Création réussie d’un bit quantique dans une nanostructure semi-conductrice

Création réussie d'un bit quantique dans une nanostructure semi-conductrice

De manière inédite, une équipe de chercheurs germano-chinoise a réussi à créer un bit quantique au sein d’une nanostructure semi-conductrice. Cela a été réalisé grâce à une transition énergétique spécifique, permettant la création d’un état de superposition dans un point quantique – une zone infime du semi-conducteur – où un trou d’électron possédait simultanément deux niveaux d’énergie différents. Ces états de superposition sont la pierre angulaire de l’informatique quantique.

À l’origine, l’excitation de cet état nécessitait un laser à électrons libres à grande échelle capable d’émettre de la lumière dans la plage de fréquence térahertz. Cependant, cette longueur d’onde était trop longue pour concentrer le faisceau sur le minuscule point quantique. Le défi a été surmonté par l’équipe germano-chinoise qui a réussi l’excitation en utilisant deux impulsions laser optiques à courte longueur d’onde finement ajustées.

Le groupe de recherche, dirigé par Feng Liu de l’Université de Zhejiang à Hangzhou, en collaboration avec un groupe dirigé par le Dr. Arne Ludwig de l’Université de la Ruhr à Bochum et d’autres chercheurs de Chine et du Royaume-Uni, ont rendu compte de leurs découvertes dans la revue “Nature Nanotechnology“, dans une publication en ligne datée du 24 juillet 2023.

Utilisation des lasers pour déclencher le processus radiatif d’Auger

L’équipe a utilisé le processus dit de transition radiative d’Auger. Dans ce processus, un électron recombine avec un trou, libérant une partie de son énergie sous forme de photon unique, et en transférant une autre partie à un autre électron. Le même processus peut également être observé avec les trous d’électrons – autrement dit, les électrons manquants. En 2021, une équipe de recherche avait réussi pour la première fois à stimuler spécifiquement la transition radiative d’Auger dans un semi-conducteur.

Dans le projet actuel, les chercheurs ont démontré que le processus radiatif d’Auger peut être conduit de manière cohérente : ils ont utilisé deux faisceaux laser différents, avec des intensités dans un rapport spécifique l’un par rapport à l’autre. Avec le premier laser, ils ont excité une paire électron-trou dans le point quantique pour créer une quasiparticule constituée de deux trous et un électron. Avec un second laser, ils ont déclenché le processus radiatif d’Auger pour élever un trou à une série d’états d’énergie supérieurs.

L’équipe a utilisé des impulsions laser finement ajustées pour créer une superposition entre l’état fondamental du trou et l’état d’énergie supérieur. Le trou existait ainsi dans les deux états simultanément. De telles superpositions sont la base des bits quantiques qui, contrairement aux bits conventionnels, existent non seulement dans les états “0” et “1”, mais également dans des superpositions de ces deux états.

Préparation des échantillons semi-conducteurs de haute pureté

Hans-Georg Babin a produit les échantillons semi-conducteurs de haute pureté pour l’expérience à l’Université de la Ruhr à Bochum sous la supervision du Dr. Arne Ludwig à la Chaire de Physique Solide Appliquée dirigée par le Professeur Andreas Wieck.

Au cours du processus, les chercheurs ont augmenté l’homogénéité de l’ensemble des points quantiques et ont garanti la haute pureté des structures produites. Ces mesures ont facilité la réalisation des expériences par les partenaires chinois travaillant avec Jun-Yong Yan et Feng Liu.

En synthèse

En définitive, cette réalisation par une équipe de chercheurs germano-chinoise marque un jalon significatif dans le domaine de l’informatique quantique. La création d’un bit quantique dans une nanostructure semi-conductrice, grâce à des transitions énergétiques spécifiques et à des techniques d’excitation sophistiquées, ouvre la voie à des progrès futurs dans ce domaine fascinant et en constante évolution.

Pour une meilleure compréhension

Qu’est-ce qu’un bit quantique ?

Un bit quantique, ou qubit, est l’unité de base de l’information quantique. Contrairement à un bit classique qui peut être soit 0 soit 1, un qubit peut être à la fois 0 et 1 à la fois, grâce à un phénomène connu sous le nom de superposition quantique. Cela permet à l’information d’être traitée de manière exponentielle plus rapide dans un ordinateur quantique par rapport à un ordinateur classique.

En quoi consiste la transition radiative d’Auger ?

La transition radiative d’Auger est un processus dans lequel un électron recombine avec un trou (un état vacant qu’un électron peut occuper), libérant une partie de son énergie sous forme de photon et en transférant une autre partie à un autre électron. Ce processus est utilisé dans divers domaines, y compris la spectroscopie et l’optoélectronique.

Comment les chercheurs ont-ils créé un bit quantique dans une nanostructure semi-conductrice ?

Les chercheurs ont utilisé une transition énergétique spéciale pour créer un état de superposition dans un point quantique, une zone infime du semi-conducteur, où un trou d’électron possédait simultanément deux niveaux d’énergie différents. Ce processus a été réalisé avec l’aide de deux faisceaux laser de différentes intensités, qui ont permis l’excitation de cet état de superposition.

Quelle est la différence entre un bit quantique et un bit conventionnel ?

Un bit classique, l’unité de base de l’information dans l’informatique classique, peut prendre une des deux valeurs : 0 ou 1. Cependant, un bit quantique, ou qubit, peut exister à la fois dans l’état 0 et 1 en même temps, grâce au principe de la superposition quantique. Cela signifie qu’un qubit peut traiter une plus grande quantité d’informations qu’un bit classique, ce qui rend l’informatique quantique potentiellement beaucoup plus puissante que l’informatique classique.

Qu’est-ce qu’une superposition dans le contexte de l’informatique quantique ?

La superposition est un concept fondamental en mécanique quantique qui stipule qu’un système quantique, comme un qubit, peut exister dans plusieurs états à la fois. C’est ce qui permet à un qubit d’être à la fois 0 et 1 en même temps, contrairement à un bit classique qui ne peut être que 0 ou 1 à un moment donné. Lorsqu’une mesure est effectuée, le qubit “choisit” l’un des états possibles dans lequel se collapser.

Publication originale / Jun-Yong Yan et al : Coherent control of a high-orbital hole in a semiconductor quantum dot, in Nature Nanotechnology, 2023, DOI : 10.1038/s41565-023-01442-y

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