Un visiteur venu des profondeurs de l’espace traverse actuellement notre système solaire, et il ne voyage pas les mains vides. L’objet interstellaire baptisé 3I/ATLAS transporte avec lui des molécules organiques complexes, véritables « briques élémentaires » du vivant. Les observations, réalisées grâce à de puissants télescopes, relancent une question vertigineuse : la vie sur Terre pourrait-elle avoir été ensemencée par de tels voyageurs célestes ?
Une soupe chimique révélée par la lumière
C’est grâce au réseau de radiotélescopes ALMA, situé dans le désert d’Atacama, que les astronomes ont pu « goûter » à distance la composition de 3I/ATLAS. En analysant la lumière émise par l’objet entre août et octobre 2025, ils ont détecté deux signatures chimiques distinctes : du méthanol et du cyanure d’hydrogène. Ces molécules ne sont pas anodines ; elles se forment habituellement sur des grains de poussière glacée dans le froid interstellaire et sont considérées comme des précurseurs essentiels à la chimie de la vie telle que nous la connaissons.
Le professeur d’astrophysique Avi Loeb note un détail concernant la comète. La proportion de méthanol par rapport au cyanure d’hydrogène est exceptionnellement élevée. Ce ratio dépasse celui de presque toutes les comètes connues de notre système solaire, à l’exception notable d’une comète atypique nommée C/2016 R2.
Ami ou ennemi ? La double nature des molécules
La présence de ces composés place les scientifiques face à un paradoxe. Comme le souligne Avi Loeb, il est prudent, lors d’un « rendez-vous à l’aveugle » avec un visiteur interstellaire, de se demander s’il s’agit d’un jardinier bienveillant ou d’un empoisonneur.
Le côté « Jardinier » (Le Méthanol) : Cette molécule est une pierre angulaire pour fabriquer des acides aminés et des sucres, comme le ribose qui compose notre ADN. Sur Terre, certains micro-organismes, les méthylotrophes, utilisent même le méthanol comme unique source d’énergie pour vivre. Il joue également un rôle protecteur chez les plantes, signalant les blessures et renforçant leur immunité.
Le côté « Sombre » (Le Cyanure d’hydrogène) : Tristement célèbre pour son utilisation comme arme chimique durant la Première Guerre mondiale par plusieurs nations, ce gaz reste un poison violent à haute dose. Pourtant, à faible concentration, la nature le réutilise brillamment. Il aide à la germination des graines et participe, lui aussi, à la formation de molécules organiques complexes nécessaires à la vie.

Le réveil de la comète à l’approche du Soleil
À mesure que 3I/ATLAS s’est approché de notre étoile ( passant de 2,6 à 1,7 fois la distance Terre-Soleil ) il s’est littéralement réveillé. La production de méthanol a augmenté de façon spectaculaire sous l’effet de la chaleur solaire.
Les observations ont montré une « machinerie » cométaire complexe : le cyanure d’hydrogène semble provenir directement du cœur solide de l’objet (le noyau), tandis que le méthanol se forme en partie dans le nuage de gaz qui l’entoure, parfois à plus de 250 kilomètres de la surface. Curieusement, le méthanol était plus abondant du côté exposé au Soleil, alors que le cyanure d’hydrogène y était plus rare.
Une graine de vie venue d’ailleurs ?
La prédominance du méthanol sur le cyanure suggère, selon l’astrophysicien, une nature plutôt « amicale » pour ce voyageur. Cette découverte alimente la théorie de la panspermie interstellaire, l’idée selon laquelle des objets comme 3I/ATLAS pourraient agir comme des vaisseaux naturels, transportant les ingrédients de la vie d’un système stellaire à un autre. Si 3I/ATLAS ne nous apporte pas la preuve définitive d’une vie extraterrestre, il nous confirme que les ingrédients nécessaires à son éclosion voyagent bel et bien entre les étoiles.











