Les risques induits à la production de biocarburants

Avec la demande globale en énergie, les biocarburants s’annoncent comme une alternative séduisante aux carburants fossiles, mais cela ne va pas sans inconvénients indiquent des chercheurs.

Les cultures destinées aux biocarburants seront indirectement une cause substantielle d’émissions de gaz à effet de serre si les agriculteurs déboisent et utilisent plus d’engrais selon une nouvelle étude. Et les règles actuelles d’application du Protocole de Kyoto et de bourse du carbone ne prennent pas aussi précisément en compte les émissions dans l’atmosphère du carbone dues à la production de biocarburant selon un article Policy Forum publié dans le même numéro de Science.

Dans la première étude, Jerry Melillo (en photo ci-dessus) et ses collègues ont eu recours à un modèle simulant les changements économiques et environnementaux pour prédire les effets indirects, liés à l’utilisation des terres, causés par les cultures de biocarburant cellulosique. Ceux-ci correspondent à des plantes ligneuses ou herbacées qui ont récemment été jugées comme étant plus avantageux que le maïs ou le soja, notamment parce qu’elles ne requièrent pas d’engrais et ne sont pas affectées par les marchés de l’agroalimentaire.

Le problème est qu’il n’existe qu’une quantité limitée de terres où l’on peut faire de nouvelles cultures. Mellilo et ses collègues rapportent maintenant que si les cultures destinées aux biocarburants remplacent celles pour l’agroalimentaire, le déboisement pour avoir de nouvelles surfaces agricoles libèrera plus de carbone du sol que là où les cultures de biocarburants seront faites. Et le recours aux engrais pour développer ces nouvelles cultures sera une source importante de protoxyde d’azote, une molécule bien plus efficace que le dioxyde de carbone pour retenir la chaleur. « Une politique globale des émissions de gaz à effet de serre qui protège les forêts et encourage une meilleure utilisation des engrais azotés peut réduire de façon spectaculaire les émissions associées à la production des biocarburants » écrivent les auteurs.

Dans leur article Policy Forum, Timothy Searchinger et ses collègues préviennent que les règles d’application du Protocole de Kyoto et de bourse du carbone contiennent une erreur « de contribution » majeure mais réparable à propos des bioénergies. Et ils précisent que si elle n’est pas corrigée, elle compromettra largement les objectifs de réduction des gaz à effet de serre. En effet, ces règles ne comptabilisent pas les émissions de dioxyde de carbone produites par la combustion des biocarburants puisque celle-ci ne fait que libérer le carbone initialement fixé par les plantes. Mais ces cultures induisent aussi la libération de carbone dans l’atmosphère par des voies indirectes telles que la destruction des forêts. Cette erreur, où les bioénergies sont considérées comme « neutres » du point de vue du carbone alors que ce n’est pas le cas pourrait, si elle est reproduite globalement fortement, inciter aux déboisements quand les objectifs de réduction des émissions se tendront.

[Credit photo : mbl.edu]
Article n°18 : « Indirect Emissions from Biofuels: How Important? » par J.M. Melillo, D.W. Kicklighter, T.W. Cronin, B.S. Felzer du Marine Biological Laboratory à Woods Hole, MA ; J.M. Reilly, A.C. Gurgel, T.W. Cronin, S. Paltsev, A.P. Sokolov, C.A. Schlosser du Massachusetts Institute of Technology à Cambridge, MA ; A.C. Gurgel de l’Université de Sao Paulo à Ribeiro Preto, Brésil ; B.S. Felzer de l’Université Lehigh à Bethlehem, PA.

Article n°1 : « Fixing a Critical Climate Accounting Error » par T. Searchinger, M. Oppenheimer de l’Université de Princeton à Princeton, NJ ; S.P. Hamburg de l’Environmental Defense Fund à Boston, MA ; R.N. Lubowski de l’Environmental Defense Fund à Washington, DC ; J. Melillo du Marine Biological Laboratory à Woods Hole, MA ; W. Chameides de l’Université Duke à Durham, NC ; P. Havlik, M. Obersteiner de l’International Institute for Applied Systems Analysis à Laxenburg, Autriche ; D.M. Kammen de l’Université de Californie, Berkeley à Berkeley, CA ; G.E. Likens, W.H. Schlesinger du Cary Institute of Ecosystem Studies à Millbrook, NY ; P. Robertson de la Michigan State University à East Lansing, MI ; G.D. Tilman de l’Université du Minnesota à St. Paul, MN.

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Pastilleverte

merci pour le CO2 et protoxyde d’azote, et lpour les Hommes ? eux qui subissent des crises alimentaires cause développement des agro carburants développés par des “bonnes âmes” “pour la bonne cause”, bien sûr (réduire les émissions de GES), et donc en se f…. complètement des copnséquences humaines immédiates; Ce rapport semblerait contredire un rapport de l’Ademe qui présente des bilans carbone positifs pour les agrocarburants, même de 1° génération. Soit il y a des tricheurs, soit il ya des incompétents, mais je ne sais pas où (“on ne nous dit pas tout”….), A priori, les”vrais” biocarburants à base d’algues ou de tout autre élément qu’on peut élever “hors sol”, sans consommer d’eau (recyclage)… et en les nourissant de CO2 (une utilisation intelligente de la capture du CO2) devraient oncentrer sur eux les moyens de recherche et financiers pour la révolution énergétique “liquide” post fossile. Quelques progrès restent à faire, dans l’industrialisation et le prix de revient!!!