La soie d’araignée artificielle : une innovation écologique inédite

La soie d'araignée artificielle : une innovation écologique inédite

Alors que le terme durabilité n’a jamais été autant d’actualité, une équipe de chercheurs japonais a réussi à créer un dispositif capable de produire de la soie d’araignée artificielle, imitant de près la production naturelle de ces arthropodes prédateurs. Cette innovation pourrait avoir un impact significatif sur plusieurs industries.

Une innovation inspirée de la nature

Dirigée par Keiji Numata du RIKEN Center for Sustainable Resource Science au Japon, en collaboration avec des collègues du RIKEN Pioneering Research Cluster, l’équipe a réussi à créer un dispositif qui produit de la soie d’araignée artificielle.

Cette soie reproduit de manière précise la structure moléculaire complexe de la soie naturelle, en imitant les divers changements chimiques et physiques qui se produisent naturellement dans la glande à soie d’une araignée. Cette étude a été publiée le 15 janvier dans la revue scientifique Nature Communications.

La soie d’Araneae, connue pour sa résistance, sa flexibilité et sa légèreté, possède une résistance à la traction comparable à celle de l’acier de même diamètre. De plus, elle est biocompatible, ce qui signifie qu’elle peut être employée dans des applications médicales, et biodégradable. La récupération à grande échelle de la soie d’araignée s’est avérée impraticable pour diverses raisons, laissant aux scientifiques le soin de développer une méthode pour la produire en laboratoire.

Le processus de production de la soie d’araignée

La soie d’araignée est une fibre de biopolymère composée de grandes protéines aux séquences hautement répétitives, appelées spidroïnes. Au sein des fibres de soie se trouvent des sous-structures moléculaires appelées feuillets bêta, qui doivent être correctement alignés pour que les fibres de soie aient leurs propriétés mécaniques uniques. Recréer cette architecture moléculaire complexe a dérouté les scientifiques pendant des années.

Plutôt que d’essayer de concevoir le processus à partir de zéro, les scientifiques de RIKEN ont adopté une approche de biomimétisme.

Comme l’explique Numata, « dans cette étude, nous avons tenté de reproduire la production naturelle de soie d’araignée en utilisant la microfluidique, qui implique l’écoulement et la manipulation de petites quantités de fluides à travers des canaux étroits. On pourrait dire que la glande à soie de l’araignée fonctionne comme une sorte de dispositif microfluidique naturel ».

Un dispositif innovant pour la production de soie

Le dispositif développé par les chercheurs ressemble à une petite boîte rectangulaire avec de minuscules canaux gravés à l’intérieur. Une solution précurseur de spidroïne est placée à une extrémité et est ensuite tirée vers l’autre extrémité par une pression négative.

Au fur et à mesure que les spidroïnes traversent les canaux microfluidiques, elles sont exposées à des changements précis de l’environnement chimique et physique, rendus possibles par la conception du système microfluidique. Dans les conditions appropriées, les protéines s’auto-assemblent en fibres de soie avec leur structure complexe caractéristique.

Les chercheurs ont expérimenté pour trouver ces conditions correctes, et ont finalement réussi à optimiser les interactions entre les différentes régions du système microfluidique. Entre autres choses, ils ont découvert que l’utilisation de la force pour pousser les protéines à travers ne fonctionnait pas ; ce n’est que lorsqu’ils ont utilisé une pression négative pour tirer la solution de spidroïne que des fibres de soie continues avec l’alignement caractéristique des feuillets bêta ont pu être assemblées.

Les bénéfices potentiels de cette innovation

La capacité à produire artificiellement des fibres de soie en utilisant cette méthode pourrait offrir de nombreux avantages. Non seulement cela pourrait aider à réduire l’impact négatif que la fabrication textile actuelle a sur l’environnement, mais la nature biodégradable et biocompatible de la soie d’araignée la rend idéale pour des applications biomédicales, telles que les sutures et les ligaments artificiels.

« Idéalement, nous voulons avoir un impact réel », déclare Numata. « Pour cela, nous devrons augmenter notre méthodologie de production de fibres et en faire un processus continu. Nous évaluerons également la qualité de notre soie d’araignée artificielle en utilisant plusieurs mesures et apporterons d’autres améliorations à partir de là ».

Légende illustration : Le dispositif microfluidique. La solution de spidroïne précurseur est placée à une extrémité, puis tirée vers l’autre extrémité au moyen d’une pression négative. En circulant dans les canaux microfluidiques, les spidroïnes sont exposées à des changements précis de l’environnement chimique et physique et s’auto-assemblent en fibres de soie. Crédit : Riken

Article : “Replicating shear-mediated self-assembly of spider silk through microfluidics” – DOI: s41467-024-44733-1

[ Rédaction ]

            

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