Que s’est t-il passé dans les 4 projets clés de la fusion nucléaire dans le monde ?

Que s'est t-il passé dans les 4 projets clés de la la fusion nucléaire dans le monde ?

Il y a un an, des chercheurs américains ont réalisé un tir laser record au National Ignition Facility (NIF), suscitant un intérêt mondial pour le potentiel de la fusion nucléaire. Depuis lors, l’énergie issue de la fusion a reçu une attention sans précédent sur la scène mondiale, notamment lors de la COP28 à Dubaï.

Le record du NIF

En décembre dernier, le NIF a établi un record en réalisant pour la première fois l’allumage de la fusion, ce qui a immédiatement renforcé les perspectives de l’énergie de fusion propulsée par laser. Le 30 octobre de cette année, les chercheurs du NIF ont établi un nouveau record, en délivrant plus d’énergie que jamais auparavant – 2,2 mégajoules – sur une cible d’allumage. Cette expérience a permis d’obtenir l’allumage – pour la quatrième fois en un an – et a produit 3,4 MJ d’énergie de fusion, le deuxième rendement en neutrons le plus élevé jamais atteint au NIF.

Deux des 48 ensembles optiques finaux qui convertissent la longueur d’onde des lignes de faisceaux du FNI et concentrent la lumière laser dans la chambre cible. (Photo : LLNL/Damien Jemison)

En bref

Le National Ignition Facility (NIF) est un laser de recherche extrêmement énergétique, situé au Lawrence Livermore National Laboratory à Livermore, en Californie, aux États-Unis. Ses deux fonctions principales sont le test des armes nucléaires des États-Unis et les expériences liées à l’énergie de fusion. Le NIF utilise la technique du confinement inertiel pour permettre aux scientifiques d’étudier la fusion nucléaire et les autres domaines d’utilisation des plasmas extrêmement denses.

Le NIF utilise 192 faisceaux laser de grande puissance qui, après un parcours d’environ 300 mètres, sont focalisés sur une cible située au centre d’une “chambre d’expériences”, une sphère métallique de dix mètres de diamètre. La cible est constituée d’une capsule recouverte de béryllium renfermant un mélange de deutérium et de tritium servant de combustible.

Le 5 décembre 2022, le NIF a atteint le seuil où l’énergie produite est supérieure à l’énergie consommée : ses 192 lasers ont concentré 2,05 MJ sur la cible, qui en fusionnant a dégagé 3,15 MJ. Cependant, l’expérience a nécessité à peu près 300 MJ du réseau. Il faudra encore quelques décennies pour parvenir à la fusion commerciale. De nombreuses nouvelles approches cherchent à réduire considérablement les coûts associés aux grands projets de démonstration de la fusion.

JT-60SA : le plus grand tokamak opérationnel à ce jour

Le JT-60SA, le plus grand dispositif expérimental de tokamak opérationnel à ce jour, a été conçu et construit à Naka, au Japon, grâce à un effort de coopération entre le Japon et l’Europe. Le 1er décembre, ces parties ont choisi d’inaugurer officiellement l’installation en démontrant un plasma de divertor avec 1 million d’ampères de courant.

Le dispositif JT-60SA est le fruit d’une collaboration entre l’Europe et le Japon dans le cadre de l’accord sur l’approche élargie. L’installation est située au siège des National Institutes for Quantum Science and Technology à Naka, au Japon. (Photo : Fusion 4 Energy/QST)

En bref

Le JT-60SA (Super Advanced) est un tokamak supraconducteur, le plus grand en fonctionnement dans le monde à ce jour. Il est situé à Naka, au Japon, et est le fruit d’une collaboration internationale entre le Japon et l’Europe. Le JT-60SA a été conçu pour soutenir le fonctionnement d’ITER en suivant un programme de recherche et de développement complémentaire, et pour étudier comment optimiser au mieux le fonctionnement des centrales de fusion qui seront construites après ITER.

Le JT-60SA est un dispositif expérimental basé sur le concept de tokamak, dans lequel un gaz chaud est confiné dans un récipient en forme de tore à l’aide d’un champ magnétique. Le gaz sera chauffé à plus de 100 millions de degrés, généralement pendant 100 secondes toutes les heures. Dans le JT-60SA, le combustible de plasma sera de l’hydrogène ou du deutérium.

Le JT-60SA est capable de confiner des plasmas de deutérium au point de rupture, atteignant des durées d’impulsion plus longues que les échelles de temps qui caractérisent les processus clés du plasma tels que la diffusion du courant et le recyclage des particules. Il a pour objectif ultime d’atteindre un fonctionnement de tokamak entièrement non inductif et en régime permanent grâce à une haute pression de plasma.

La construction du JT-60SA a commencé en juin 2007 et a été achevée en 2020. Le programme JT-60SA a été lancé dans le cadre de l’accord “Broader Approach” entre l’UE et le Japon sur l’utilisation la plus rapide possible de l’énergie de fusion. Le plan de recherche du JT-60SA, élaboré conjointement avec ITER, couvre la durée de vie de l’installation d’environ 20 ans.

JET : le seul tokamak existant capable d’opérer avec le mélange de carburant deutérium-tritium

Le Joint European Torus (JET) au Culham Centre for Fusion Energy dans l’Oxfordshire, en Angleterre, est le seul tokamak existant capable d’opérer déjà avec le mélange de carburant deutérium-tritium qui sera utilisé dans les futures centrales de fusion. Des décennies d’expériences au JET ont optimisé les réactions de fusion en deutérium-tritium et ont aidé au développement de techniques pour gérer la rétention de carburant, l’évacuation de la chaleur et l’évolution des matériaux.

Intérieur du tokamak JET. (Photo : EUROfusion)

En bref

Le JET a été conçu pour étudier la fusion dans des conditions proches de celles nécessaires pour une centrale électrique et est le seul dispositif capable de fonctionner avec le mélange de deutérium-tritium qui sera utilisé pour la production d’énergie de fusion commerciale. Depuis sa mise en service en 1983, JET a réalisé des avancées majeures dans la science et l’ingénierie de la fusion, ce qui a conduit à la construction d’ITER, la première machine de fusion à l’échelle commerciale.

JET détient la plupart des records de performance en matière de fusion : 13 MW de puissance de fusion maximale, 14 MJ d’énergie maximale produite en une seule impulsion et la valeur la plus élevée du produit triple (densité, température et temps de confinement). Le JET est financé et exploité par le Royaume-Uni et coordonné par le consortium Eurofusion, qui regroupe des chercheurs et des institutions de toute l’Europe. Les travaux menés sur JET ont permis de mieux comprendre et de maîtriser les plasmas de fusion, contribuant ainsi à la conception et à la construction d’ITER.

ITER : le projet de fusion tokamak international

Le Conseil de l’ITER s’est réuni les 16 et 17 novembre pour examiner les performances du projet de fusion tokamak international en construction à Cadarache, en France, et discuter d’une mise à jour de la base de référence du projet. L’Organisation ITER travaille à établir une nouvelle base de coûts et de calendrier, prenant en compte la récupération des retards passés dus à la pandémie de COVID-19, les défis techniques de la réalisation de composants inédits et les tests renforcés des composants pour compenser les risques futurs.

Cette image prise début novembre ne montre pas la construction d’ITER, mais les travaux ont commencé pour retirer les deux bobines de champ toroïdal et les panneaux du bouclier thermique qui constituent le module sectoriel n°6 (au premier plan) en vue d’une réparation. (Photo : ITER Organization)

En bref

Le projet ITER (International Thermonuclear Experimental Reactor) est une initiative scientifique internationale visant à démontrer la faisabilité de la production d’énergie par fusion nucléaire. Il est basé sur le principe du confinement magnétique. Le projet a été inauguré en 1987 et est le fruit d’une collaboration entre 35 pays, dont la Chine, l’Union européenne (via Euratom), l’Inde, le Japon, la Corée, la Russie et les États-Unis.

L’objectif principal d’ITER est de générer et d’étudier le comportement des “plasmas en combustion”. Dans un tel plasma, l’énergie libérée par les réactions de fusion est suffisante pour maintenir la réaction sans apport d’énergie externe. ITER vise à produire des plasmas de deutérium-tritium auto-entretenus par des réactions de fusion, générer 500 MW de puissance de fusion dans le plasma pendant 400 secondes, et démontrer la faisabilité de la fusion comme source d’énergie à grande échelle.

Le réacteur ITER, situé à Cadarache en France, sera une structure impressionnante, pesant 23 000 tonnes et mesurant près de 30 mètres de haut. Il sera situé au milieu d’un site de 180 hectares, entouré de bâtiments et d’équipements auxiliaires. La construction de l’installation ITER a commencé en 2010 et le programme est officiellement entré dans la phase d’assemblage en juillet 2020.

En synthèse

La recherche sur l’énergie de fusion a fait des progrès significatifs au cours de l’année écoulée, avec des avancées majeures dans plusieurs projets de fusion soutenus par le gouvernement à travers le monde. Ces progrès ont renforcé les perspectives de l’énergie de fusion en tant que source d’énergie propre et renouvelable pour l’avenir.

Pour une meilleure compréhension

Qu’est-ce que l’énergie de fusion ?

L’énergie de fusion est une forme d’énergie produite par la fusion de noyaux atomiques légers pour former un noyau plus lourd. C’est le processus qui alimente le soleil et les autres étoiles.

Qu’est-ce que le NIF ?

Le National Ignition Facility (NIF) est un laboratoire de recherche situé aux États-Unis qui se concentre sur l’obtention de l’énergie de fusion.

Qu’est-ce que le JT-60SA ?

Le JT-60SA est un dispositif expérimental de tokamak, le plus grand en fonctionnement à ce jour, situé au Japon.

Qu’est-ce que le JET ?

Le Joint European Torus (JET) est un tokamak situé en Angleterre qui peut déjà fonctionner avec le mélange de carburant deutérium-tritium qui sera utilisé dans les futures centrales de fusion.

Qu’est-ce que l’ITER ?

L’ITER est un projet international de fusion tokamak en construction en France, qui vise à démontrer la faisabilité scientifique et technologique de la fusion en tant que source d’énergie.

Références

Sources : Lawrence Livermore National Laboratory, ITER, JET, JT-60SA

[ Rédaction ]

               

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