“Il n’y aura pas un modèle mais des mix énergétiques”

Pour assurer une transition vers un système énergétique durable, répondre à la demande d’énergie tout en préservant l’environnement, l’orientation vers un mix énergétique semble toute traçée.

Il s’agit de diversifier les énergies et les filières – des filières actuelles optimisées aux filières alternatives – en fonction de leur maturité, des usages et des territoires.

Entretien avec Marco De Michelis, Directeur des Relations institutionnelles et de la communication d’IFPEN.

Pourquoi s’oriente-t-on vers un mix énergétique ?

M.D.M. : La nécessité pour nos sociétés, tant occidentales qu’émergentes, de mettre en place dès à présent un mix énergétique est la résultante directe d’une double contrainte liée à la transition énergétique :

• Créer les conditions permettant à la planète de faire face, d’ici à la fin du siècle, à la raréfaction programmée des énergies fossiles, en mettant au point les sources d’énergies capables de les compléter à court et moyen terme et de les substituer à plus long terme. Ce mix énergétique est indispensable au développement de nos sociétés modernes.

• Concevoir un mix énergétique dans le respect absolu de l’urgence climatique en s’assurant que les émissions de CO2 liées à son utilisation soient durablement réduites.

Produire pour répondre à la demande tout en n’aggravant pas le bilan carbone de la planète (il faudrait en réalité réussir à l’améliorer pour ne pas dépasser les deux degrés d’élévation de la température d’ici à 2100 dont les conséquences seraient désastreuses pour la planète), tel est l’enjeu majeur de l’installation progressive d’un mix énergétique raisonné.

Comment mettre en place ce mix énergétique ?

M.D.M. : Installer un mix énergétique raisonné et durable suppose d’importants efforts de recherche et d’innovation selon deux grands axes :

• Améliorer d’ores et déjà, sans attendre, les technologies actuelles de transformation et d’utilisation des énergies fossiles

• Engager des actions de plus long terme qui produiront des ruptures importantes en matière de diversification des sources d’énergie et de réduction des émissions de CO2.

Il s’agit de réaliser de "petits pas" tout de suite tout en préparant les "grands sauts" de demain.

Réaliser de "petits pas" (on parle d’innovation incrémentale) consiste à améliorer sans attendre les technologies actuelles au niveau de leur efficacité énergétique et à les rendre plus propres. Ainsi, abaisser la consommation d’un moteur thermique contribue directement à brûler moins d’énergie et réduit de fait les émissions de CO2. Il en est de même pour les procédés de transformation des hydrocarbures en carburant ou produits dérivés ou encore, les centrales de production d’électricité (hors nucléaire). Sans oublier le secteur du bâtiment pour lequel des progrès considérables sont également possibles.

Préparer les "grands sauts" de demain (on parle d’innovation de rupture) suppose non seulement de trouver des sources d’énergies alternatives "propres" (dites bas carbone et/ou énergies renouvelables (1) aux énergies fossiles mais aussi, de concevoir des technologies de transformation, d’utilisation et de stockage elles-mêmes "propres" (2) et de faire en sorte quelles soient économiquement et socialement acceptables.

Quelle forme prendra ce mix énergétique ?

M.D.M. : Il n’y aura pas un modèle mais des mix énergétiques, fonction des régions et de leur spécificités : l’équilibre ne sera pas le même pour tous. Richesse ou pauvreté du sous-sol, conditions climatiques (ensoleillement, vents, côtes maritimes, etc.), paysages (forêts, déserts, prairies, surface agricoles, etc.), taille des territoires, maturité technologique et/ou économique, ou encore importance, concentration ou dispersion des populations sont autant de critères qui détermineront le choix du mix énergétique optimal d’une région, d’un pays ou d’un continent.

Quels sont les défis à relever pour mettre en place ce bouquet énergétique ?

M.D.M. : L’avènement des énergies renouvelables et des technologies de production ou d’utilisation associées ne pourra se faire sans réponse à trois défis majeurs :

– le caractère intermittent de ces énergies et l’obligation d’être non seulement capable de stocker massivement l’énergie produite mais aussi de l’introduire dans le réseau électrique à la demande,

– leur acceptabilité sociétale (gestion/prévention des risques et des nuisances), tant du point de vue de leur production, de leur stockage que de leur usage.

– leur mise à disposition à un coût acceptable.

La mise en place d’un mix énergétique durable et raisonné supposera également de repenser nos modèles économiques dans une approche systémique différente, aussi bien au niveau de nos modes de production, que de consommation ou de mobilité.

1 biomasse (biocarburants de 1ère, 2ème et 3ème générations, chimie verte), éolien, photovoltaïque, hydraulique, hydrogène, chaleur de l’eau et du sous-sol, etc.
2 captage et stockage du CO2, biotechnologies, géothermie, motorisations hybrides et électriques, pile à combustible, stockage massif de l’énergie, smart grids, etc.

            

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Pastilleverte

Danger ! Car voici une analyse objective, concrète et non idéologique. Bref, le bon sens : Tréduire par, en France, on va continuer à produire une grande part de l’électricité avec le nuke, même si petit à petit, la part des “autres” augmentera dans le mix énergétique électrique. Ou on ne ferme pas Fessenheim “parce que c’est la plus vieille et qu’elle est en zone inondable et sismique”, mais parce que les travaux d’augmentation de la sûreté sont trop chers ou n’auront pas été faits. Du coup, ce n’est peut être pas Fessenheim qu’il faudra fermer “à tout prix” ! Autre manière de dire : l’innovation, voici la clé perincipale, ou encore “Père gardez-vous à droite, gardez-vous à gauche”, des objectifs, même ambitieux et limite utopiques : Oui, de l’idéologie : Non.

crolles

Selon Wiki Pour remplir ses nouvelles missions, IFPEN s’est donné 5 objectifs stratégiques complémentaires : produire à partir de sources renouvelables des carburants, des intermédiaires chimiques et de l’énergie, produire de l’énergie en réduisant l’impact sur l’environnement, développer des transports économes et à faible impact environnemental, produire à partir de ressources fossiles des carburants et intermédiaires chimiques à faible impact environnemental, proposer des technologies respectueuses de l’environnement et repousser les limites actuelles des réserves d’hydrocarbures.