Une barrière invisible : comment le magnésium protège le futur de l’informatique

Une barrière invisible : comment le magnésium protège le futur de l'informatique

Une découverte récente ouvre de nouveaux horizons pour l’amélioration des matériaux supraconducteurs, essentiels à la construction des qubits, le cœur des ordinateurs quantiques. Cette avancée, réalisée par les scientifiques du Laboratoire National de Brookhaven du Département de l’Énergie des États-Unis, met en lumière l’impact significatif d’une couche de magnésium sur les propriétés du tantale.

Le tantale, un matériau supraconducteur, se distingue par son potentiel dans la fabrication des qubits, éléments fondamentaux des ordinateurs quantiques. La recherche, publiée dans la revue Advanced Materials, révèle qu’une fine couche de magnésium peut prévenir l’oxydation du tantale, en améliorer la pureté et augmenter sa température opérationnelle en tant que supraconducteur. Ces améliorations pourraient renforcer la capacité du tantale à conserver l’information quantique.

Les travaux antérieurs avaient déjà identifié l’oxydation comme un défi majeur, diminuant la cohérence quantique du tantale. Mingzhao Liu, scientifique au CFN et auteur principal de ces études, explique que l’oxygène réagit avec le tantale pour former une couche isolante amorphe, perturbant ainsi la cohérence quantique. La nouvelle stratégie consiste à appliquer une couche de magnésium pour contrer ce processus.

Des Résultats Prometteurs

Les études de spectroscopie photoélectronique par rayons X ont confirmé l’efficacité de la couche de magnésium dans la limitation de la formation d’oxyde de tantale. Une couche extrêmement mince d’oxyde de tantale, confinée sous l’interface magnésium/tantale, n’affecte pas le reste du réseau de tantale, contrairement au tantale non revêtu.

Le magnésium a eu un effet bénéfique inattendu : il a “épongé” les impuretés présentes par inadvertance dans le tantale et, par conséquent, a augmenté la température à laquelle il fonctionne en tant que supraconducteur.

Même si nous fabriquons ces matériaux sous vide, il y a toujours des gaz résiduels – oxygène, azote, vapeur d’eau, hydrogène. Et le tantale est très doué pour aspirer ces impuretés“, explique M. Liu. “Quelles que soient les précautions prises, il y aura toujours ces impuretés dans le tantale.

Ces diagrammes moléculaires comparent l’oxydation du tantale natif (Ta), à gauche, où l’oxyde pénètre dans le réseau Ta, à celle du tantale recouvert d’une couche ultramince de magnésium (Mg), à droite. Le Mg agit comme une barrière à l’oxygène, supprimant efficacement l’oxydation du Ta, et élimine les impuretés du Ta. Ces deux éléments améliorent les propriétés supraconductrices de la couche mince de Ta sous-jacente, ce qui se traduit dans les graphiques par une transition plus nette vers la supraconductivité à une température plus élevée. (Laboratoire national de Brookhaven)

Mais lorsque les scientifiques ont ajouté le revêtement de magnésium, ils ont découvert que sa forte affinité pour les impuretés les extrayait. Le tantale plus pur ainsi obtenu avait une température de transition supraconductrice plus élevée.

Cela pourrait être très important pour les applications, car la plupart des supraconducteurs doivent être maintenus très froids pour fonctionner. Dans ces conditions ultra-froides, la plupart des électrons conducteurs s’apparient et se déplacent dans le matériau sans résistance.

Même une légère augmentation de la température de transition pourrait réduire le nombre d’électrons non appariés restants“, a déclaré M. Liu, ce qui pourrait faire du matériau un meilleur supraconducteur et augmenter son temps de cohérence quantique.

Des études de suivi seront nécessaires pour déterminer si ce matériau améliore les performances des qubits“, a déclaré M. Liu. “Mais ce travail fournit des informations précieuses et de nouveaux principes de conception des matériaux qui pourraient ouvrir la voie à la réalisation de systèmes informatiques quantiques à grande échelle et à haute performance.

En synthèse

Cette recherche offre des perspectives précieuses et de nouveaux principes de conception de matériaux qui pourraient faciliter la réalisation de systèmes informatiques quantiques à grande échelle et haute performance. L’ajout d’une couche de magnésium au tantale représente une avancée significative dans la lutte contre l’oxydation et l’amélioration des propriétés supraconductrices, essentielles à l’efficacité des qubits.

Pour une meilleure compréhension

Qu’est-ce que le tantale ?

Le tantale est un matériau supraconducteur prometteur pour la fabrication de qubits, les unités de base de l’informatique quantique.

Pourquoi le magnésium est-il important ?

Le magnésium prévient l’oxydation du tantale, améliore sa pureté et augmente sa température de supraconductivité.

Quels sont les avantages de cette découverte ?

Cette avancée pourrait améliorer la capacité des qubits à conserver l’information quantique, un pas de plus vers l’informatique quantique à grande échelle.

Comment la recherche a-t-elle été menée ?

La recherche a utilisé des techniques avancées comme la microscopie électronique à transmission et la spectroscopie photoélectronique par rayons X.

Quelles sont les implications futures ?

Cette découverte ouvre la voie à de nouvelles stratégies pour améliorer les matériaux supraconducteurs et, par extension, la performance des ordinateurs quantiques.

Références

Légende illustration : “Chenyu Zhou, chercheur associé au Center for Functional Nanomaterials (CFN) du Brookhaven National Laboratory et premier auteur de l’étude, avec Mingzhao Liu (CFN), Yimei Zhu (CMPMS) et Junsik Mun (CFN et CMPMSD), dans le système de mesure des propriétés physiques DynaCool (PPMS) du CFN. L’équipe a utilisé cet outil pour fabriquer des films minces de tantale avec et sans couche protectrice de magnésium afin de déterminer si le revêtement de magnésium minimiserait l’oxydation du tantale. (Jessica Rotkiewicz/Brookhaven National Laboratory)”

Article : “Ultrathin Magnesium-Based Coating as an Efficient Oxygen Barrier for Superconducting Circuit Materials” – DOI: 10.1002/adma.202310280

[ Rédaction ]

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