La Commission Européenne a publié mercredi une proposition visant à restreindre la conversion de terres en cultures destinées à la production de biocarburants et à accroître les effets bénéfiques pour le climat des biocarburants utilisés dans l’Union européenne.
Pour la première fois, l’estimation de l’impact de la conversion des terres – le changement indirect dans l’affectation des sols (ILUC) – sera prise en considération lors de l’évaluation de la performance des biocarburants en matière de réduction des émissions.
En effet, l’utilisation de biocarburants produits à partir de denrées alimentaires pour atteindre l’objectif de 10 % d’énergies renouvelables fixé par la directive sur les énergies renouvelables sera limitée à 5 %. Le but est de stimuler le développement d’autres biocarburants, dits de seconde génération, produits à partir de matières premières non alimentaires, telles que des déchets ou de la paille, dont les émissions sont sensiblement inférieures à celles des combustibles fossiles et qui n’interfèrent pas directement avec la production alimentaire mondiale.
"Cette proposition encouragera les biocarburants les plus performants. A l’avenir, les biocarburants permettront de réduire plus sensiblement les émissions de gaz à effet de serre et de diminuer la facture de nos importations de carburant" a déclaré Günther Oettinger, membre de la Commission chargé de l’énergie.
"Pour que les biocarburants contribuent à la lutte contre les changements climatiques, nous devons utiliser des biocarburants vraiment durables. Nous devons investir dans des biocarburants permettant une réelle réduction des émissions et n’entrant pas en concurrence avec la production alimentaire. Nous n’abandonnons évidemment pas les biocarburants de première génération, mais notre message est clair: l’expansion future des biocarburants devra venir des biocarburants avancés. Tout le reste ne sera pas durable" a ajouté Mme Connie Hedegaard, commissaire européenne chargée de l’action pour le climat.
Seuls les biocarburants qui remplissent un ensemble de critères de durabilité peuvent bénéficier d’aides publiques sur le marché européen.
Produits de façon durable et selon des procédés efficaces, les biocarburants représentent, pour le bouquet énergétique de l’UE, une solution de substitution à faible intensité en CO2 par rapport aux combustibles fossiles, en particulier pour le secteur des transports. Dans différents rapports publiés par la CE, il est noté que les biocarburants restent faciles à stocker et à distribuer, présentent une forte densité énergétique et émettent généralement beaucoup moins de gaz à effet de serre que le pétrole, le gaz naturel ou le charbon.
À mesure que le marché des biocarburants s’est développé, il est devenu manifeste que tous les biocarburants ne se valaient pas en ce qui concerne les émissions de gaz à effet de serre liées à l’affectation des sols. D’après de récentes études scientifiques, si l’on prend en compte les modifications indirectes de l’affectation des sols provoquées par la production de biocarburants, par exemple le déplacement de la production agricole destinée à l’alimentation humaine ou animale vers des terres non agricoles, telles que des forêts, la contribution de certains biocarburants aux émissions peut en fait être équivalente à celle des combustibles fossiles qu’ils remplacent.
La Commission Européenne propose donc de modifier la législation actuelle sur les biocarburants introduite par la directive sur les énergies renouvelables (1) et par la directive sur la qualité des carburants (2), et notamment:
► de porter à 60 % le niveau minimal de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour les nouvelles installations, afin d’améliorer l’efficacité des processus de production des biocarburants et de dissuader l’investissement dans des installations présentant une faible performance en matière d’émissions de gaz à effet de serre;
► d’inclure des facteurs liés aux changements indirects d’affectation des sols (ILUC) dans les rapports que doivent soumettre les fournisseurs de carburant et les États membres sur la réduction des émissions associée aux biocarburants et aux bioliquides;
► de restreindre jusqu’en 2020 au niveau actuel de consommation, c’est-à-dire 5 %, le volume de biocarburants et de bioliquides produits à partir de cultures alimentaires pouvant être comptabilisé dans les 10% d’énergies renouvelables que vise l’UE à l’horizon 2020 pour le secteur des transports, tout en gardant inchangés les objectifs globaux en matière d’énergies renouvelables et de réduction de l’intensité en CO2;
► de prévoir des mesures incitatives afin de promouvoir les biocarburants auxquels sont associé un niveau faible ou nul d’émissions liées au changement indirect dans l’affectation des sols, en particulier des biocarburants de deuxième ou troisième génération produits à partir de matières premières n’entraînant pas de besoins de terres supplémentaires, telles que des algues, de la paille ou divers types de déchets, car ils contribueront davantage à la réalisation de l’objectif de 10% d’énergies renouvelables dans le secteur des transports fixé par la directive sur les énergies renouvelables.
Grâce à ces nouvelles mesures, la Commission Européenne entend promouvoir des biocarburants qui, tout à la fois, permettent de réduire sensiblement les émissions, n’entrent pas directement en concurrence avec la production alimentaire et sont plus durables.
La proposition actuelle ne restreint pas la possibilité pour les États membres d’octroyer des subventions aux biocarburants, mais la Commission est d’avis qu’après 2020, les biocarburants ne devraient recevoir d’aides financières que s’ils permettent une réduction sensible des émissions de gaz à effet de serre et ne sont pas produits à partir de cultures destinées à l’alimentation humaine ou animale.
Explications :
La directive de 2009 sur les énergies renouvelables exige une part de 10 % d’énergies renouvelables dans la consommation du secteur des transports à l’horizon 2020; la directive sur la qualité des carburants fixe un objectif de 6 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2020 pour les carburants utilisés dans le secteur des transports. Une contribution notable des biocarburants à la réalisation de ces objectifs est escomptée.
Afin d’éviter d’éventuels effets secondaires négatifs, les deux directives imposent des critères de durabilité que les biocarburants et les bioliquides doivent respecter pour être comptabilisés aux fins de la réalisation des objectifs et bénéficier d’aides.
Les critères de durabilité des biocarburants aujourd’hui en vigueur empêchent que des forêts, des zones humides et des terres riches en biodiversité soient directement converties à la production de biocarburants et imposent que les émissions de gaz à effet de serre des biocarburants soient inférieures d’au moins 35 % à celles des carburants fossiles qu’ils remplacent. À partir de 2017, cette réduction devra être d’au moins 50%
Le risque existe cependant que pour satisfaire une partie de la demande supplémentaire de biocarburants, les terres dédiées à l’agriculture augmentent à l’échelle mondiale, ce qui conduirait indirectement à une hausse des émissions due à la conversion des sols. C’est pourquoi la Commission a été invitée à examiner l’impact des changements indirects dans l’affectation des sols (ILUC) et à proposer des mesures législatives en vue de réduire au minimum cet impact.
1 : Directive 2009/28/CE relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables
2 : Directive 98/70/CE concernant la qualité de l’essence et des carburants diesel
En 2011, la facture énergétique européenne a atteint 488 milliards d’euros en 2011 soit 3,9 du PIB européen. Donc 61 milliards pour la France. En 1999, cette facture était de 84 milliards d’euros soit 1% du PIB européen. Donc, par rapport à 1999, l’Europe consacre presque 3% de PIB supplémentaire pour sa facture énergétique. Il est temps de faire quelque chose.
Decidemment quand arrivera t’on à ,leur faire comprendre que l’avenir est entr’autres dans les bio-carburants, mais en milieu marin et à base d’algues ?
Decidemment quand arrivera t’on à ,leur faire comprendre que l’avenir est entr’autres dans les bio-carburants, mais en milieu marin et à base d’algues ?
Certes tout est biologique dans la nature mais le raccourci « Bio » est utilisé pour une agriculture sans intrants chimiques. Ce n’est pas le cas des AGRO -carburants. D’ailleurs pourquoi cette appelation gênerait-elle ?
Oui! En revanche, il va falloir trouver d’urgence un meilleur indicateur que des points de PIB pour mesurer l’évolution relative de la dépendance européenne au pétrole. Pcq un indicateur qui ne mesure que le « quantitatif » sans vraiment se proccuper du « qualitatif » et surtout des effets à long terme, est un très mauvais indicateur. L’avenir, C faire mieux avec moins. Et ça le PIB ne sait pas bien le mesurer. Bref, il est urgent de changer de modèle, le toujours « plus de » a vécu. Il est mort. Vive le futur sobre et intelligent.
Pourquoi ne parler que d’agro-carburants dans les transports alors que la directive fixe un objectif d’ENR dans les transports ? Il faut s’intéresser à tous les carburants alternatifs, renouvelables, liquides mais aussi gazeux. Au passage les agro-carburants liquides consomment beaucoup d’énergie et d’eau pour leur production et leur vertu première est plus d’être renouvelable que véritablement écologique. Il faut développer toutes les sources de carburants ENR : biométhane issu des déchets, méthane issu de procédés de méthanisation, carburants issus des microalgues … Il faut créer le plus possible d’économies circulaires qui réutilisent nos déchets pour produire d’autres services. A moins, que l’objectif soit plus de trouver d’autres débouchés aux industries agroalimentaires et aux céréaliers, que de se préoccuper d’environnement et d’indépendance énergétique …
@Climax Vous êtes sûr de vos chiffres ? en (seulement) 21 ans, le montant de la « facture » aurait augmenté de 480 % durant cette période ???? Cela représente quelle augmentation en « volume » ?
Les importations de pétrole et de gaz représentent le plus important transfert de richesses des pays de l’UE des 27 au reste du monde. En 1999, l’UE des 27 a dépensé plus de 84 milliards d’euros pour les importations d’énergie, à savoir 1% de son PIB. En 2011, l’UE des 27 a dépensé plus de 488 milliards d’euros pour les importations d’énergie, à savoir six fois plus qu’en 1999, ce qui correspondait à 3,9 % du PIB de l’UE. En 1999, le pétrole était à 20 dollars le baril contre 110-115 dollars aujourd’hui.
attention,l’électricité allemande à partir de biogaz quasiment exclusivement produit à partir à base de cultures alimentaires (maïs intensif) est peut-être la prochaine cible!