Les scientifiques de l’université de Durham ont mené à bien l’un des plus grands programmes de vérification de la qualité jamais réalisés sur des matériaux supraconducteurs, contribuant ainsi au succès de l’ITER, la plus grande expérience au monde dans le domaine de l’énergie de fusion.
Leurs conclusions, publiées dans Superconductor Science and Technology, mettent en lumière non seulement la qualité des fils eux-mêmes, mais aussi la meilleure façon de les tester, fournissant ainsi aux scientifiques des connaissances essentielles pour faire de l’énergie de fusion une réalité.
La fusion (le processus qui alimente le Soleil) est depuis longtemps considérée comme le Saint Graal de l’énergie propre. Elle offre la promesse d’une source d’énergie pratiquement illimitée, sans émissions de carbone et avec un minimum de déchets radioactifs.
ITER, actuellement en construction dans le sud de la France, est conçu pour démontrer la fusion à une échelle sans précédent.
Une fois opérationnels, ses aimants géants confineront le plasma à des températures plus élevées que celles du cœur du Soleil, et ces aimants dépendent entièrement des performances de fils supraconducteurs avancés.
L’équipe de l’université de Durham, dirigée par le professeur Damian Hampshire et le Dr Mark Raine, a été choisie en 2011 pour créer l’un des laboratoires de référence officiels européens pour ITER.
Sa mission consistait à mettre au point les méthodes spécialisées nécessaires pour tester les fils supraconducteurs fabriqués à partir de composés appelés Nb₃Sn et Nb-Ti, qui constituent l’épine dorsale du système magnétique d’ITER.

Chaque morceau de fil devait répondre à des normes extrêmement élevées afin de garantir la fiabilité de la machine.
Au cours du projet, l’équipe de recherche a reçu plus de 5 500 échantillons de fils et a effectué environ 13 000 mesures distinctes.
Chaque fil devait être traité, préparé et, dans le cas du Nb₃Sn, traité thermiquement dans des fours atteignant plus de 650 °C avant d’être mesuré.
Ce qui rend ce travail particulièrement significatif, c’est l’analyse statistique effectuée sur cet énorme ensemble de données.
Le groupe de Durham a montré que lorsque le même brin ne peut pas être mesuré à plusieurs reprises, comme c’est le cas pour les fils Nb₃Sn, qui sont altérés par le traitement thermique, la mesure de brins adjacents dans différents laboratoires peut constituer un substitut fiable.
Cela fournit une méthode pratique et rentable de vérification croisée des résultats, garantissant à la fois la précision du laboratoire et la cohérence de la fabrication.
L’énergie de fusion pourrait être révolutionnaire, mais son succès dépend de la précision des détails, selon les chercheurs.
Les fils à l’intérieur des aimants de l’ITER doivent transporter des courants des centaines de fois supérieurs à ceux des câbles domestiques, dans des conditions extrêmes.
Le professeur Damian Hampshire de l’université de Durham, qui a dirigé ces travaux, a précisé : « Le Royaume-Uni est le leader mondial dans la fabrication de scanners IRM utilisant des aimants supraconducteurs. La question est de savoir si nous pouvons contribuer à montrer la voie au monde entier en commercialisant la production d’énergie de fusion à l’aide d’aimants supraconducteurs. »
Ces résultats interviennent à un moment où l’énergie de fusion connaît un essor croissant. Alors que l’ITER vise à produire son premier plasma en 2035, les entreprises privées se livrent à une course pour développer plus rapidement des réacteurs commerciaux.
Microsoft a déjà signé un accord pour acheter de l’électricité à la centrale à fusion prévue par Helion en 2028, et Google a précommandé 200 mégawatts d’énergie de fusion auprès de Commonwealth Fusion Systems dans les années 2030.
Parallèlement, le gouvernement britannique a engagé 2,5 milliards de livres sterling dans la recherche sur la fusion et construit sa propre centrale prototype, STEP, sur un ancien site charbonnier dans le Nottinghamshire.
Lorsque l’ITER entrera en service, ses aimants généreront certains des champs magnétiques stables les plus puissants jamais créés, permettant des réactions de fusion qui pourraient produire une énergie abondante et à faible teneur en carbone sans déchets radioactifs à longue durée de vie.
Le succès des aimants et de l’ITER lui-même dépend de la qualité des fils supraconducteurs actuellement vérifiés à Durham.
Il fournit également une ressource ouverte que les scientifiques du monde entier peuvent utiliser pour perfectionner à la fois la technologie et les méthodes d’essai.
Le rôle de Durham va au-delà d’ITER, l’université est également un partenaire de premier plan du Centre britannique de formation doctorale en énergie de fusion, qui contribue à former la prochaine génération de scientifiques et d’ingénieurs.
Article : « European Nb3Sn and Nb–Ti strand verification for ITER: processing, measurements and statistical analysis », (2025), M J Raine, T Boutboul, P Readman and D P Hampshire, Superconductor Science and Technology. DOI : 10.1088/1361-6668/adf3ea
Source : Durham U.