Le terbium : un nouveau “Couteau Suisse” pour la médecine nucléaire

La première étude in vivo de 4 radio-isotopes du terbium, pertinents d’un point de vue clinique, montre que ces isotopes permettent une excellente visualisation des tumeurs et ont une très bonne efficacité thérapeutique.

Ils ont été produits à l’Institut Paul Scherrer (PSI), à l’installation ISOLDE du CERN et à l’Institut Laue-Langevin (ILL).

Une collaboration de chercheurs des Instituts Paul Scherrer, l’Institut Laue-Langevin et de l’installation ISOLDE du CERN et de Laue-Langevin, a publié les résultats d’une étude préclinique pour une série de radiopharmaceutiques récemment développés qui ciblent les tumeurs. Les résultats, publiés dans le Journal of Nuclear Medicine, sont une découverte pour ce groupe de spécialistes en médecine nucléaire et de radiochimistes. Ils démontrent leur potentiel pour produire une nouvelle génération de radio-isotopes dotés d’excellentes propriétés pour le diagnostic et le traitement du cancer.

Les radiopharmaceutiques qui ciblent des récepteurs sont composés d’un isotope radioactif fixé à un vecteur biologique qui les délivre de manière sélective aux cellules tumorales. Ils sont utilisés de deux manières.

Par l’Imagerie en Médecine Nucléaire – elle repose sur l’injection dans le réseau sanguin du patient d’un radiopharmaceutique qui sert de marqueur et qui émet des rayons gamma ou des positons. Une fois fixé à la cible (par exemple une tumeur), les émissions de rayons gamma du radio-isotope ou l’annihilation des positons permet le diagnostic et, potentiellement, de déterminer la gravité d’un certain nombre de maladies, dont de nombreux types de cancers.

Par radionucléides pour les traitements ciblés – ils utilisent des radio-isotopes émettant des particules à courte portée capables de détruire les cellules cancéreuses.

Les radio-isotopes traditionnels (comme l’iode-131 et l’yttrium -90), employés dans la première génération de radiopharmaceutiques, ne présentent pas les propriétés nucléaires idéales pour toutes les applications thérapeutiques. Par conséquent les développements plus récents de radiopharmaceutiques font appel à des radio-isotopes émergents, qui possèdent des propriétés de désintégration plus favorables, comme le lutétium-177 qui réduit les dommages collatéraux aux tissus sains et la nécessité d’isoler le patient durant le traitement.

La situation idéale consisterait à sélectionner les radio-isotopes les plus appropriés à un stade précoce du développement du médicament, ce qui permettrait une optimisation globale du radiopharmaceutique. Cependant, ces radio-isotopes innovants sont rarement disponibles dans le commerce, et les méthodes de production dédiées sont souvent inexistantes.
Récemment, une méthode pour une production à large échelle de l’un de ces radio-isotopes de nouvelle génération, le terbium-161, a été développée par des radiochimistes de l’Université Technique de Munich et de l’Institut Paul Scherrer de Villingen, qui ont travaillé avec des échantillons irradiés à l’ILL à Grenoble et au FRM2. Ils ont réussi à produire cet isotope en qualité et en quantité nécessaires pour des applications cliniques.

Dans l’étude actuelle, le terbium 161 a été complété par trois autres isotopes du terbium, produits par des réactions provoquées par des protons à haute énergie à ISOLDE-CERN. Ensemble, ces isotopes ont le potentiel à la fois de diagnostiquer et de traiter le cancer. Le fait d’avoir ce qu’on appelle des "paires assorties" d’isotopes (basées sur le même élément chimique) est particulièrement important et ouvre de nouvelles perspectives de traitement personnalisé, spécifique à chaque patient, afin d’augmenter l’efficacité et de réduire les effets secondaires.

Le terbium (Tb) est le seul élément dans le tableau périodique qui offre non seulement une "paire assortie" mais également 4 radio-isotopes pertinents d’un point de vue clinique et possédant des caractéristiques complémentaires de désintégration nucléaire, qui pourraient être utilisées dans toute la gamme des procédures en médecine nucléaire. Ainsi, le terbium peut jouer le rôle de “Couteau Suisse de la médecine nucléaire”, pour des études fondamentales des nouveaux radiopharmaceutiques et pour des comparaisons détaillées d’options thérapeutiques ciblées.

Les essais

Dans un nouvel article commun, des scientifiques du PSI, de l’ILL et du CERN ont présenté les résultats de la première étude préclinique détaillée de cette nouvelle gamme de radiopharmaceutiques à base de radio-isotopes de terbium. Les radio-isotopes ont été combinés avec un vecteur biologique nouvellement développé appelé "cm09", puis administrés à des souris porteuses de tumeurs. Avec les isotopes d’imagerie, les scientifiques ont appliqué deux techniques de diagnostic pour étudier leur absorption par les cellules cancéreuses. La tomographie par émission de positons (TEP/PET) et la tomographie par émission monophotonique (TEMP/SPECT) ont été appliquées aux souris 24 heures après l’injection de terbium-152, de terbium-155 et de terbium-161, respectivement. Le terbium-161 et le terbium-149 ont été étudiés pour examiner leur efficacité thérapeutique, en comparant la croissance des tumeurs et les taux de survie des souris soumises au traitement à ceux d’un groupe de contrôle non traité.

Les constatations clés

• Les examens PET/CT et SPECT/CT, qui utilisent à la fois les isotopes de diagnostic, le terbium-152 et le terbium-155, et l’isotope thérapeutique émettant des rayons gamma, le terbium-161, ont fourni une excellente visualisation de la tumeur 24 heures après l’injection.

• Les deux isotopes thérapeutiques ont montré une inhibition significative de la croissance tumorale chez les souris, avec pour résultat un retard marqué de la croissance tumorale ou même une rémission complète. En particulier, la thérapie avec du terbium-161 a permis une rémission complète dans 80% des cas.

La performance du terbium-161 est particulièrement encourageante, d’autant que les précédents travaux réalisés à la TU Munich, au PSI et à l’ILL, et publiés en 2011, ont confirmé la possibilité de produire des quantités suffisantes de cet isotope et d’une qualité adaptée pour des applications cliniques de routine.

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Screugneugneu

Mais quel rapport avec l’énergie ?