Contrôle de la chaleur : la fine ligne entre combustion et protection

Contrôle de la chaleur : la fine ligne entre combustion et protection

La capacité à contrôler l’interaction d’une flamme avec les matériaux traités a toujours été un défi pour la science. Cependant, une nouvelle recherche ouvre la porte à une méthode novatrice permettant d’optimiser cette interaction.

Les flammes à haute température sont utilisées pour créer une grande variété de matériaux. Mais une fois le feu allumé, il peut être difficile de contrôler la façon dont la flamme interagit avec le matériau que l’on essaie de traiter. Les chercheurs ont maintenant mis au point une technique qui utilise une couche protectrice fine comme une molécule pour contrôler la façon dont la chaleur de la flamme interagit avec le matériau – domptant le feu et permettant aux utilisateurs de régler avec précision les caractéristiques du matériau traité.

Le feu est un outil d’ingénierie précieux – après tout, un haut fourneau n’est qu’un feu intense“, explique Martin Thuo, professeur de science et d’ingénierie des matériaux à l’université d’État de Caroline du Nord. “Cependant, une fois que vous avez allumé un feu, vous avez souvent peu de contrôle sur son comportement.

Notre technique, que nous appelons dégradation thermique inverse (DTI), utilise une couche mince à l’échelle nanométrique sur un matériau ciblé. La couche mince se modifie en fonction de la chaleur du feu et régule la quantité d’oxygène qui peut accéder au matériau. Cela signifie que nous pouvons contrôler la vitesse à laquelle le matériau s’échauffe, ce qui, à son tour, influence les réactions chimiques qui se produisent dans le matériau. En fait, nous pouvons régler avec précision comment et où le feu modifie le matériau“.

Voici comment fonctionne l’ITD. On commence par le matériau cible, par exemple une fibre de cellulose. Cette fibre est ensuite recouverte d’une couche de molécules d’une épaisseur de l’ordre du nanomètre. Les fibres enduites sont ensuite exposées à une flamme intense. La surface extérieure des molécules s’enflamme facilement, augmentant la température à proximité immédiate. Mais la surface intérieure du revêtement moléculaire change chimiquement, créant une couche de verre encore plus fine autour des fibres de cellulose. Ce verre limite la quantité d’oxygène qui peut accéder aux fibres, empêchant ainsi la cellulose de s’enflammer. Au lieu de cela, les fibres couvent, brûlant lentement de l’intérieur.

Sans la couche protectrice de l’ITD, l’application d’une flamme aux fibres de cellulose ne produirait que des cendres“, explique M. Thuo. “Avec la couche protectrice de l’ITD, on obtient des tubes de carbone. Nous pouvons modifier la couche protectrice afin d’ajuster la quantité d’oxygène qui atteint le matériau cible. Nous pouvons également modifier le matériau cible afin d’obtenir les caractéristiques souhaitées“.

Les chercheurs ont réalisé des démonstrations de faisabilité avec des fibres de cellulose pour produire des tubes de carbone à l’échelle microscopique.

Les chercheurs ont pu contrôler l’épaisseur des parois des tubes de carbone en contrôlant la taille des fibres de cellulose avec lesquelles ils ont commencé, en introduisant différents sels dans les fibres (ce qui permet de contrôler davantage la vitesse de combustion) et en faisant varier la quantité d’oxygène qui passe à travers la couche protectrice.

Nous avons déjà plusieurs applications en tête, qui feront l’objet d’études ultérieures“, ajoute M. Thuo. “Nous sommes également disposés à collaborer avec le secteur privé pour explorer diverses utilisations pratiques, telles que la mise au point de tubes de carbone artificiels pour la séparation pétrole-eau, ce qui serait utile à la fois pour les applications industrielles et la dépollution de l’environnement.

En synthèse

Cette recherche ouvre de nouvelles perspectives pour le traitement des matériaux grâce à une technique ingénieuse de maîtrise des flammes. Avec des applications potentielles diverses, elle illustre parfaitement l’impact de la science sur l’innovation industrielle et environnementale.

Pour une meilleure compréhension

Qu’est-ce que la technique ITD ? C’est une méthode qui utilise un film protecteur moléculaire pour contrôler l’interaction d’une flamme avec un matériau.

Pourquoi utiliser une couche protectrice ? Elle permet de réguler la chaleur de la flamme et d’empêcher le matériau de s’enflammer rapidement.

Quelles sont les applications potentielles de cette recherche ? La création de tubes de carbone, la séparation huile-eau, et bien d’autres applications industrielles et environnementales.

La recherche a été publiée dans Angewandte Chemie (“Spatially Directed Pyrolysis via Thermally Morphing Surface Adducts“).

Pyrolyse dirigée dans l’espace par l’intermédiaire d’adduits de surface à morphologie thermique

Auteurs : Chuanshen Du et Paul Gregory, Iowa State University ; Dhanush U. Jamadgni, Alana M. Pauls, Julia J. Chang, Andrew Martin et Martin Thuo, North Carolina State University et Iowa State University ; Rick W. Dorn et Aaron J. Rossini, Iowa State University et U.S. Department of Energy ; E. Johan Foster, University of British Columbia

DOI : 10.1002/anie.202308822 – Photo credit: Cullan Smith

[ Rédaction ]

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