Le conteneur en composite d’AELER, une start-up de l’EPFL, assure un transport optimisé à tous les points de vue : place, suivi, isolation et solidité ainsi qu’une diminution des émissions de CO2. Plus d’une soixantaine de ces conteneurs d’un nouveau genre voguent sur les mers du globe, un chiffre que la scale-up entend décupler l’année prochaine.
Cela fait plus d’un demi-siècle que des conteneurs multicolores sillonnent les océans sur d’imposants cargos. Un moyen de transport économique et standardisé dont le commerce international ne pourrait se passer puisque 80% des marchandises y transitent. Depuis moins d’une dizaine d’années, l’IOT a fait son apparition pour limiter les pertes financières liées aux vols, aux pertes ou encore aux denrées, qui arrivent avariées au destinataire.
AELER, start-up de l’EPFL, va plus loin et repense entièrement ces parallélépipèdes de métal. Si les dimensions des conteneurs de la jeune entreprise restent standards afin de coller aux normes internationales, leur enveloppe lisse cache une structure optimisée en matière de place, d’isolation et de solidité. Des capteurs intégrés permettent d’assurer le suivi et de connaitre les conditions de transport en direct grâce à une application, mais aussi d’optimiser la gestion de la flotte.
Un premier tour de financement a assuré à la scale-up un montant de 7,5 millions de francs et elle prévoit une nouvelle levée de fonds prochainement. Plus d’une soixantaine de ces conteneurs de nouvelle génération voguent déjà sur les océans. Un chiffre que les responsables de la scale-up entendent décupler en 2023.
Des parois plus solides et plus isolantes
Entrepreneur dans l’âme, David Baur, l’un des cofondateurs était convaincu depuis longtemps que ces coffres de métal pouvaient être très largement optimisés. Dès son travail de diplôme à l’EPFL , il a commencé par élaborer et tester, au Laboratoire de mise en œuvre des composites à haute performance (Faculté STI), une carcasse de fibre de verre et de résine.
« Lorsqu’il est venu me voir, j’étais dubitative, sourit Véronique Michaud, responsable du laboratoire. Mais sa motivation a su me convaincre et parfois je dis oui à des projets un peu fous au premier abord ». Très motivé, le futur entrepreneur a revu entièrement la structure pour obtenir des parois plus solides tout en étant beaucoup plus isolantes. Alors que la structure crénelée des conteneurs métalliques assure leur rigidité, les « Unit One » comptent sur la fibre de verre et la résine dont sont constituées leurs parois. Un procédé qui permet un important gain de place et de poids : 11 % de fret en plus que dans un conteneur frigorifique classique, ou 17 % de plus lorsqu’il s’agit de transport de liquide.
« Pour ce dernier notre structure résistante évite également que le conteneur enfle sous la pression », souligne David Baur. « Nos longues discussions concernant le matériau ont porté leurs fruits. C’est gratifiant de voir ce que ces entrepreneurs en ont fait », souligne la professeure en tapotant l’imposante structure.
L’humidité fait parfois perdre des centaines de milliers de francs, notamment dans le transport de produits pharmaceutiques
David Baur, cofondateur de la start-up AELER
Le consommateur y pense rarement, mais la chaleur peut parfois être intense dans ces masses de métal exposées de longues heures au soleil puis chuter rapidement la nuit venue. Ces variations intenses de température vont jusqu’à créer à l’intérieur une humidité ruisselante qui nuit très souvent à la conservation des denrées. « Cette humidité fait parfois perdre des centaines de milliers de francs, notamment dans le transport de produits pharmaceutiques », souligne David Baur. Un problème très nettement amoindri dans les conteneurs de la scale-up, par l’isolation passive que ceux-ci apportent.
Grâce à ses parois lisses plus aérodynamiques et surtout au nombre moins important de conteneurs nécessaires à transporter la même quantité de marchandise, la scale-up a calculé une diminution de 20% des émissions de CO2 pour le transport maritime et de 4% concernant la quantité de fuel lorsqu’ils sont chargés sur un camion.
De plain-pied dans la logtech
Depuis plusieurs années maintenant, la technologie transforme la logistique, donnant naissance au néologisme « logtech ». Là encore les cofondateurs ont perçu une grande marge pour l’optimisation. « Nos systèmes embarqués sont uniques dans l’industrie car ils monitorent aussi ce qui se passe à l’intérieur du conteneur », note David Baur. Ils ouvrent de nouvelles possibilités de connectivité, d’automatisation et de securité. Les systèmes d’intelligence artificielle permettent de donner un sens à la grande quantité d’informations emmagasinée afin de prendre ensuite des décisions plus rapides et mieux informées concernant l’optimisation des trajets des conteneurs. Un système qui se traduit en intérêt financier et écologique. Et une plateforme qui permet de suivre les données enregistrées par les divers capteurs ainsi qu’un autre outil de management de sa flotte de conteneurs.
Les avantages de ces nouveaux conteneurs, dont la fabrication est plus onéreuse que leurs homologues de métal, sont particulièrement importants pour diverses gammes de produits, dont les médicaments, les liquides, les produits de luxe ou de beauté. Les Unit One de la jeune entreprise fondée en 2018 sont prêts à grignoter rapidement une part importante des millions de conteneurs actuellement en service sur les mers du globe. Ils sont présents dans tous les importants salons de transport maritime cet automne. Le timing semble parfait selon les cofondateurs puisque « le marché est désormais prêt au changement ».
Auteur: Cécilia Carron
Source: EPFL / Crédit image : © 2022 Alain Herzog