Les enjeux de l’accès à l’énergie

L’amélioration de l’accès à l’énergie représente un défi majeur du XXIème siècle dans la mesure où elle constitue un levier primordial du développement humain et économique tant aux échelles individuelles que nationales.

Ce lien entre accès à l’énergie et développement explique la mobilisation croissante autour de ces problématiques des différents acteurs de l’aide au développement : États, bailleurs multi et bilatéraux. En 2009, 9 milliards de dollars ont été investis dans l’accès à l’énergie.

Les acteurs privés se positionnent de plus en plus sur l’accès à l’énergie car un marché existe au niveau des ménages du bas de la pyramide (BOP) qui dépensent actuellement plus de 37 milliards de dollars par an pour se fournir en « énergies traditionnelles ». Les synergies entre acteurs publics et privés sont croissantes et participent à l’optimisation des initiatives locales, nationales et internationales afin de tendre vers l’accès universel à l’énergie.

Bien qu’il existe des solutions technologiques pouvant répondre aux besoins des populations n’ayant pas accès à l’énergie, que les initiatives nationales et internationales se multiplient et que l’accès à l’énergie représente un marché à fort potentiel pour le secteur privé, l’objectif d’accès universel à l’énergie doit faire face à des défis majeurs.

S’adapter aux marchés potentiels : populations à faibles revenus et isolées

Certaines technologies produisant une énergie durable sont déjà compétitives. Cependant, différents facteurs comme la disponibilité des ressources, la distance au réseau, le prix (éventuellement subventionné) des hydrocarbures sur le marché local ou encore l’existence de barrières douanières influent sur le positionnement relatif des différentes solutions.

Les progrès technologiques et les baisses de coûts permettront d’améliorer la compétitivité des solutions durables d’accès à l’énergie face aux énergies traditionnelles. Servir les populations aux revenus les plus faibles restera un enjeu que les seules baisses de coût ne permettront pas de résoudre.

Le coût d’acquisition élevé des solutions énergétiques durables constitue une barrière significative pour les populations défavorisées ; le rendre abordable pour les utilisateurs finaux est primordial. De multiples pistes de solution existent déjà.

La microfinance a joué un rôle fondamental dans le financement de systèmes énergétiques depuis une décennie. Pour dépasser la dépendance à un tiers et des coûts de transaction associés à la microfinance, des entreprises ont développé des capacités de financement intégrées à leur business model à travers des pratiques de leasing et de pay-as-you-go. Elles internalisent alors les risques financiers et permettent à des populations d’avoir accès à des services énergétiques sans avoir à disposer immédiatement de la totalité du capital nécessaire.

Ces solutions ont été très concluantes dans le développement du réseau de téléphonie mobile dans les pays en développement et sont largement réplicables dans le secteur énergétique (solutions prépayées et de paiements dématérialisés). La barrière des coûts initiaux peut aussi être dépassée à travers la mutualisation des coûts à l’échelle communautaire comme le proposent les coopératives rurales électriques autours desquelles se développent des mini-réseaux.

Les fournisseurs et distributeurs de solutions énergétiques font également face à la difficulté d’atteindre physiquement leurs clients dispersés. On parle de problématique de la logistique du dernier kilomètre. Cet enjeu concerne en particulier les développeurs de projets de systèmes hors-réseau en zones rurales reculées et faiblement peuplées. Le manque d’infrastructures routières vient renchérir le coût des solutions énergétiques pour les utilisateurs finaux, en freinant le développement de réseaux de distribution.

Pour passer outre les contraintes géographiques, des entreprises développent des réseaux de franchises en s’appuyant sur les tissus économiques locaux existants afin d’atteindre les populations rurales, comme les réseaux de stations-services pour la vente de kits solaires. Les ONG et les IMF locales constituent aussi de bons relais pour les distributeurs.

Concilier spécificités locales et nécessité d’un déploiement à grande échelle

Il n’existe pas de solution unique pour répondre au défi de l’accès à l’énergie. Chaque contexte local appelle à des solutions spécifiques liées aux ressources énergétiques disponibles, à la densité de population dans les zones ciblées, aux revenus disponibles, à la capacité de payer des utilisateurs finaux, ainsi qu’aux financements mobilisables.

Toutefois, l’objectif d’accès universel à l’énergie pose l’enjeu de la diffusion à très large échelle de solutions énergétiques compétitives, durables et abordables pour les utilisateurs finaux. Améliorer la réplicabilité de ces solutions, tant à l’échelle locale, via le soutien aux entrepreneurs, qu’à l’échelle internationale, via la diffusion de solutions standardisées, sera indispensable.

La baisse continue du coût des équipements de production décentralisée d’énergie renouvelable et la standardisation progressive de produits comme les kits solaires présente de nouvelles opportunités pour la diffusion de ces équipements. De plus, la capitalisation et la diffusion de bonnes pratiques sous l’égide d’organisations internationales contribuent à l’amélioration de la réplicabilité de ces solutions énergétiques.

Intégrer les contraintes environnementales

Le développement des énergies renouvelables et le progrès technologique offrent de nouvelles possibilités aux opérateurs de projet. En particulier, l’interconnexion progressive de systèmes hors-réseau et de mini-réseaux basés sur des énergies renouvelables comme le solaire pourrait s’avérer plus adaptée aux contraintes économiques et aux spécificités sociodémographiques locales, aboutissant à long terme à des systèmes énergétiques bien différents des systèmes centralisés actuels des pays industrialisés.

La performance environnementale des technologies doit être un critère de sélection au même titre que la compétitivité économique pour le développement d’un projet d’accès à l’énergie. Il apparaît nécessaire d’éco-concevoir les projets d’accès à l’énergie afin d’en assurer la durabilité et concilier objectifs de développement et enjeux de préservation de l’environnement.

Le marché de l’accès à l’énergie présente d’importantes opportunités pour les entreprises qui sauront innover dans la distribution des équipements mais également dans les modalités de financement pour atteindre les clients du « dernier kilomètre ». Toutefois, les investissements à consentir seront importants : atteindre l’objectif d’accès universel à l’énergie à horizon 2030 demanderait près de 50 milliards de dollars d’investissement annuel, soit bien davantage que les 9 milliards de dollars investis actuellement.

[ Archive ] – Cet article a été écrit par Enea

0 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires