Solaire thermodynamique : production d’électricité à Cadarache

Un démonstrateur de la technologie solaire thermodynamique de Fresnel a été conçu et installé sur le centre CEA de Cadarache pour la société Alsolen (groupe ALCEN).

C’est actuellement la seule installation de ce type à fournir de l’électricité en France. "Nous visons le marché des réseaux isolés ou semi-isolés, qui demande des centrales de moyenne puissance, soit jusqu’à 20 MW" a expliqué Nadim El Mourchid, responsable projet chez Alsolen.

Au-delà du champ de miroirs, le récepteur contient de nombreuses innovations du CEA pour abaisser le coût de revient de l’électricité produite. Il s’affranchit en particulier du fragile tube de verre sous vide qui entoure les récepteurs des centrales à miroirs cylindro-paraboliques déjà installées.

En guise de caloporteur, cette centrale utilise de l’huile portée à « moyenne température » – 300 °C tout de même… – qui va vaporiser non pas de l’eau mais un fluide organique. Ce dernier, en se détendant, alimente une turbine et produit de l’électricité. Ce cycle, appelé « cycle organique de Rankine », tourne à moyenne température et nécessite peu de ressources en exploitation. Alors que les turbines à vapeur « classiques », conçues pour les fortes puissances, fonctionnent à des températures bien plus élevées et requièrent des équipes d’exploitation beaucoup plus contraignantes.

Enfin, la centrale Alsolen stocke la chaleur dans un unique réservoir à lit de roche directement alimenté par l’huile caloporteuse (voir fin de l’article).

« La possibilité de stocker l’énergie thermique à moindre coût fait la différence avec le photovoltaïque car la production électrique est assurée y compris après le coucher du soleil, lorsque les utilisateurs en ont le plus besoin » a indiqué le responsable projet. De plus, afin de rentabiliser encore mieux l’investissement que représente une telle installation, Alsolen mise sur le « multi-therme ». En clair : "à la sortie du turbo-alternateur, le fluide caloporteur est encore très chaud, aussi le CEA et Alsolen développent-ils des solutions destinées à exploiter cette chaleur résiduelle, que ce soit en dessalant de l’eau de mer ou en fabricant… du froid via la climatisation."

Parallèlement, les mêmes partenaires développent la technologie Alsolen SUP. Il s’agit cette fois de centrales de forte puissance – au-delà de 50 MWe – mais utilisant elles aussi des miroirs de Fresnel. Le fluide caloporteur sera directement de la vapeur d’eau surchauffée, portée à 450 °C et 110 bars de pression. La contruction du prototype sera achevée à Cadarache en fin de premier trimestre 2013 et il démarrera dans la foulée.

Afin de se positionner sur cette technologie, le CEA-Liten a constitué une équipe, l’une des plus importantes en Europe sur la thématique, aux compétences diverses – thermique mais aussi optique, mécanique ou encore traitement de surface pour les capteurs – et s’est doté d’installations de vieillissement artificiel des capteurs et d’un site ensoleillé pour implanter des démonstrateurs.

De plus, via sa collaboration avec la fondation marocaine Mascir, son équipe peut tester en grandeur réelle le vieillissement du matériel soumis au sable, au vent et à la chaleur du désert.

Solaire thermodynamique : une production d'électricité sur le centre de cadarache

Stockage : le graal du solaire thermodynamique

Avec le développement des centrales solaires thermodynamiques, de nouveaux dispositifs de stockage voient le jour et font l’objet d’une R&D importante. À ce titre, les équipes du CEA analysent différents matériaux pour en déterminer les propriétés physiques thermiques, la tenue dans le temps et la compatibilité avec les fluides caloporteurs. Plusieurs installations expérimentales sont à leur disposition comme la boucle CLAIRE à Grenoble. Dédiée aux hautes températures (supérieures à 500 °C) avec de l’air comme fluide caloporteur, elle est déjà à l’échelle semi-industrielle avec des capacités de stockage (10 m3) et des puissances thermiques (1 MW) significatives.

De même, l’installation STONE, préfiguration de la centrale solaire de Cadarache, permet d’étudier en détail le parcours d’un fluide caloporteur dans un lit de roche grâce à une instrumentation très fine (220 mesures de température pour 3 m3 de stockage).

Parcours que résume Patrice Tochon du CEA-Liten : "Envoyé chaud dans un réservoir de stockage, le fluide cède progressivement sa chaleur aux cailloux, du haut vers le bas, puis ressort froid ; lorsque les rayons solaires ne sont plus suffisants pour apporter de l’énergie à la centrale, le fluide est injecté de froid en bas du réservoir, se réchauffe au contact du lit de roche puis est récupéré en haut du réservoir pour produire de l’électricité…"

Photos : P. Avavian / CEA

[ src : defi du CEA n° 174 ]

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7 Commentaires
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Mamouth

Utilisation d’huile et fluide organique (CFC, HFC, isobutane, propane) = toxicité Concentration solaire = besoin de précision optique. Ces deux éléments font que cette technologie n’est approprié que dans des zones où les procédés industriels peuvent être maîtrisés. Une utilisation pour de l’électrification rurale dans des pays en voie de développement est donc complètement inappropriée.

Com1

Surprenant de voir que la seule installation se trouve sur le site du CEA à Cadarache. Il y a pourtant une installation à côté de la centrale a tour Themis et une installation en cours en Corse. Quand a la technologie de stockage, la chaleur sensible avec un lit de roche est developpée depuis des décennies… Elle n’est pas a proprement dite nouvelle….

Ramdam

D’accord avec Mamouth, cette techno n’est aujourd’hui pas du tout adaptée à une utilisation pour de l’électrification rurale (Afrique notamment, puisque c’est surtout là bas que sont les mini-réseaux de puissance suffisantes pour installer ce type de système 1-10MWe). Par ailleurs, les photos sont trompeuses et montrent le site test Fresnel installé sur le site de l’INES à Chambéry (depuis déjà 2 ans je crois d’ailleurs) et non à Cadarache… Le CSP c’est top, le stockage aura dans le futur une valeur inestimable dans une optique de 100% d’EnR, mais le marché est celui du connecté réseau avec des centrales de puissance supérieures à seulement qq MW si on veut atteindre des rendements acceptables!

Larcher

Au solaire et à l’éolien on ne cesse d’opposer leur production plus ou moins erratique et/ou leur coût (principalement pour le photovoltaïque). On a là des chercheurs qui font ce qu’ils peuvent pour que du solaire soit moins cher, fiable et capable de produire 24h/24. Au lieu de trois commentaires défaitistes, pourquoi n’a-t-on pas trois commentaires enthousiastes ? Mamouth, huile et fluide organique n’est pas forcément synonyme de toxicité (pourquoi parler de CFC ou d’HFC alors qu’ils sont probablement inadaptés à des températures de plusieurs centaines de degrés ?), jusqu’à preuve du contraire le sang, l’huile d’olive, l’eau (et bien d’autres) entrent dans ces catégories et s’ils étaient toxiques ça se saurait. Com1, le stockage d’électricité est difficile, coûteux et constitue un des verrous à l’utilisation massive des énergies renouvelables. Oui le stockage de chaleur par lit de roche est aussi vieux que la maîtrise du feu, mais il reste efficace, peu coûteux et facile à mettre en œuvre… souvent les technologies d’avenir sont en parfaite synergie avec celles du passé. Ramdam, qui vous dit que l’application visée est uniquement l’électrification rurale et que le but n’est pas tout simplement d’avoir de quoi remplacer la production de base (nucléaire en France, charbon pour une bonne partie du monde) par une vraie solution solaire… et donc, comme vous l’indiquez en fin de commentaire, de pouvoir envisager du 100% EnR. De l’enthousiasme et de l’ambition, que diable !

Sicetaitsimple

– les fluides organiques utilisés dans ces cycles thermodynamiques ne sont quand même pas les plus sympas qui soient. Ca demande quand même quelques précautions. – le CSP n’est pas une technologie d’avenir pour un déploiement en France ( pas assez de DNI). Ca n’empêche pas des pilotes d’y être construits, bien sûr.Mais c’est une techno pour les pays du Sunbelt. En France et au-dessus ( en latitude), le solaire est PV.

yp

utiliser des cailloux pour stocker de la chaleur, c’est réjouissant ! Et oui pourquoi faire compliqué. Toute technologie est bonne à déveloper: l’avenir de l’énérgie c’est le multigénéré et le contextualisé, de l’énergie produite de mille façons et en symbiose avec l’environnement immédiat. et comme dit Larcher un peu d’enthousiasme plutôt que des grincheux serait vachement plus productif, (et vous rendrait plus sympathique de surcroit) surtout qd par ex on critique qu’il y ait des photos venant de Fresnel alors que l’article explique dans le titre que c’est la technologie de Fresnel qui vient d’être installé à cadarache … a chaque fois sur enerzine c’est pareil, pour toute nouveauté enthousiasmante, tout artcile positif qui donne foi en l’avenir et dans le progrès technologique, on a une flopée d’oiseaux de mauvaise augure qui s’abattent et piaillent leur milles critiques et leur négativité et leurs obstacles, c’est pas comme ça qu’on va avancer vers un monde meilleur, car vous voulez bien qu’on avance n’est-ce pas? n’est-ce pas???

Samivel51

Alors les Cassandre? On vous avait bien dit que Cadarache produirait une energie propre et inepuisable!