Dans le domaine de la supraconductivité, une équipe de chercheurs de l’Université de Manchester a réalisé une avancée majeure en obtenant une supraconductivité robuste sous des champs magnétiques élevés grâce à un nouveau système unidimensionnel (1D). Cette découverte ouvre des perspectives pour atteindre la supraconductivité dans le régime de l’effet Hall quantique, un défi de longue date en physique de la matière condensée.
Les chercheurs de Manchester, dirigés par le professeur Andre Geim, le Dr Julien Barrier et le Dr Na Xin, ont d’abord suivi l’approche conventionnelle consistant à rapprocher des états de bord à propagation opposée. Cependant, cette méthode s’est avérée limitée. L’équipe a alors exploré une nouvelle stratégie inspirée de leurs travaux antérieurs démontrant que les frontières entre les domaines dans le graphène pouvaient être hautement conductrices.
En plaçant ces parois de domaine entre deux supraconducteurs, ils ont obtenu la proximité ultime souhaitée entre les états de bord à propagation opposée tout en minimisant les effets du désordre. Le Dr Barrier, auteur principal de l’article, se souvient : « Nous avons été encouragés d’observer de grands supercourants à des températures relativement ‘douces’ jusqu’à un kelvin dans chaque dispositif que nous avons fabriqué. »
Des états électroniques 1D à l’origine de la supraconductivité de proximité
Des recherches approfondies ont révélé que la supraconductivité de proximité ne provenait pas des états de bord de l’effet Hall quantique se propageant le long des parois de domaine, mais plutôt des états électroniques strictement 1D existant à l’intérieur même des parois de domaine. Ces états 1D, dont l’existence a été prouvée par le groupe de théorie du professeur Vladimir Fal’ko au National Graphene Institute, ont montré une plus grande capacité à s’hybrider avec la supraconductivité par rapport aux états de bord de l’effet Hall quantique.
La nature intrinsèquement unidimensionnelle des états intérieurs serait responsable des supercourants robustes observés sous des champs magnétiques élevés. Cette découverte de la supraconductivité 1D à mode unique ouvre des perspectives passionnantes pour de futures recherches.
Un système pour la physique fondamentale et les technologies quantiques
Le Dr Barrier explique : « Dans nos dispositifs, les électrons se propagent dans deux directions opposées dans le même espace nanométrique et sans diffusion. De tels systèmes 1D sont exceptionnellement rares et promettent de résoudre un large éventail de problèmes en physique fondamentale. »
L’équipe a déjà démontré la capacité de manipuler ces états électroniques à l’aide d’une tension de grille et d’observer des ondes électroniques stationnaires qui modulaient les propriétés supraconductrices. Le Dr Xin conclut : « Il est fascinant de penser à ce que ce nouveau système peut nous apporter à l’avenir. La supraconductivité 1D présente une voie alternative vers la réalisation de quasi-particules topologiques combinant l’effet Hall quantique et la supraconductivité. »
Vingt ans après l’avènement du premier matériau 2D, le graphène, cette recherche de l’Université de Manchester représente une nouvelle étape dans le domaine de la supraconductivité. Le développement de ce nouveau supraconducteur 1D devrait ouvrir des portes pour les avancées des technologies quantiques et ouvrir la voie à l’exploration de nouvelles physiques, suscitant l’intérêt de diverses communautés scientifiques.
Article : « One-dimensional proximity superconductivity in the quantum Hall regime » – DOI: 10.1038/s41586-024-07271-w