Des chercheurs du MIT ont développé un modèle d’intelligence artificielle capable d’analyser la structure de cristaux en poudre à partir de données de diffraction des rayons X. La découverte de nouveaux matériaux pour les batteries, les aimants et de nombreuses autres applications pourrait ainsi s’accélérer. En combinant « apprentissage automatique » et « cristallographie », l’équipe a créé un outil puissant pour résoudre un problème vieux d’un siècle. Le modèle, baptisé Crystalyze, a déjà permis de déterminer la structure de plus de 100 matériaux auparavant non résolus.
Depuis plus d’un siècle, les scientifiques utilisent la cristallographie par rayons X pour déterminer la structure des matériaux cristallins comme les métaux, les roches et les céramiques. Cette technique fonctionne bien avec des cristaux intacts, mais pose problème lorsque le matériau n’existe que sous forme de poudre.
Danna Freedman, professeure de chimie au MIT, a commenté l’importance de cette recherche : «La structure est la première chose à connaître pour tout matériau. Elle est importante pour la supraconductivité, les aimants, les cellules photovoltaïques. Elle est essentielle pour toute application centrée sur les matériaux.»
Pour comprendre la difficulté, imaginons un puzzle tridimensionnel dont les pièces auraient été mélangées et réduites en poudre. Reconstruire l’image originale à partir de ces fragments devient un véritable casse-tête pour les chercheurs.
Une approche innovante
Pour relever ce défi, les chercheurs ont entraîné un modèle d’apprentissage automatique appelé Crystalyze sur des données de plus de 150 000 matériaux. Le modèle décompose la prédiction de structure en plusieurs étapes :
- Détermination de la taille et de la forme de la « boîte » du réseau cristallin
- Identification des atomes présents
- Prédiction de l’arrangement des atomes dans la boîte
- Génération de plusieurs structures possibles
- Vérification des prédictions par simulation de motifs de diffraction
Eric Riesel, étudiant diplômé du MIT, a expliqué le fonctionnement du modèle : «Notre modèle est une IA générative, ce qui signifie qu’il génère quelque chose qu’il n’a jamais vu auparavant. Cela nous permet de produire plusieurs hypothèses différentes.»
Les chercheurs ont testé leur modèle sur des milliers de motifs de diffraction simulés et expérimentaux. Crystalyze a atteint une précision d’environ 67% sur des données réelles de minéraux cristallins naturels. L’équipe a ensuite utilisé le modèle pour proposer des structures pour plus de 100 motifs de diffraction non résolus auparavant. Ils ont également découvert les structures de trois nouveaux matériaux créés en laboratoire sous haute pression.
Danna Freedman a souligné l’importance de ces découvertes : «Nous avons trouvé beaucoup de nouveaux matériaux à partir de données existantes et, plus important encore, résolu trois structures inconnues de notre laboratoire qui constituent les premières nouvelles phases binaires de ces combinaisons d’éléments.»
Des applications multiples
La capacité à déterminer la structure de matériaux cristallins en poudre pourrait aider les chercheurs dans presque tous les domaines liés aux matériaux. Les applications potentielles incluent :
- Le développement de nouvelles batteries plus performantes
- La conception d’aimants permanents plus puissants
- L’amélioration des cellules photovoltaïques
- La création de nouveaux supraconducteurs
- L’optimisation des matériaux pour le stockage d’hydrogène
Pour illustrer l’impact de cette technologie, prenons l’exemple des batteries. Comprendre la structure précise des matériaux d’électrode pourrait permettre de concevoir des batteries qui se chargent plus rapidement et durent plus longtemps, révolutionnant ainsi les véhicules électriques et le stockage d’énergie renouvelable.
Un outil accessible à tous
Pour faciliter l’utilisation de leur modèle par d’autres chercheurs, l’équipe du MIT a mis en ligne une interface web accessible à l’adresse crystalyze.org. Cette plateforme permettra à la communauté scientifique de bénéficier de cette avancée pour accélérer leurs propres recherches sur les matériaux.
Eric Riesel a également expliqué l’intérêt de cette approche : «Nous pouvons faire une centaine de suppositions, puis prédire à quoi devrait ressembler le motif de poudre pour nos suppositions. Et si l’entrée ressemble exactement à la sortie, alors nous savons que nous avons raison.»
L’intelligence artificielle Crystalyze développée par les chercheurs du MIT représente en définitive une avancée dans l’analyse des structures cristallines. En facilitant l’étude des matériaux en poudre, elle ouvre de nouvelles possibilités dans des domaines aussi variés que le stockage d’énergie, l’électronique ou encore les matériaux magnétiques.
Article : « Crystal Structure Determination from Powder Diffraction Patterns with Generative Machine Learning » – DOI: https://pubs.acs.org/doi/10.1021/jacs.4c10244
Légende illustration : Des chercheurs du MIT ont créé un modèle informatique capable d’utiliser les données de la cristallographie aux rayons X des poudres pour prédire la structure des matériaux cristallins. Crédit: Eric Alan Riesel