Centrale nucléaire : “jusqu’à 8 niveaux de sous-traitants”

A la suite des évènements de Fukushima, une étude sur « la sécurité nucléaire, la place de la filière nucléaire et son avenir » a été enclenchée par les membres de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST).

Le 30 juin dernier, les rapporteurs MM. Christian Bataille (député), et Bruno Sido (sénateur), ont publié leur rapport d’étape sur « la sécurité nucléaire », qui synthétise et analyse les informations recueillies par la mission parlementaire au cours de six auditions et sept déplacements.

Ils soulignent "la grande rigueur du dispositif de gestion de la sûreté nucléaire dont l’indépendance de l’Autorité de sûreté constitue la meilleure garantie". Par ailleurs, ils constatent que l’exigence en matière de sûreté se double "d’un effort de transparence, dont diverses instances pluralistes, au niveau local et national, portent le témoignage."

Mais selon l’OPECST, la France ne peut se prévaloir d’être totalement à l’abri d’une catastrophe naturelle d’une ampleur inattendue : "l’industrie nucléaire française doit pousser d’un cran encore son investissement dans la sûreté. Elle doit imaginer des événements d’une intensité encore plus grande, des schémas accidentels en cascades, avec des interactions entre sites industriels voisins. Elle doit également renforcer les moyens mobiles de secours en eau et électricité pour faire face aux situations d’urgence, ajoutant ainsi une arrière-garde à la défense en profondeur."

Centrale nucléaire : jusqu'à 8 niveaux de sous-traitants !

Citant les rapporteurs, "les impératifs de sûreté doivent être placés au-dessus de toute considération économique. A cet égard, l’Etat doit conserver la maîtrise de cette industrie. Seule la puissance publique est en effet à même d’apporter des garanties solennelles à une population inquiète, notamment en consolidant la maîtrise publique du contrôle de sûreté."

Ils insistent également sur la nécessité d’assurer une meilleure transparence sur les coûts de la filière, et préconisent l’amélioration de la performance de la gestion de crise, notamment par une sensibilisation plus efficace des populations, et des scénarios de sécurité civile plus complets.

La question "sensible" de la sous-traitance :

"L’implication des personnels doit être renforcée, notamment à travers un effort supplémentaire sur la formation, a fortiori dans une période où les départs en retraite vont s’accélérer."

Le rapport appelle à gérer de façon plus sûre les conditions de la sous-traitance, en limitant son utilisation pour des raisons mercantiles.

Extraits du rapport préléminaire :

"Lors de leurs visites de différents sites nucléaires, vos rapporteurs ont tenu à ménager le temps nécessaire au dialogue avec les personnels et leurs représentants syndicaux. Ces derniers ont unanimement exprimé leur inquiétude à l’égard de la pratique de la sous-traitance. Au travers de ces entretiens, les rapporteurs ont compris que la capacité à recruter des personnels compétents constitue l’une des conditions essentielles au maintien de la sûreté des installations nucléaires. "

"A cet égard, l’appel à la sous-traitance constitue un facteur de risque supplémentaire, dans la mesure où il rend plus difficile l’appréciation de l’ampleur des besoins de recrutement dans l’ensemble de la filière."

"Sur tous les sites qu’ils ont eu l’occasion de visiter, les rapporteurs se sont heurtés à la question de la sous-traitance des activités de maintenance et d’exploitation des installations nucléaires. "

"Bien qu’elle ne revienne pas à soustraire au contrôle direct de l’Etat les activités sous-traitées, et que le contrôle comme la préparation restent sous la maitrise de l’exploitant et soumises au contrôle de l’ASN, cette externalisation, qui a pour origine des erreurs affectant gravement la sûreté faites par des employés d’EDF, pose un certain nombre de problèmes de principe."

"D’après les informations qui nous sont parvenues à l’occasion de nos visites de sites, dans certains cas extrêmes, jusqu’à huit niveaux de sous-traitants peuvent ainsi se superposer. Une telle situation s’avère particulièrement préoccupante, en terme de sûreté, puisqu’elle conduit à une dilution extrême des responsabilités et s’avère difficile à identifier. "


Enfin, d’après l’OPECST, il devient nécessaire d’avancer dans l’établissement de normes mondiales de sécurité des installations.

Les rapporteurs insistent enfin sur l’impératif de la recherche, laquelle "crédibilise toute la filière", en préparant "en permanence les futures innovations de sûreté, et en consolidant la place de technologie avancée de l’énergie nucléaire."

Consulter le document provisoire (.PDF) >>> Rapport d’étape – La sécurité nucléaire

 

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Teredral

Merci à Enerzine de mettre en ligne le rapport d’étape de l’OPECST sur la sûreté nucléaire qui présente un état objectif et pédagoique de la situation et devrait largement rassurer tous les “inquiets” qui se donneront la peine de le lire. Il est en revanche regrettable qu’à l’image de la plupart des medias, Enerzine ait cru bon mettre en avant dans le titre et consacrer la moitié de sa brève au cas de la sous-traitance qui n’occupe dans le rapport parlementaire qu’à peine 3 pages (109 à 111) sur un total de 127. A croire que c’est le seul aspect de la sûreté nucléaire à améliorer, ce qui est somme toute très rassurant !

Teredral

Merci à Enerzine de mettre en ligne le rapport de l’OPECST sur la sûreté nucléaire qui présente de manière pédagogique et objective l’état de la situation en France et devrait rassurer tous le “inquiets du nucléaire” qui prendront la peine de le lire. Il est en revanche regrettable qu’à l’instar de la plupart des medias, Enerzine ait cru bon de mettre en exergue dans le titre et consacrer la moitié de sa brève à la situation de la sous-traitance qui occupe dans le rapport parlementaire moins de 3 pages (109 à 111) sur un total de 127. A croire que c’est le seul aspect de la sûreté nucléaire qui doive être amélioré, ce qui est sommes toutes rassurant !

ccsiaix

J’ai noté page 122 “L’énergie nucléaire permet en effet aujourd’hui de produire de l’électricité moins chère que les énergies concurrentes, à l’exception de l’énergie hydroélectrique. Mais une sûreté renforcée a une incidence sur les coûts.” voilà qui résume bien le débat.

renewable

de nous indiquerque Flamanville est un “laboratoire européen du travail illégal” Tout semble être on pour abaisser la facture du nucléaire qui explose de tous côtés…

zelectron

Si c’est l’état qui intervient ce sont 14 niveau de sous-traitants qui se mettrons en place ! EDF: tout le monde sait à quel point les besoins en “bonnes oeuvres” sont grands pour necessiter 8 sous-traitants en cascade !

Reivilo

Difficile d’imaginer qu’avec le rapporteur Bataille on aurait autre chose qu’un rapport bien rassurant. Christian Bataille est fervent défenseur du nucléaire et auteur de la loi dite “loi Bataille” sur les déchets radioactifs (B Sido fait aussi partie des rédacteurs). C Bataille s’est illustré à plusieurs reprises dans le combat contre les EnR et particulièrement l’éolien. On peut toutefois lui reconnaître une certaine clarté de vue quand il indique en 2002 que l’EPR serait obsolète en 10 ans… et un peu moins d’intuition quand il affirme à ce moment que les allemands ne souhaitent pas sortir du nucléaire.

ccsiaix

Pouvez vous nous indiquer à quelle page du rapport ou sur quel site vous avez lu que l’ASN indique Flamanville est un “laboratoire européen du travail illégal” J’ai fait une recherche et j’ai pas trouvé …

renewable

: “le chantier de l’EPR est un laboratoire européen de travail illégal”. Bouygues n’ignore rien des méthodes d’Atlanco, dont l’ex-directeur de la branche française a été formé à bonne école. Il a été salarié par le roi du béton pendant une dizaine d’années et a déjà exercé ses talents sur le chantier du premier EPR en Finlande. A Flamanville les deux comparses ont approfondi leurs méthodes en matière de droit social. Ainsi, quelques Irlandais embauchés via la filiale chipriote dispose d’un contrat de travail rédigé en polonais et stipulant qu’ils pourront faire valoir leurs droits au chômage en Pologne ! Les Polonais, eux, cumulent les avantages : sans congés payés nin couverture maladie, ni droit au chômage, et avec un salaire inférieur à la convention collective française, ils voient en outre leur rémunération amputée chaque mois de 600 à 800€. Des retenues sur salaire destinées selon Atlantico à payer la Sécu et les impôts. Mais ni l’Autorité de Sûreté Nucléaire ni l’urssaf n’ont trouvé trace de cette cagnotte. Ce n’est pas l’ex-directeur de la branche française d’Atlantico qui va les y aider. L’ancien salarié de Bouygues a pris la tangeante il y a quelques semaines. Des vacances bien méritées.”

ccsiaix

Voilà votre lien : (pas trouvé mieux)

renewable

Dans le canard de mercredi dernier

benoit123

Pour information, la version complète (571 pages – 4Mo), avec, entre autres, les compte-rendus des auditions publiques et les contributions personnelles de plusieurs membres de la mission, est en ligne :