Un phénomène extraordinaire vient d’être observé dans un laboratoire américain : des particules qui, selon leur direction de déplacement, peuvent tantôt posséder une masse, tantôt n’en avoir aucune. Une découverte qui rappelle le comportement d’un train passant d’une voie express à une voie secondaire.
Dans un cristal de ZrSiS, un semi-métal argenté, une équipe internationale dirigée par des chercheurs de Penn State et Columbia University a observé un phénomène prédit il y a 16 ans : les fermions semi-Dirac. À l’image d’un danseur changeant de rythme selon ses mouvements, les particules modifient leurs propriétés selon leur direction.
Une découverte par hasard
Le Dr. Yinming Shao et son équipe ont fait leur observation en utilisant une technique appelée spectroscopie magnéto-optique. En exposant le cristal à un champ magnétique 900 000 fois plus puissant que celui de la Terre et en l’éclairant avec une lumière infrarouge, ils ont remarqué des comportements inattendus.
« Imaginons que la particule soit un petit train confiné dans un réseau de voies, qui représentent la structure électronique sous-jacente du matériau« , explique M. Shao. « À certains endroits, les voies se croisent. Notre train de particules se déplace donc sur sa voie rapide, à la vitesse de la lumière, mais il arrive à une intersection et doit passer sur une voie perpendiculaire. Soudain, il subit une résistance, il a une masse. Les particules sont soit entièrement énergétiques, soit dotées d’une masse, en fonction de la direction de leur mouvement le long des ‘voies’ du matériau. »
Des applications concrètes
Le ZrSiS appartient à la famille des matériaux en couches, similaire au graphite. Les scientifiques envisagent déjà des applications dans plusieurs domaines :
- Batteries nouvelle génération
- Cellules solaires améliorées
- Capteurs ultra-sensibles
- Dispositifs biomédicaux innovants
L’analyse de l’équipe a montré la présence de fermions semi-dirac aux points de croisement. Plus précisément, ces fermions semblaient dépourvus de masse lorsqu’ils se déplaçaient sur une trajectoire linéaire, mais ils devenaient massifs lorsqu’ils se déplaçaient dans une direction perpendiculaire. M. Shao a expliqué que le ZrSiS est un matériau stratifié, tout comme le graphite qui est constitué de couches d’atomes de carbone pouvant être exfoliées en feuilles de graphène d’un atome d’épaisseur. Le graphène est un élément essentiel des technologies émergentes, notamment des batteries, des supercondensateurs, des cellules solaires, des capteurs et des dispositifs biomédicaux.
« Il s’agit d’un matériau stratifié, ce qui signifie qu’une fois que nous aurons trouvé comment couper une seule couche de ce composé, nous pourrons exploiter la puissance des fermions semi-Dirac et contrôler ses propriétés avec la même précision que le graphène« , a indiqué M. Shao. « Mais l’aspect le plus passionnant de cette expérience est que les données ne peuvent pas encore être entièrement expliquées. Il y a de nombreux mystères non résolus dans ce que nous avons observé, et c’est ce que nous nous efforçons de comprendre.«

Un mystère scientifique à résoudre
De nombreuses questions restent sans réponse. Les chercheurs continuent leurs investigations pour comprendre pleinement les mécanismes en jeu. Les données recueillies présentent des aspects inexpliqués qui stimulent la curiosité scientifique.
La maîtrise des propriétés uniques des fermions semi-Dirac pourrait transformer notre approche des technologies quantiques. Les recherches se poursuivent pour isoler une couche unique de ZrSiS et exploiter son potentiel avec la même précision que le graphène.
L’aventure scientifique continue, rappelant que la physique quantique réserve encore de nombreuses surprises aux chercheurs du monde entier.
Légende illustration : La quasiparticule, appelée fermion semi-dirac, a été théorisée pour la première fois il y a 16 ans, mais n’a été repérée que récemment à l’intérieur d’un cristal de matériau semi-métallique appelé ZrSiS. Selon les chercheurs qui ont fait cette découverte, l’observation de la quasiparticule ouvre la voie à de futures avancées dans toute une série de technologies émergentes, des batteries aux capteurs.Crédit : Yinming Shao / Penn State.
Article : « Semi-Dirac Fermions in a Topological Metal » – DOI : 10.1103/PhysRevX.14.041057
Source : Penn State