Avez-vous déjà imaginé le Soleil comme un allié pour tester les matériaux des missions spatiales ? Dans les laboratoires de Sandia au Nouveau-Mexique, une installation unique transforme notre étoile en un outil essentiel pour l’avenir de l’exploration spatiale.
Au cœur du désert américain se dresse une tour impressionnante entourée de miroirs. Tel un gigantesque miroir ardent, le National Solar Thermal Test Facility concentre la puissance du Soleil pour recréer les conditions extrêmes subies par les vaisseaux spatiaux lors de leur rentrée dans l’atmosphère.
L’installation fonctionne comme une loupe colossale, capable de concentrer la lumière solaire jusqu’à 3 500 fois son intensité normale. Cette puissance permet de tester des matériaux dans des conditions proches de celles rencontrées lors d’un vol supersonique ou d’une rentrée atmosphérique.
Des tests essentiels pour les missions martiennes
La NASA utilise actuellement cette installation pour préparer deux missions ambitieuses :
1. Le retour d’échantillons martiens
L’objectif est de ramener sur Terre des roches martiennes. Pour cela, il faut concevoir un bouclier thermique capable de protéger l’atterrisseur le plus lourd jamais envoyé sur Mars. Les ingénieurs de la NASA testent donc des matériaux spéciaux à Sandia.
Ken Armijo, ingénieur à Sandia et directeur des tests pour la NASA, explique : «Plus la charge utile est lourde et le véhicule d’entrée grand, plus il chauffe pendant l’entrée atmosphérique. Le bouclier thermique doit donc être d’autant plus performant.»
2. La mission Dragonfly vers Titan
Un drone hélicoptère doit explorer Titan, la plus grande lune de Saturne.
L’engin est conçu pour effectuer plusieurs sorties une fois arrivé sur Titan, à la recherche de processus chimiques communs à Titan et à la Terre primitive, avant la formation de la vie. Titan pourrait contenir des indices sur la manière dont la vie a pu apparaître sur notre planète. Cependant, avec une atmosphère quatre fois plus dense que celle de la Terre, Titan pose ses propres problèmes, notamment lorsqu’il s’agit de concevoir un bouclier thermique pour que le vaisseau spatial puisse traverser l’atmosphère riche en méthane et larguer le rotor.
Pour reproduire les processus thermiques de l’entrée atmosphérique dans les atmosphères sans oxygène de Mars et de Titan, les chercheurs soufflent de l’azote gazeux sur l’échantillon du bouclier thermique. Récemment, le Sandia a ajouté une conduite de gaz entre la base et le sommet de la tour d’énergie. Une conduite de gaz est un peu comme un tuyau d’arrosage, fournissant du gaz à haute pression là où se déroulent les essais de matériaux.
Une méthode économique et écologique
L’utilisation du Soleil pour ces tests présente plusieurs avantages :
- Économie d’énergie : contrairement aux méthodes traditionnelles (jets d’arc ou lasers), le four solaire ne consomme pas d’électricité pour chauffer les matériaux.
- Réduction des coûts : un test au four solaire coûte environ 25 000 dollars par jour, contre 100 000 à 150 000 dollars pour les autres méthodes.
- Flexibilité : les chercheurs peuvent ajuster l’intensité lumineuse pour simuler différentes phases de la rentrée atmosphérique ou les conditions sur diverses planètes.
« En règle générale, les missions de la NASA testent les matériaux de leur bouclier thermique dans plusieurs installations différentes ayant des capacités différentes avant de certifier le matériau pour le vol« , a précisé Brandon Smith, ingénieur en chef des matériaux du bouclier thermique pour l’atterrisseur de récupération d’échantillons (Sample Retrieval Lander) au Jet Propulsion Laboratory de la NASA. « La capacité de Sandia à effectuer des tests de cette taille complète parfaitement nos autres installations de test.«
Des applications au-delà de Mars
L’installation de Sandia ne se limite pas aux missions martiennes. Elle a également servi à tester :
- Un échangeur de chaleur pour des sondes spatiales utilisant l’effet de fronde autour du Soleil
- Des matériaux pour la navette spatiale
- Des systèmes de communication résistant à la rentrée atmosphérique
Jessica Harsono, ingénieure mécanique au Laboratoire de Physique Appliquée, décrit une application futuriste : «En volant plus près du Soleil, les vaisseaux spatiaux pourraient atteindre des vitesses trois à quatre fois supérieures à celles de Voyager 1, ouvrant de nouvelles possibilités pour l’exploration interstellaire.»
Un outil précieux pour l’avenir de l’exploration spatiale
En permettant de tester des échantillons plus grands et dans des conditions plus réalistes, le four solaire de Sandia joue un rôle essentiel dans la préparation des futures missions spatiales. Il offre aux ingénieurs une confiance accrue dans la capacité des matériaux à résister aux conditions extrêmes de l’espace.
Alors que nous nous tournons vers l’exploration de Mars et au-delà, des installations comme celle-ci continueront à repousser les limites de notre compréhension et de nos capacités technologiques. Le Soleil, source de vie sur Terre, devient ainsi un partenaire inattendu dans notre quête de découverte du cosmos, nous rappelant que les solutions aux défis de l’exploration spatiale peuvent parfois se trouver dans les ressources les plus fondamentales de notre planète.
Source : Sandia