La gestion du dioxyde de carbone (CO2) représente une préoccupation majeure pour les scientifiques à travers le monde. En quête de solutions efficaces, la recherche se concentre sur des technologies capables de capturer et de séquestrer ce gaz nocif. Les experts soulignent l’urgence de développer des matériaux qui non seulement réduisent les émissions mais permettent également leur capture directe dans l’atmosphère. Cette quête de matériaux innovants ouvre des perspectives nouvelles dans la lutte contre le changement climatique.
Les experts en climatologie ont établi un consensus : pour aborder la crise climatique, il ne suffit pas de réduire les émissions de CO2. Il est également impératif de filtrer directement ce gaz des airs et des gaz d’échappement. En ce sens, les scientifiques travaillent sur des technologies de ‘Capture Directe de l’Air’ et recherchent des matériaux susceptibles de lier efficacement les molécules de CO2 pour ensuite les libérer sous une forme concentrée, permettant ainsi leur stockage souterrain.
Une synthèse réussie du matériau COF-999
Dans la revue Nature, une équipe de recherche internationale, comprenant Joachim Sauer de l’Université Humboldt de Berlin (HU), a présenté la synthèse chimique d’un matériau spécial, le COF-999. Ce travail a été réalisé par Zihui Zhou, doctorant sous la direction d’Omar Yaghi à l’Université de Californie à Berkeley. Ce matériau, un composé organique appelé Covalent Organic Framework (COF), contient des polyamines dans ses pores qui adsorbent les molécules de dioxyde de carbone.
«Il est remarquable que ce matériau possède non seulement une capacité d’absorption très élevée pour le CO2, mais que cette capacité soit même plusieurs fois supérieure en présence d’eau. L’eau, toujours présente dans l’air ambiant et les gaz d’échappement, ne perturbe pas ici mais a un effet extrêmement positif,» a déclaré Joachim Sauer, chimiste quantique réputé et chercheur principal au département de chimie de l’Université Humboldt.
Comprendre le fonctionnement de COF-999
En tant que membre de l’équipe de recherche, Joachim Sauer s’est chargé de l’élucidation quantique du fonctionnement du matériau au niveau atomique. Les résultats expérimentaux ne permettaient pas de déterminer avec précision l’emplacement des groupes amines dans la structure poreuse où les molécules de CO2 s’accrochent. Il a donc été nécessaire de développer un modèle structural conforme aux observations expérimentales. Ensuite, les chercheurs ont calculé comment le CO2 se lie aux divers groupes amines dans différentes positions et comment cette liaison varie en présence de molécules d’eau (H2O).
Joachim Sauer a expliqué : «Nos calculs quantiques sont indispensables car la compréhension de leur fonctionnement au niveau atomique constitue la base pour le développement de matériaux encore meilleurs. Nous travaillons actuellement sur cela avec nos partenaires de l’Université de Californie à Berkeley et de l’Université de Chicago.»
Légende illustration : Modèle du composé à structure organique covalente (COF), sur lequel est basé le matériau nouvellement synthétisé COF-999. Les polyamines (bleu), liées à la structure dans les pores, facilitent l’adsorption des molécules de dioxyde de carbone (bleu clair-orange). À l’avenir, ce matériau pourrait améliorer les technologies de « capture directe de l’air » qui filtrent le dioxyde de carbone de l’air et des gaz d’échappement. Image : Zihui Zhou, UC Berkeley
Article : Z.Zhou, T. Ma, H. Zhang, S. Chheda, H. Li, K. Wang, S. Ehrling, R. Giovine, C. Li, A.H. Alawadhi, M.M. Abduljawad, M.O. Alawad, L. Gagliardi, J. Sauer,* O.M. Yaghi,* Carbon dioxide capture from open air using covalent organic frameworks , Nature 635 (2024) 96-101