de faire valider leur travail par un concensus scientifique quasi unanime, alors qu’une soirée autour d’une bonne bouteille avec vous leur aurait permis de se rendre à l’évidence : “Tout ça c’est que des conneries des écolos “, “de toute façon, le temps ça change tout le temps”, “Pierrot tu nous en remet une c’est la mienne !”… Allez santé, mais pas des pieds, ha ha ha !

Grisette

C’est quand même la reprise du petit âge glaciaire entre 1812-15 et 1859, avec surtout une grosse fraîcheur entre 1812 et 1820 suivie d’une nouvelle poussée maximale des glaciers alpins, avec l’extension vers le sud des trajectoires des cyclones, fréquence accrue des tempêtes, même la calotte glaciaire de l’Arctique est en expansion. On se demande bien pourquoi les courbes de température que l’on trouve partout commencent en 1860 et pas en 1700 par exemple, alors que des reconstitutions des températures existent pour différentes régions du monde depuis plus longtemps encore. Depuis fin 1859/1860 nous sommes au point terminal, à la disparition du petit âge glaciaire dans les Alpes sûrement, en Scandinavie peut-être, dans l’ensemble de l’Europe et du monde, on peut en discuter. En tout cas les glaciers alpins sont bel et bien en débâcle progressive depuis 1860.