Quel est donc cet additif qui dope l’énergie des batteries à flux ?

Quel est donc cet additif qui dope l'énergie des batteries à flux ?

Imaginez un avenir où un simple dérivé d’amidon pourrait jouer un rôle crucial dans l’optimisation de notre système électrique. C’est la perspective prometteuse que nous révèle une équipe de recherche américaine dans une étude récente.

L’additif en question, appelé β-cyclodextrine, a démontré sa capacité à améliorer l’efficacité et la durée de vie des batteries à flux de prochaine génération conçues pour le stockage de l’énergie du réseau électrique.

Les scientifiques du Pacific Northwest National Laboratory du Département de l’Energie des Etats-Unis ont testé la batterie en continu pendant plus d’un an, sans observer de perte significative de sa capacité à se charger et se décharger.

Leur travail, publié dans la revue scientifique Joule, marque le premier usage du β-cyclodextrine dans une batterie, où il a contribué à augmenter sa puissance de crête de 60%. Cette découverte pourrait ouvrir la voie à des avancées majeures dans le domaine du stockage de l’énergie.

Wei Wang, chercheur en batteries de longue date au PNNL et principal enquêteur de l’étude, a déclaré : “C’est une toute nouvelle approche pour développer l’électrolyte d’une batterie à flux“. Wang ajoute que le β-cyclodextrine, en agissant en solution plutôt qu’à l’état solide, élimine le risque de délogement et d’encrassement du système.

Ruozhu Feng, chercheur dans le domaine des batteries à flux, pose avec les ingrédients d’une batterie à énergie de réseau de longue durée. (Photo par Andrea Starr | Pacific Northwest National Laboratory)

Le mystère des batteries à flux décodé

La batterie à flux représente une technologie cruciale pour l’avenir du stockage d’énergie à grande échelle. Ces batteries tirent leur nom de la caractéristique principale de leur fonctionnement : deux liquides différents circulent à travers deux chambres distinctes. Leur capacité à stocker de l’énergie réside dans les réactions électrochimiques qui s’opèrent entre ces deux liquides. La grandeur des réservoirs de ces liquides détermine la quantité d’énergie que la batterie peut stocker.

La véritable originalité de ces batteries est que leur taille est modulable. Elles peuvent être aussi petites qu’une maquette de laboratoire, ou aussi grandes qu’un pâté de maisons. Par conséquent, les batteries à flux peuvent potentiellement servir de générateurs de secours pour le réseau électrique, notamment lorsqu’elles sont à grande échelle.

L’importance des nouvelles batteries à flux

Le stockage d’énergie à grande échelle est indispensable pour pallier les interruptions du réseau électrique dues à des phénomènes météorologiques extrêmes ou à une demande élevée. Les batteries à flux peuvent minimiser ces perturbations ou aider à rétablir le service. Elles sont d’autant plus importantes que l’électricité est de plus en plus produite à partir de sources d’énergie renouvelables, telles que l’éolien, le solaire et l’hydroélectrique. Ces sources d’énergie intermittentes nécessitent un endroit pour stocker l’énergie jusqu’à ce qu’elle soit nécessaire pour répondre à la demande des consommateurs.

Cependant, les installations commerciales existantes reposent souvent sur des minéraux coûteux et difficiles à obtenir comme le vanadium. D’où l’importance de la recherche de technologies alternatives utilisant des matériaux plus courants, stables, non toxiques et faciles à synthétiser.

Les batteries à flux fournissent un stockage d’énergie rechargeable de longue durée, en particulier pour la fiabilité du réseau. Contrairement aux batteries à l’état solide, les batteries à flux stockent l’énergie dans un électrolyte liquide, représenté ici en jaune et en bleu. Les chercheurs du PNNL ont mis au point une nouvelle batterie à flux efficace et bon marché qui utilise un simple dérivé du sucre appelé β-cyclodextrine (rose) pour accélérer la réaction chimique qui convertit l’énergie stockée dans les liaisons chimiques (violet à orange), en libérant de l’énergie (électrons) pour alimenter un circuit externe. Un processus réversible parallèle (rouge-vert) dans la solution de catholyte positive équilibre les charges positives et négatives pendant la charge et la décharge. (Animation de Sara Levine | Pacific Northwest National Laboratory)

Le β-cyclodextrine : un doux catalyseur

L’équipe de recherche de PNNL qui a mis au point cette nouvelle conception de batterie comprend des chercheurs spécialisés en synthèse organique et chimique. Leurs compétences ont été mises à profit pour travailler avec des matériaux déjà produits pour d’autres usages industriels, mais qui n’avaient pas encore été utilisés pour la recherche sur les batteries.

Le β-cyclodextrine, un sucre simple dérivé de l’amidon, a été utilisé pour la première fois comme additif dans une batterie à flux. Il sert à accélérer la réaction électrochimique qui stocke puis libère l’énergie de la batterie, dans un processus appelé catalyse homogène. Ce sucre agit en solution, et non pas sous forme solide appliquée à une surface, ce qui élimine la possibilité qu’un solide se détache et encrasse le système.

Des résultats prometteurs

Les résultats obtenus grâce à cette nouvelle approche sont impressionnants : la batterie à flux a maintenu sa capacité à stocker et à libérer de l’énergie pendant plus d’un an de charge et de décharge continues. Durant cette période, elle a à peine perdu de son activité pour se recharger. De plus, en optimisant le ratio des produits chimiques dans le système, les chercheurs ont réussi à augmenter la puissance maximale de la batterie de 60%.

Cette avancée fait de la batterie à flux une candidate sérieuse pour une mise à l’échelle. L’équipe de recherche continue cependant à chercher des améliorations en expérimentant avec d’autres composés similaires au β-cyclodextrine mais de plus petite taille.

En synthèse

L’additif β-cyclodextrine semble être un véritable atout pour améliorer la performance des batteries à flux, tout en rendant leur processus de fabrication plus durable et plus économique.

Légende illustration principale : Les chercheurs préparent un électrolyte expérimental pour batterie à flux qui a montré une longue durée de vie en laboratoire. (Photo par Andrea Starr | Pacific Northwest National Laboratory)

La compréhension de la chimie complexe qui se produit à l’intérieur de la nouvelle conception de la batterie à flux a nécessité l’expertise de nombreux scientifiques, notamment Ying Chen, Xin Zhang, Peiyuan Gao, Ping Chen, Sebastian Mergelsberg, Lirong Zhong, Aaron Hollas, Yangang Lian, Vijayakumar Murugesan, Qian Huang, Eric Walter et Yuyan Shao du PNNL, ainsi que Benjamin J. G. Rousseau et Hammes-Schiffer de Yale, en plus de Feng et Wang.

[ Rédaction ]
Lien principal : dx.doi.org/10.1016/j.joule.2023.06.013

            

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