Imaginez des smartphones capables de diagnostiquer des maladies, de détecter des médicaments contrefaits ou de signaler des aliments avariés. La détection spectrale est une technique puissante qui permet d’identifier les matériaux en analysant la façon dont ils interagissent avec la lumière, révélant ainsi des détails bien au-delà de ce que l’œil humain peut voir.
Traditionnellement, cette technologie nécessite des systèmes encombrants et coûteux, confinés aux laboratoires et aux applications industrielles. Mais que se passerait-il si cette capacité pouvait être miniaturisée pour tenir dans un smartphone ou un appareil portable ?
Des chercheurs de l’université d’Aalto, en Finlande, ont combiné du matériel miniaturisé et des algorithmes intelligents pour créer un outil puissant, compact, rentable et capable de résoudre des problèmes concrets dans des domaines tels que les soins de santé, la sécurité alimentaire et la conduite autonome.
« C’est un peu comme si les artistes entraînaient leurs yeux à distinguer des centaines de couleurs subtiles », indique Zhipei Sun, professeur et chercheur principal. Notre dispositif est « entraîné » à reconnaître des signatures lumineuses complexes qui sont imperceptibles pour l’œil humain, atteignant ainsi un niveau de précision comparable à celui des capteurs volumineux que l’on trouve généralement dans les laboratoires.
Contrairement aux capteurs spectraux traditionnels, qui nécessitent de grands composants optiques tels que des prismes ou des réseaux, ce capteur réalise la différenciation spectrale grâce à ses réponses électriques à la lumière, ce qui le rend idéal pour l’intégration dans de petits dispositifs. Les chercheurs ont démontré sa capacité à identifier des matériaux directement à partir de leur luminescence, notamment des colorants organiques, des métaux, des semi-conducteurs et des diélectriques.
« Notre approche innovante de la détection spectrale simplifie les défis de l’identification des matériaux et de l’analyse de leur composition », explique Xiaoqi Cui, l’auteur principal de l’étude, qui a récemment soutenu sa thèse de doctorat à l’université d’Aalto. .
Au cours de sa formation, le dispositif a été exposé à une large gamme de couleurs de lumière, ce qui lui a permis d’« apprendre » et de générer des empreintes électriques uniques pour chaque type de lumière. Ces empreintes sont ensuite décodées par un algorithme intelligent, ce qui permet au capteur d’identifier avec précision les matériaux et d’analyser leurs propriétés en fonction de leur interaction avec la lumière.
Mesurant seulement 5 micromètres sur 5 micromètres, soit une surface 200 fois plus petite que la section transversale d’un cheveu humain, le dispositif atteint une extraordinaire précision d’identification des longueurs d’onde de ~0,2 nanomètres, ce qui lui permet de distinguer des milliers de couleurs. Au cœur de ce capteur se trouve une interface optoélectronique soigneusement conçue qui permet un contrôle précis du flux électrique grâce à des ajustements de tension. Cette adaptabilité exceptionnelle permet au capteur d’interagir avec la lumière de multiples façons distinctes, produisant une « photoréponse multidimensionnelle ».
« Ce travail constitue une avancée majeure pour mettre l’identification spectroscopique à la portée de tous », conclut Fedor Nigmatulin, chercheur doctorant et coauteur du premier article. « En intégrant ce matériel ultra-compact à des algorithmes intelligents, nous avons fait un pas important vers des spectromètres miniatures et portables qui pourraient un jour transformer l’électronique grand public ».
Grâce à ses performances, à sa conception réglable et à sa polyvalence, l’équipe de recherche espère que ce minuscule capteur apportera bientôt la puissance de la spectroscopie avancée dans les appareils que nous utilisons tous les jours.
Légende illustration : Des chercheurs de l’université d’Aalto tiennent une minuscule puce conçue pour accueillir des centaines de capteurs spectraux ultracompacts. Photo : Université d’Aalto / Faisal Ahmed et Andreas Liapis
L’article publié dans Science Advances, DOI : doi.org/10.1126/sciadv.ado6886
Source : U. Aalto – Traduction Enerzine.com