Les progrès dans la mesure des champs magnétiques microscopiques élargissent le champ des possibilités pour le diagnostic et le traitement médical. Une équipe de chercheurs allemands a mis au point une autre approche pour la mesure précise des champs magnétiques : la magnétométrie à seuil laser. Leur technique pourrait transformer la détection des signaux biomagnétiques du cerveau et du cœur, offrant ainsi de nouvelles opportunités pour la médecine moderne.
La magnétométrie à seuil laser (LTM) représente une approche novatrice pour mesurer des champs magnétiques extrêmement faibles, de l’ordre du femtotesla (fT) au picotesla (pT). Cette méthode se distingue par sa capacité à effectuer des mesures avec une grande plage dynamique, sans nécessiter la suppression des champs magnétiques ambiants.
Les capteurs quantiques basés sur les centres azote-lacune (NV) dans le diamant sont déjà largement utilisés pour des mesures précises de champs magnétiques à température ambiante. La LTM vient compléter ces technologies existantes en offrant une sensibilité accrue et une plus grande flexibilité d’utilisation.
Le concept fondamental de la LTM repose sur le développement d’un laser à partir de centres NV. La lumière laser, sensible aux champs magnétiques, fournit des informations précises sur l’intensité et la direction d’un champ magnétique. Le seuil laser, point où le laser commence ou cesse d’émettre de la lumière, joue un rôle essentiel dans cette technique.
Dr Jan Jeske, chercheur dans le domaine de la technologie des capteurs quantiques au Fraunhofer IAF, explique : «Les champs magnétiques près du seuil laser ont un effet très fort sur le signal, ce qui permet leur mesure très précise à ce point». Il a ajouté que comparés à la lumière fluorescente, les signaux laser peuvent être mesurés avec une plus grande précision et sur une plage dynamique plus large.
En 2022, la première amplification de lumière dépendante du champ magnétique des centres NV a été démontrée par les chercheurs du Fraunhofer IAF. Cependant, en raison de la source laser externe, le seuil laser des centres NV n’avait pas encore pu être atteint.
Dans leurs derniers travaux, l’équipe a franchi une étape décisive. Le diamant NV a été combiné avec un second milieu laser, une diode laser pour une amplification supplémentaire de la lumière, dans un résonateur optique. Cette configuration a permis la démonstration du seuil laser pour la première fois : selon l’intensité du pompage des centres NV, le système laser s’allumait ou s’éteignait.
L’importance de cette avancée est soulignée par Dr Jeske : «Les résultats représentent une avancée majeure pour le développement de la magnétométrie à seuil laser. Sur cette base, des capteurs avec jusqu’à 100% de contraste, des signaux lumineux forts et une large gamme de forces de champ magnétique mesurables pourront être réalisés à l’avenir».
Ces travaux s’inscrivent dans le cadre du projet phare «Magnétomètre à seuil laser pour les interfaces de communication neuronale», ou NeuroQ, financé par le ministère fédéral allemand de l’Éducation et de la Recherche (BMBF). L’équipe du projet NeuroQ travaille actuellement au développement du système laser innovant à base de diamant NV, qui fait l’objet d’une demande de brevet, et à l’augmentation de sa sensibilité.
Les applications potentielles de cette technologie dans le domaine médical sont nombreuses. La détection précoce de maladies neurologiques et l’amélioration des techniques d’imagerie cérébrale font partie des domaines qui pourraient bénéficier de ces avancées. La magnétométrie à seuil laser ouvre ainsi de nouvelles possibilités pour la recherche médicale et le diagnostic.
Légende illustration : L’équipe de recherche du Fraunhofer IAF a réussi à combiner deux milieux actifs, un diamant NV et une diode laser, dans un résonateur optique et à démontrer ainsi pour la première fois le seuil laser. © Fraunhofer IAF
Article : ‘Dual-media laser system: nitrogen vacancy diamond and red semiconductor laser’ / ( 10.1126/sciadv.adj3933 ) – Fraunhofer Institute for Applied Solid State Physics – Publication dans la revue Science Advances