Energie : Éric Besson parle de sa visite au Kazakhstan

Le ministre chargé de l’Industrie, de l’Energie et de l’Economie numérique était en visite au Kazakhstan les 4 et 5 novembre ; Nucléaire, terres rares, photovoltaïque, pétrole et gaz… l’énergie a été au coeur de ses entretiens. Il a accepté, pour le BIP et ENERPRESSE, de faire le point sur les sujets abordés.

BIP. Vous avez beaucoup parlé d’énergie lors de ce voyage au Kazakhstan, comme vous l’avez récemment fait au Qatar. Et ce tandis que M. Lellouche [le secrétaire d’État au commerce extérieur] en a fait de même en Irak. Est-ce à dire que la France s’inquiète pour sa sécurité énergétique ?

Éric Besson. Nous n’avons pas d’inquiétude, mais à l’évidence le monde va avoir besoin de plus d’énergie. Les experts considèrent que la demande mondiale, malgré les efforts déployés en termes d’efficacité énergétique notamment dans les grands pays industrialisés, va être multipliée par deux d’ici à 2050. Or, ces experts le disent : en matière d’énergie, un trimestre équivaut à une décennie. Cela veut dire qu’en matière d’approvisionnement énergétique, il faut se préparer extrêmement vite.

Par ailleurs, à l’évidence aussi, la demande mondiale de gaz va s’accroître. Soit parce que c’est une énergie facile et la “plus propre” des énergies fossiles, soit parce que certains pays renoncent à ou diffèrent leur programme nucléaire. Dans ce cas, c’est le gaz – et dans une moindre mesure le charbon – qui va suppléer la production nucléaire.

Dans ces conditions tout est effectivement réuni pour que l’approvisionnement en hydrocarbures, notamment en gaz, soit une préoccupation légitime non seulement des Etats, mais aussi de l’Union Européenne.

Vous avez vu que l’Union européenne négocie pour accroître notre sécurité d’approvisionnement par de nouveaux gazoducs, passant par le corridor Sud, partant de la Caspienne et passant par le Caucase.

BIP. Le nucléaire a tenu une place importante lors de votre visite au Kazakhstan. Avec la signature d’un nouvel accord entre Areva et Kazatomprom, la société nationale nucléaire kazakhstanaise. Vous parlez de « consolidation » du partenariat existant…

Éric Besson.
Oui. Nous étions dans l’application de l’accord du 27 juin 2011 qui ouvre des perspectives de coopération large de l’amont à l’aval du cycle. Là, avec cet accord qui est une véritable consolidation du partenariat entreAreva et Kazatomprom, nous sommes clairement dans l’amont avec, premièrement, l’extraction du minerai d’uranium, 4 000 tonnes par an jusqu’en 2039, et sa valorisation par la fabrication de combustible susceptible d’approvisionner le marché asiatique. Notamment le marché chinois mais pas seulement. Nous verrons si dans l’amont du cycle, dans la formation ou dans l’aval, comme la gestion des déchets etc., d’autres pistes sont envisageables.

BIP. Outre cet accord, il y a eu aussi la signature d’un contrat d’achat de panneaux solaires, lesquels contribueront à produire l’électricité nécessaire à Katco, la joint-venture entre Areva et Kazatomprom. Quelle est l’importance de cet accord ?

Éric Besson.
Le photovoltaïque est visiblement une priorité pour le Kazakhstan. Et nous, nous voulons développer notre savoir-faire et notre filière. Là, il s’agit d’utiliser les technologies d’un certain nombre de PME françaises, que nous croyons adaptées aux conditions spécifiques d’ensoleillement du Kazakhstan. Vous savez combien le monde recèle d’opportunités en matière de photovoltaïque. Celles et ceux qui sauront en profiter le plus rapidement possible ont devant eux de belles perspectives de développement.

Ici, ce qui est intéressant, c’est que nous avons côté français la CEIS [Compagnie Européenne d’Intelligence Stratégique], qui agit comme facilitateur et fédérateur de PME françaises, et le CEA, qui amène son expertise en terme d’efficacité et de rendement ; et de l’autre le Kazakhstan, qui apporte du silicium, avec du minerai de qualité, pour être intégré aux panneaux.
Cela permet de créer une filière industrielle au Kazakhstan. Le projet a bénéficié du soutien financier du gouvernement français.

Aujourd’hui, Areva est la première entreprise à acheter les futurs panneaux et donc à rentabiliser la filière qui se met en place. C’est emblématique du partenariat entre Areva et le Kazakhstan.

BIP. Vous avez installé le comité de pilotage du laboratoire commun franco-kazakh sur les terres rares, associant Kazatomprom et côté français le BRGM [Bureau de Recherches Géologiques etMinières] et des partenaires industriels comme Areva, Rhodia et Eramet. A-t-on une idée précise de l’importance des réserves de terres rares du Kazakhstan ?

Éric Besson.
Une partie du travail consiste justement à évaluer ces réserves. Tous les tests qui ont été faits sur le sous-sol kazakh, tous les experts qui l’ont étudié, disent qu’il est extrêmement riche. Le Kazakhstan veut exploiter ses ressources, il connaît le marché actuel avec la Chine qui se trouve en position de quasi monopole, mais retient sa production. Et nous, Français et Européens, nous sommes trop dépendants d’un seul pays et savons que l’évolution de notre industrie va faire que nous allons demander de plus en plus de terres rares.

Ce qui veut dire que pour nous comme pour le Kazakhstan, cela ouvre des perspectives extrêmement riches. Le laboratoire se met en place, il va devoir expertiser, proposer des pistes d’exploitation, bâtir des business plan. Nous sommes au début d’un processus.

BIP. Côté pétrole, vous avez évoqué le gisement offshore de Kashagan. Total en possède 16,8 %. Quelles questions ont été abordées ? Avez-vous parlé de ce projet d’oléoduc entre le gisement et Aktau, d’où l’huile serait ensuite évacuée via la Mer Caspienne vers l’Ouest, et qui pourrait être construit par un consortium français conduit par Spie Capag ?

Éric Besson. Nous n’avons pas évoqué cet oléoduc. Ce qui a été abordé, mais là je ne peux pas entrer dans les détails, ce sont les discussions en cours sur les conditions de mise en oeuvre des accords qui nous lient et des investissements de Total. Nous avons parlé de ces investissements et de leur valorisation, ainsi que des dérogations nécessaires à la législation du Kazakhstan en matière de recrutement de main d’oeuvre étrangère spécifique.

BIP.
A-t-il été question de l’attribution à Total de nouveaux gisements ?
Éric Besson. Nous n’avons parlé que de Kashagan.

BIP. Vous avez souligné au début de cet entretien l’importance croissante du gaz. Il y en a beaucoup dans la région et Total comme GDF Suez ont des participations dans des gisements, au Kazakhstan ou de l’autre côté de la Caspienne, en Azerbaïdjan.

Éric Besson. Oui, j’ai dit très clairement aux autorités du Kazakhstan que les perspectives de développement dans le gaz nous intéressent. Et nous avons évoqué les différentes options possibles pour qu’un gazoduc, non pas concurrent des projets russes mais complémentaire, puisse être envisagé. J’en ai parlé, mais ensuite la négociation proprement dite est entre les mains de la Commission européenne.

BIP.
Nicolas Sarkozy avait proposé un partenariat stratégique au Kazakhstan lors de sa visite d’octobre 2009 à Astana. Quel bilan faites-vous de ce partenariat aujourd’hui ?

Éric Besson. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. La France est devenue le 4ème investisseur au Kazakhstan et nos échanges commerciaux croissent. Ils ont atteint les 3,5 milliards d’euros en 2010. En outre, ce partenariat traite de sujets majeurs. Le Kazakhstan veut valoriser ses grandes ressources et accéder à un certain nombre de technologies.

De notre côté, nous avons des préoccupations d’approvisionnement en uranium, pétrole, gaz etc. Nous voulons aussi favoriser l’émergence de nos filières industrielles et le Kazakhstan peut, à l’évidence, être un acheteur important.

Propos recueillis à Astana par notre correspondant en Eurasie.

            

Articles connexes

2 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
renewable

le voici occupé à essayer de créer une filière solaire au Kazakhstant chez notre bon pote dictateur fournisseur de minerai pour centrales nucléaires. Après avoir détruit la filière française faute de visibilité en sortie du (nécéssaire mais mal ciblé) moratoire. Quelle cohérence! Autre info, Besson vient d’annoncer son retrait de la vie politique après 2012 son patron risquant de passer à la trappe en 2012 et les sondages commandés par besson sur les criconscriptions possibles pour son recasement ayant été désastreux. mais surtout il veut passer dans le privé. AREVA ou EDF se feraient une joie de payer enfin leur porte-parole officiel, mais si la gauche passe ça va être difficile, du coup il lorgne sur le Foot (direction de club), ou il aura plus de chances de passer, entre requins… Ce quinquennat aura produit de drôle de personnages.

Steph

J’en rigolerais si ce triste personnage, incompetent et corrompu au possible, n’avait detruit 15 000 emplois dans le solaire francais. Et dire que fin 2010, on produisait autant de panneaux en France qu’il s’en installait, je tire simplement mon chapeau aux industriels qui survivent dans le contexte de concurrence exacerbe actuel.