Flying Whales vient d’obtenir un feu vert sans réserve de la commission d’enquête publique pour bâtir, sur 75 hectares de zones naturelles à Laruscade (Gironde), une usine d’assemblage destinée au dirigeable LCA60T, long de 200 mètres et conçu pour transporter 60 tonnes de fret. Le site, situé à quarante kilomètres au nord de Bordeaux, doit générer environ 300 emplois directs et servir de modèle à une implantation jumelle prévue au Québec.
La future chaîne d’assemblage culminera à 65 mètres pour une longueur de 265 mètres, paramètre qui en ferait le plus haut bâtiment industriel en activité sur le continent, selon l’entreprise. La ligne accueillera l’intégration finale des éléments du LCA60T ; elle abritera également les essais au sol et les vols de certification exigés par l’Agence européenne de la sécurité aérienne (EASA).
Toutefois, plusieurs élus écologistes régionaux brandissent le risque de disparition d’habitats humides et l’impact sur le vison d’Europe, espèce protégée. L’Autorité environnementale a rendu en 2023 puis en 2024 deux avis défavorables, évoquant « l’importance des atteintes aux milieux naturels ». Le groupe écologiste au Conseil régional stigmatise « la destruction irrémédiable d’environ soixante hectares d’habitats » proches de zones Natura 2000. L’enquête publique ouverte durant l’été a pourtant recueilli 1 315 observations, dont 62% favorables, d’après la préfecture.
L’entreprise chiffre l’investissement global à 450 millions d’euros ; 300 millions sont déjà sécurisés via des tours de table et des subventions. La Région Nouvelle-Aquitaine détient 23,7% du capital, tandis que l’État français et la province de Québec complètent le dispositif.
Le calendrier interne affiche des jalons serrés : démarrage du chantier en 2026, assemblage d’un premier prototype en 2027, lancement des opérations commerciales en 2029. Pour respecter ces échéances, Flying Whales devra obtenir dès l’automne un permis de construire formel, puis s’attaquer au recrutement d’ingénieurs, de techniciens composites et de spécialistes hydrogène pour la propulsion hybride envisagée.
Sur le plan industriel, le dirigeable vise des marchés difficiles d’accès pour le transport routier ou héliporté : éoliennes installées en altitude, grumes issues d’exploitations forestières, modules hospitaliers destinés à des régions isolées. L’entreprise avance un gain carbone d’environ 70% pour la livraison d’une pale d’éolienne par rapport à un convoi routier lourd.
À Laruscade, les élus locaux et les habitants qui sont favorables mettent en avant la diversification économique attendue. Les 300 emplois directs pourraient entraîner autant de postes indirects dans la logistique, la maintenance ou la formation, portant l’espoir de faire émerger une nouvelle filière aéronautique régionale. L’implantation prévoit également un centre de formation afin de limiter les déplacements domicile-travail et d’ancrer les compétences.
Reste la question du coût de l’énergie et de la disponibilité de l’hydrogène vert, indispensable à la propulsion hybride. L’entreprise assure avoir sécurisé des partenariats avec des producteurs locaux, mais n’a pas encore dévoilé les contrats. Des analystes rappellent qu’un dirigeable rigide de 200 mètres requiert une maintenance lourde, notamment sur l’enveloppe composite et les turbines électriques.
Le préfet doit désormais signer le permis de construire, étape réglementaire finale avant le lancement des travaux. Si aucun recours judiciaire ne retarde la procédure, la Gironde pourrait accueillir, dès 2026, un chantier hors normes. Flying Whales devra alors démontrer que la propulsion légère et lente d’un dirigeable peut, à nouveau, trouver sa place dans le transport de marchandises au XXIᵉ siècle.
Source : Flying-whales