Pour la toute première fois, des astronomes ont observé un visiteur interstellaire dans le domaine des rayons X, qui a révélé une lueur invisible à l’œil nu et qui s’étend sur des centaines de milliers de kilomètres. Le satellite japonais XRISM a en effet capturé fin novembre 2025 une aura lumineuse autour de 3I/ATLAS, un corps céleste qui traverse actuellement notre système solaire après un voyage de plusieurs millions d’années à travers l’espace.
Dix-sept heures d’observation minutieuse
Entre le 26 et le 28 novembre 2025, le satellite de l’agence spatiale japonaise JAXA a surveillé 3I/ATLAS pendant dix-sept heures. C’est comme si un photographe devrait suivre un sujet en mouvement en continu. Les équipes au sol ont dû réajuster la position du satellite toutes les trois heures, soit quatorze fois au total, pour garder l’objet au centre de leur viseur. L’objet dérivait lentement à travers le ciel, dans la constellation de la Vierge, ce qui semble avoir compliqué la tâche des observateurs.
L’observation avait lieu un mois après le passage de 3I/ATLAS au plus près du Soleil, survenu le 29 octobre 2025. Pendant la période du périhélie, l’objet était invisible depuis la Terre, caché derrière notre étoile. Comme le rapporte l’astrophysicien Avi Loeb dans son analyse publiée début décembre : « XRISM ne peut observer le ciel qu’à une distance supérieure à 60 degrés du Soleil, et son observation de 3I/ATLAS a donc été programmée en conséquence. ». Malgré un écart d’un mois, l’objet brillait encore assez pour être détecté dans les rayons X.
Quand le vent solaire rencontre un nuage de gaz
Les images révèlent une lueur qui s’étend jusqu’à 400 000 kilomètres autour du noyau de 3I/ATLAS, soit plus que la distance Terre-Lune. Selon les observations rapportées par Avi Loeb, « Une analyse préliminaire des images centrées sur 3I/ATLAS a révélé une faible lueur de rayons X s’étendant sur une échelle angulaire de 5 minutes d’arc. ». L’enveloppe lumineuse correspond au panache de gaz que d’autres télescopes, comme James Webb, avaient repéré autour de l’objet quelques mois plus tôt.

D’où vient la lumière en rayons X ? D’après les résultats obtenus par les chercheurs du JAXA, le spectre obtenu par Xtend dans la région centrale de la comète apporte certains indices. Des composants d’émission excédentaires associées au carbone, à l’azote et à l’oxygène apparaissent de manière difficilement explicable par le seul bruit de fond habituel, qu’il s’agisse du rayonnement galactique ou des émissions atmosphériques terrestres. La signature spectrale pourrait ainsi trahir le mécanisme physique à l’œuvre. En effet, lorsque le gaz cométaire, arraché par la chaleur solaire à la surface glacée de l’objet, rencontre le flux énergétique de particules chargées du vent solaire, des réactions d’échange de charge se produisent et génèrent des émissions caractéristiques.
Un phénomène déjà connu chez les comètes
Les scientifiques ne découvrent pas totalement le mécanisme. Dès 1996, ils ont observé des rayons X autour de la comète Hyakutake, un corps du système solaire. Depuis, d’autres comètes ont révélé le même comportement, mais jamais un objet venu d’une autre étoile n’avait été scruté de la sorte.
Avant les observations du satellite japonais, les astronomes connaissaient déjà 3I/ATLAS grâce à d’autres types de lumière tels que l’ultraviolette, le visible (celle que voient nos yeux), l’infrarouge, et même les ondes radio. Mais les rayons X manquaient au tableau. Avec sa taille importante et son imposant nuage de gaz, 3I/ATLAS représentait la cible idéale pour tenter une première détection dans un domaine de lumière particulier.
Que nous réserve l’avenir ?
L’équipe de XRISM poursuit actuellement l’affinement du traitement et de l’analyse des données afin de dévoiler plus précisément l’activité de cette comète interstellaire et la nature de son interaction avec le vent solaire. D’autres équipes scientifiques vont probablement éplucher les données pour y chercher des détails inhabituels, des indices qui différencieraient les objets nés dans notre système solaire de ceux formés autour d’autres étoiles.
La grande question reste posée. Existe-t-il des différences fondamentales entre les objets de notre voisinage cosmique et ceux venus d’ailleurs ? Depuis ‘Oumuamua en 2017, premier visiteur interstellaire identifié, suivi de Borisov en 2019 puis de 3I/ATLAS, chaque nouveau passage enrichit notre compréhension de la diversité des processus qui façonnent planètes et comètes à travers la galaxie. Les rayons X ajoutent une pièce importante au puzzle cosmique.
Sources : JAXA / Avi Loeb












