L’éolien français rattrape son retard

Dans un nouveau rapport, le gestionnaire de réseau RTE fait le bilan des installation d’énergies renouvelables en France, et des perspectives de leur développement au sein du réseau électrique français.

Les EnR répondent aujourd’hui à 15% de la consommation français d’électricité, pour une production en 2007 de 71,1 TWh d’électricité (480,3 TWh ont été consommés sur l’année). Cette production provient essentiellement des moyens de production hydraulique, précise RTE.

Selon ses chiffres, l’augmentation de la production des énergies renouvelables atteint les 79,4% entre 2006 et 2007.

Essor de l’énergie éolienne

En valeur absolue, la production éolienne représentait 4 TWh en 2007, soit 0,8% de la  consommation intérieure d’électricité.

Au 31 mai 2008, la puissance installée de la production éolienne d’électricité en France a atteint 2 500 MW (2). En 5 ans, l’énergie électrique d’origine éolienne produite en France a été multipliée par 10.

Comparé à d’autres pays européens, le développement de l’éolien en France reste néanmoins récent, relativise RTE, qui cite par exemple les chiffres des puissances installées à fin 2007(3)
des deux premiers pays européens leaders : 22 200 MW pour l’Allemagne et 15 100 MW pour l’Espagne.

Prévoir le développement des EnR

La loi du 10 février 2000 a confié à RTE la mission de réaliser, tous les deux ans, un Bilan Prévisionnel de l’équilibre entre l’offre et la demande d’électricité. Ce bilan s’inscrit dans le cadre de la Programmation pluriannuelle des investissements de production d’électricité réalisée par les Pouvoirs publics.

Sa publication entend constituer, de manière transparente et pour tous les acteurs du marché, une source d’informations neutre afin de leur permettre d’anticiper leurs décisions d’investissements en moyens de production.

Dans son dernier bilan prévisionnel à l’horizon 2020, RTE constate un développement important de nouveaux moyens de production, dont les énergies renouvelables et tout particulièrement l’éolien.

Pour RTE, la filière éolienne a véritablement commencé à prendre son essor malgré un "démarrage timide et tardif" : avec moins de 400 MW installés début 2005. Son développement récent, avec environ 2000 MW au début de l’été 2007, montre qu’une dynamique s’est amorcée. RTE table sur un renforcement de son développement.

En tenant compte des projets en cours et des informations fournies par les producteurs, notamment celles du Syndicat des Energies Renouvelables (SER), RTE estime que la puissance éolienne installée devrait atteindre 5 000 MW en 2010 et 7 000 MW en 2012.

L’arrêté du 7 juillet 2006 relatif à la programmation pluriannuelle des investissements de production d’électricité prévoit de développer en France 17 000 MW d’éolien en 2015. La puissance éolienne installée devrait dès lors atteindre 20 000 MW en 2020.

RTE explique que la France suit le rythme d’autres pays voisins européens avec un décalage de quelques années, sans compter les projets d’éolien « off-shore » qui sont pour l’instant difficiles à évaluer. 

Accompagner le développement

Pour le gestionnaire, accompagner le développemnet des énergies renouvelables dans le pays implique un développement concerté des capacités du réseau de transport et des interconnexions.

Si en France des capacités d’accueil à l’évacuation de la production éolienne par le réseau public de transport existent, elle sont limitées : de 6000 à 7000 MW environ peuvent être raccordés sur le réseau existant.

Ce volume ne peut toutefois être atteint qu’en optimisant la répartition géographique des projets de production éolienne. Or leur localisation est avant tout liée au potentiel éolien existant et à leur acceptabilité sociétale et environnementale, explique RTE.

De ce fait, il apparaît que les capacités d’accueil du réseau public de transport sont d’ores et déjà limitées dans certaines zones favorables à l’acceptabilité de l’éolien, que ces productions soient raccordées directement à ce réseau ou via le réseau de distribution. En effet, ces zones sont généralement peu urbanisées, et donc sont souvent desservies par un réseau de transport de capacités limitées en raison des faibles consommations qu’il était jusqu’à présent destiné à alimenter.

RTE publie sur son site Internet et sous forme de cartes, les capacités d’accueil du réseau public de transport. (4)

Dans la mesure où les délais de développement des installations de production éoliennes sont notablement plus rapides que ceux du réseau de transport (généralement 2 à 3 ans pour les premiers contre environ 6 ans pour les seconds, essentiellement liés à l’obtention des procédures administratives), la création de capacités d’accueil de la production éolienne doit être anticipée.

Pour cela, il apparaît indispensable de disposer au plus tôt d’une vision nationale et régionale des Zones de Développement Eolien (ZDE). Dans cet optique, RTE s’implique au sein des processus de concertation mis en place dans le cadre de la création de ces ZDE. Ces processus de concertation rassemblent les promoteurs de projets d’éoliennes, les pouvoirs publics, les élus locaux et régionaux.

Afin d’anticiper au mieux l’adaptation de ses infrastructures, RTE a évalué à environ un milliard  d’euros cumulés d’ici à 2020 les investissements nécessaires sur son réseau pour un parc éolien terrestre d’environ 20 000 MW (lignes et postes), soit 500 M€ d’ici à 2010-2012, puis 500 M€ de 2010-2012 à 2020 ; et sous condition de la réalisation effective des moyens de production éoliens /prévus.

La loi confie à RTE la gestion de l’équilibre entre l’offre et la demande en temps réel.(5) Or la production des énergies renouvelables est par nature variable et difficilement prévisible. En effet, les éoliennes ne produisent que lorsque le vent le leur permet, c’est à dire lorsque la vitesse du vent n’est ni  trop faible, ni trop forte. De même, les centrales photovoltaïques ne produisent que lorsque l’ensoleillement est suffisant. Pour assurer l’équilibre entre l’offre et la demande en électricité, il convient donc de gérer au mieux l’intermittence des énergies renouvelables.

Compte tenu du fort développement de l’éolien, la vitesse du vent est un paramètre météorologique nouveau qui entre dans la prévision de l’équilibre entre la production et la consommation. Qui plus est, ce paramètre météorologique répond à des constantes de temps  courtes : sa variabilité est forte et bien moins prévisible à l’avance que température
et nébulosité.

Toutefois les mesures de production éolienne de 2005 à 2007 et l’analyse des vitesses de vent sur un historique de cinquante ans, laissent présager de relativement bonnes performances de l’éolien français, favorisé par des zones de vents non-corrélées.

Globalement, le parc éolien installé présente un facteur de charge (6) annuel moyen de 24% sur les trois dernières années, plus élevé en hiver qu’en été. Il n’a pas été constaté lors des périodes de froid d’association significative entre faibles températures et faible production éolienne.
Malgré l’intermittence de sa production, le parc éolien participe à l’équilibre offre demande, affirme le gestionnaire. Sous réserve d’un développement géographiquement équilibré, on estime que 20 000 MW d’éoliennes est équivalent à 4 000 MW de moyens de production thermique.

Des déclenchements simultanés d’éoliennes suite à un creux de tension (pouvant être ressenti sur des zones géographiques de la taille d’un département ou d’une région) ou des variations de fréquence (ressenti sur l’ensemble du réseau européen interconnecté) peuvent nuire à la sûreté du système électrique, prévient le gestionnaire.

Dès lors que la puissance installée des éoliennes devient significative, il est impératif que les éoliennes aient des performances techniques de tenue aux creux de tension et de fréquence similaires à celles des autres installations de production. Des dispositions en ce sens sont prévues dans des textes réglementaires français pour toutes les éoliennes, qu’elles soient accordées aux réseaux de transport ou de distribution.

Face au développement des EnR et tout particulièrement de l’éolien, RTE souligne l’importance pour les gestionnaires de réseau de transport de disposer d’outils adaptés pour intégrer
leurs particularités dans l’exploitation du système électrique :

  • accroissement rapide ;
  • production raccordée essentiellement sur les réseaux de distribution ;
  • forte variabilité de la production liée aux conditions météorologiques ;
  • comportements des machines différents en fonction des technologies.

RTE a engagé plusieurs types de travaux destinés à mieux intégrer les EnR dans le système électrique :

Tout d’abord, RTE s’efforce, dans ses relations avec gestionnaires de réseau et les producteurs éoliens, d’améliorer « l’observabilité » en temps réel de la production éolienne. L’observabilité est la capacité de disposer de la mesure de la production des éoliennes en temps réel.

Début 2008, RTE a installé dans les dispatchings (centres d’exploitation du réseau de transport) une première plate-forme pour visualiser les données de production éolienne. Fin 2008, les  mesures d’environ 80% de la production éolienne française seront rapatriées vers cette plate-forme.

Par ailleurs, RTE s’est engagé en partenariat avec météo-France à améliorer « la prévision » de la production éolienne. En effet, RTE a développé un modèle de prévision de production éolienne. Ce modèle simple et robuste est alimenté par l’historique de la production réalisée par chaque parc éolien et par les prévisions de vent fournies par météo-France. Les premiers résultats du modèle sont dores et déjà satisfaisants.

D’autre part, RTE étudie les possibilité de « commandabilité » de la production éolienne en lien  avec les gestionnaires de  réseau de distribution et les producteurs. La commandabilité consiste à pouvoir commander à distance et en temps réel les installations de production depuis les
dispatchings (centres d’exploitation du réseau de transport).

Observabilité, prévision et commandabilité sont nécessaires pour faciliter le développement des EnR tout en garantissant le bon fonctionnement et la sûreté du système électrique, souligne RTE.

L’électricité ne se stockant pas, la production doit, à tout moment, être équivalente à la consommation. Toute modification de la demande ou de la production d’électricité en un point du réseau de transport se répercute instantanément sur tout le système électrique. Celui-ci doit donc s’adapter en permanence pour satisfaire l’équilibre offre-demande.

Les lois du 10 février 2000 et du 9 août 2004, ainsi que le décret du 31 août 2005, ont confié à RTE la mission d’assurer « l’équilibre, à tout instant, des flux d’électricité sur le réseau public de transport d’électricité, ainsi que la sécurité, la sûreté et l’efficacité de ce réseau ».

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stef

Cet article fait plaisir… On est plutôt habitué à entendre des discours qui décrédibilisent l’éolien, RTE remet les pendules à l’heure. Bien que l’éolien soit intermittent, la prévision reste possible, et le parc éolien participe bel et bien à l’équilibre offre demande.Certes la part de l’éolien est encore très faible dans la production d’électrcité fançaise, mais on n’en est qu’au début de l’essor de cette filière. Quand on voit à quel taux de couverture arrivent les espagnols ou les allemands avec l’éolien, et en considérant que le potentiel éolien en France est plus élevé que dans ces pays, il reste de la marge !

Dan1

Cet article de RTE est assez mesuré et pose bien les problèmes.S’agissant du taux de couverture atteint par les allemands, agissons avec mesure. En qualité de pionniers ils ont produit environ 33 TWH avec 22 000 MW installés fin 2007 ce qui représente environ 5 % de la production pour un système qui est proche de la croisière malgré le repowering. Je pense que, dans ces conditions nous avons effectivement de la marge, avec les 7 000 MW prédits pour 2012 et un facteur de charge de 24 % nous aurions déjà 14,7 TWh/an soit 2,6 % de la production et 3 % de la consommation. Une fois l’Allemagne rattrapé, il reste tout de même à définir comment on produit les 95 % restant ?

Jp du carladez

il faut penser que notre réseau sera fragilisé et que ces machines produiront certe 3% de notre consommation, mais a quel prix? Pourquoi oublier de dire que nous exportons net 12% de notre production. L’ équilibre se fait  par la vente  de notre surproduction (ou l’inverse). Nous exporterons donc à perte (prix de rachat indexé qui supérieur au prix du marché spot) et sur le dos du consommateur au profit de nos voisins qui, de plus, nous vendent les machines. !!! Il est question avec l’éolien de production industrielle, pourquoi tant d’avantages par rapport à l’hydro-électrique plus fiable, plus réactif ,plus pérenne, national, en croissance, et dont on annonçait prématurément la fin. L’interet d’utiliser des miliards pour fiabiliser le réseau ajoutés a ceux qui serviront à financer cette activité me laissent dubitatif. Il faudrait raison garder. Si la loi du marché reprenait le dessus, l’éolien aurait du souci à se faire.

Raminagrobis

C’est bien tout ça, mais faudrait corriger votre page d’acceuil : “20 mégawatts attendus en 2020” ça le fait pas trop :/

Dan1

Ce nouveau rapport, n’est pas un rapport mais… un dossier de presse de 11 pages téléchargeable au lien suivant :

Rageous

“Observabilité, prévision et commandabilité”Beaucoup de paramètres à considérer pour finalement pas grand chose en terme de production, sans doute que le seul intérêt de RTE est le renforcement du réseau…”un milliard  d’euros cumulés d’ici à 2020 les investissements nécessaires sur son réseau pour un parc éolien terrestre d’environ 20 000 MW (lignes et postes)”Avec le concours de météo france…alors que l’installation de ces engins perturbe les radars, c’est ubuesque!

Guydegif(91)

”…RTE a la mission d’assurer « l’EQUILIBRE, à tout instant, des FLUX d’électricité sur le réseau public de transport d’électricité, ainsi que la sécurité, la sûreté et l’efficacité de ce réseau ».”Comme dit ci-dessus: ”L’électricité ne se stockant pas, la production doit, à tout moment, être équivalente à la consommation”, d’où le fait qu’à certains moments il est heureux de pouvoir exporter les surplus, alors qu’à d’autres moments de charges il faut pouvoir importer. Pour pouvoir couvrir en autonome ces pointes, il faudrait donc bien des ”capacités de prod. pointe” additionnelles potentiellement ”débranchables ou débrayables” qd pas ces besoins. D’où la recherche louable de RTE de la ”commandabilité consiste à pouvoir commander à distance et en temps réel les installations de production depuis les dispatchings” qu’on ne peut qu’encourager ! Installation de prod. éoliennes et autres EnR !  De même il est souhaitable de renforcer le ”développement concerté des capacités du réseau de transport et des interconnexions” sur tout le territoire français Est-Ouest et Nord-Sud et Européen, voire au-delà.A+ Salutations Guydegif(91) 

Momo

Dans ce ” dossier / rapport ” , tres instrutif ,  RTE indique tres clairement son SEUL but : la ” commandabilite ” des diverses sources de production ! C’est sa grande force , qui est tres precisement annoncee  : ce service PUBLIC va PILOTER , va DIRIGER ,  les diverses sources ( publiques et/ ou privees ) de production , et donc etre le seul et vrai maitre a bord du dispatching permanent de cette electricite indispensable partout mais consommee tres variablement : ils ne font absolument pas du proselitisme pour l’eolien ( desole Steph , mais c’est la stricte verite ….) , dont ils savent parfaitement qu’au mieux il passera de 0,8 % de la production globale actuellement a environ 3 % maxi dans une bonne decennie ! ….Mais ils vont avoir ,et EUX SEULS , la haute main sur l’acceptation de la production ou le debrayage ” tele-commande a distance ” de ces ” moulins a productions aleatoires ” , et non pas les producteurs eux-memes , qui devront donc se soumettre aux decisions souveraines des centraux RTE  concernant l’utilisation ou non de ces MWh dans le reseau global ( c’est vers cela que l’Allemagne va a marches forcees , tout en laissant E-On envisager d’investir ds. le nucleaire de base hors du territoire national …..mais c’est une autre histoire !)Dan devrait etre + ou – rassure : c’est un service PUBLIC qui gardera la haute main et assumera la responsabilite de la distribution du courant final , laissant la production ” aux forces du marche ” ( marche + ou – biaise , comme de tout temps et en tous lieux ! ) , et surtout en permettant a eDF d’etre le producteur ” de base ” et majoritaire ! ….Et Jp du Carladez risque bien d’avoir raison sur sa derniere phrase ! Tout au moins du point de vue Francais , ailleurs cela sera peut-etre tres different , et dependra surtout du prix attribue aux tonnes de CO2 , ” dechets jamais traites ni stockes ni surveilles ” des industries non-nucleaires !Pourvu que cela dure encore longtemps !Bon vent a tous

Dan1

Merci Momo, bonne synthèse. Pour certains éléments techniques qui ne figurent évidemment pas dans ce dossier de presse : voir le rapport H de la commission Ampère en Belgique.

stef

Momo, tout à fait d’accord, RTE de fait pas du prosélitisme pour l’éolien. C’est donc bien de voir qu’un organisme de service public apporte clairement quelques contre arguments aux pseudo-arguments apportés par les anti éoliens habituels (vent de colère et compagnie).Dan, effectivement les 7000 MW n’apporteront que 3 % de notre conso en 2012. Mais le développement de l’éolien est très récent, on ne peut pas lui demander d’avoir 20 % en 10 ans. Ces 7000 MW sont donc appelés à augmenter au fil des années.Et puis si on faisait vraiment de la MDE, ces pourcentages pourraient également augmenter…